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La déchéance des droits

Couverture du livre « La déchéance des droits » de Fanny Luxembourg aux éditions Pantheon-assas
Résumé:

La déchéance sanctionne le non-respect d'une " incombance ", traduction par la doctrine étrangère francophone d'un concept de droit allemand, qui désigne une exigence de diligence ou de probité requise pour conserver le bénéfice d'un droit, dont le non-respect, bien que ne pouvant faire l'objet... Voir plus

La déchéance sanctionne le non-respect d'une " incombance ", traduction par la doctrine étrangère francophone d'un concept de droit allemand, qui désigne une exigence de diligence ou de probité requise pour conserver le bénéfice d'un droit, dont le non-respect, bien que ne pouvant faire l'objet ni d'une exécution forcée ni d'une réparation, est toutefois juridiquement sanctionné.
Le concept d'incombance pourrait utilement être adopté dans notre droit. non pas que les incombances n'existent pas en droit français mais, faute d'avoir été identifiées comme telles, leur portée conceptuelle n'a pas été dégagée. la déchéance ne sanctionne pas le non-respect d'une incombance par la perte d'un droit mais par la suppression du seul pouvoir, défini comme l'instrument contenu dans tout droit subjectif et qui en permet la mise en oeuvre.
Le pouvoir se distingue ainsi de la capacité de jouissance, aptitude à être titulaire d'un droit. endogène au droit, le pouvoir se différencie également de la capacité d'exercice, dépendante des seules caractéristiques de l'individu (âge, facultés mentales et physiques), et donc exogène au droit. la distinction traditionnelle entre pouvoir et capacité d'exercice, en vertu de laquelle le premier désigne l'aptitude à exercer valablement un droit dans un intérêt au moins partiellement distinct du sien, et la seconde l'aptitude à exercer un droit dans son propre intérêt, doit être remise en cause : la définition de la capacité d'exercice englobe la définition classique du pouvoir, et doit être étendue à l'aptitude juridique à exercer un droit, que ce soit dans son propre intérêt ou dans celui d'autrui.
Le terme de pouvoir doit être, quant à lui, réservé à l'instrument contenu dans le droit qui en permet l'exercice. ces deux éléments - l'incombance, le pouvoir - participent d'une théorie générale de la déchéance et permettent de la distinguer des sanctions voisines. en ne privant que du seul pouvoir, elle n'anéantit ni l'existence - valable - du droit qu'elle affecte, ni a fortiori la situation juridique de l'intéressé.
Elle se distingue ainsi des sanctions qui anéantissent totalement ou même partiellement un droit ou un acte juridique dans son existence (nullité totale, nullité partielle, clause réputée non écrite, résolution, forclusion, prescription, etc.). ces deux éléments permettent également de la distinguer des sanctions qui privent seulement un individu de l'exercice d'un droit ou d'une activité comme l'interdiction, la suspension, la sanction de l'abus du droit, etc.
Cette classification des sanctions civiles permet en outre de mettre en exergue les fonctions variées de la déchéance : tantôt punitive, tantôt préventive, la déchéance remplit également des fonctions protectrices et dissuasives importantes qui en font un outil précieux à l'usage du législateur et des contractants. cette classification des sanctions civiles contribuera peut-être, à l'avenir, à réduire le contentieux dont la déchéance fait aujourd'hui l'objet en droit interne.
En droit européen, le contentieux de la déchéance n'est en revanche pas prêt de se tarir car le caractère forfaitaire et automatique de certaines déchéances s'accommode mal des exigences de proportionnalité imposées par la convention européenne des droits de l'homme en matière de sanction.

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