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Les Intermittences du coeur, ce n'est pas seulement le titre d'une des sections les plus émouvantes, au coeur de la Recherche du temps perdu de Marcel Proust (dans Sodome et Gomorrhe) ; cela devait initialement en être, selon l'un des projets de Proust, le titre d'ensemble. On oublie trop souvent que Proust ne parle pas de la mémoire et de ses intermittences, seulement pour des raisons métaphysiques, mais d'abord comme d'un déchirement intime, dans les relations humaines.
La perte des êtres les plus chers, elle-même, nous l'oublions le plus souvent ; et quand elle nous revient, involontairement, elle n'en est que deux fois plus douloureuse ; douloureuse par la perte qu'elle ravive, mais aussi par la culpabilité de l'oubli, qu'elle réveille.
Je pense, comme beaucoup, que je craignais de m'attaquer à la montagne que représente cet auteur, appréhendant les phrases alambiquées et, surtout, interminables. Car, sans en avoir lu une seule ligne, si ce n'est la fameuse « Longtemps, je me suis couché de bonne heure », je me faisais une idée très arrêtée de ce qu'il représentait, à savoir surtout un auteur que ne pouvaient lire, et comprendre, que les lettrés au sens le plus strict du mot.
Une de mes amies, qui a lu l'intégralité d'A la recherche du temps perdu, avait bien déjà essayé de m'inciter à lire l'auteur, me disant « tu verras, c'est Dynastie en bien écrit ». Oui, enfin, je ne suis pas sûre qu'il y ait véritablement du Dallas dans l'oeuvre de Proust.
Et ? J'ai opté pour un compromis en acquérant ce petit livre de moins de 100 pages qui raconte la relation particulière qu'entretient le narrateur avec sa grand-mère, notamment depuis que cette dernière est décédée. Alors oui, dit comme ça, c'est bizarre, mais le narrateur revient sur les souvenirs, ses regrets, ce qu'il aurait pu faire mieux. Et, comme je l'imaginais, ça digresse beaucoup sans pour autant rendre la lecture pénible.
Alors, ai-je aimé ? Et bien je répondrai oui, assez. La plume est riche et non dépourvue d'humour, le phrasé surtout est agréable, j'ai lu quelques passage à voix haute, ce qui a permis de me rendre compte à quel point la langue était belle, car qu'elle est belle notre langue française.
Voudrais-je lire pour autant le monument qu'est A la recherche du temps perdu ? Ptêt bien oui, ptêt bien que non. Désormais, je vois cela comme possible alors que j'imaginais cela inatteignable il y a peu. Courrais-je pour autant acheter le premier tome ? Non, faut pas pousser quand même.
Je pensais que Les intermittences du coeur était une oeuvre à part entière, une nouvelle écrite par Marcel Proust à ses débuts ou entre deux volumes de sa titanesque aventure. J'ai appris ensuite qu'il s'agissait d'un extrait du volet numéro quatre intitulé Sodome et Gomorrhe d'A la recherche du temps perdu et qu'à l'origine le roman aurait dû ou pu s'appeler, justement, Les intermittences du coeur.
Alors, me voici doublement comblée, non seulement je peux dire aujourd'hui que j'ai lu du Proust mais aussi que j'ai lu un morceau de son incroyable roman.
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