"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quels secrets cache l'ombre du jacaranda, l'arbre fétiche de Stella ? Il faudra à son ami Milan des années pour le découvrir. Des années pour percer les silences du Rwanda, dévasté après le génocide des Tutsi. En rendant leur parole aux disparus, les jeunes gens échapperont à la solitude. Et trouveront la paix près des rivages magnifiques du lac Kivu.
Sur quatre générations, avec sa douceur unique, Gaël Faye nous raconte l'histoire terrible d'un pays qui s'essaie malgré tout au dialogue et au pardon. Comme un arbre se dresse entre ténèbres et lumière, Jacaranda célèbre l'humanité, paradoxale, aimante, vivante.
Jacaranda prolonge l’histoire de « Petit pays » et nous plonge dans l’histoire du Rwanda et le génocide des Tutsis.
Gaël Faye raconte avec le cœur une fiction mêlée d’histoires vraies qui appartiennent à sa famille, son entourage. Car pour comprendre, il faut savoir que l’auteur est né d'une mère rwandaise et d’un père français. Il a choisi de vivre au Rwanda avec son épouse. Il est également membre du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), une association française qui poursuit les génocidaires réfugiés en France.
Jacaranda décrit sur vingt ans et quatre générations l’histoire d’un pays marqué par la colonisation et les tragédies qui ont débouché sur un génocide. Milan, le jeune héros du roman, est né en France. Il ne sait rien du pays natal de sa mère qui n’évoque jamais sa famille. Jusqu’à ce jour de 1994 où apparait Claude, un mystérieux cousin blessé à la tête.
Lorsque Milan accompagne sa mère au Rwanda où il fait la connaissance de sa grand-mère et retrouve Claude, il se sent étranger à ce pays dont il ne parle pas la langue, ne connait pas les coutumes. Mais, bientôt, son regard va changer et il décide de rester au Rwanda et partage la vie précaire de ses nouveaux amis.
Les yeux de Milan se dessillent tandis que le récit bascule vers l’histoire de la tragédie et des survivants. Le roman devient prétexte à mettre en scène des témoignages. A travers le narrateur, Gaël Faye tente d’expliquer les tentatives de réconciliation entre deux ethnies et la mise en place d’une justice du peuple. Il s’agit des tribunaux gacaca qui doivent permettre le pardon et la réconciliation.
« Jour de procès. Le tribunal Gacaca se tenait dans une clairière à l’herbe grasse, plantée d’eucalyptus, tout au bord de la route asphaltée, à quinze kilomètres de Kigali…Face à l’assemblée, une table centrale où devaient siéger les juges. A droite, le banc des plaignants sur lequel Claude était seul, concentré, les yeux fermés pour éviter le regard des deux prévenus qui lui faisaient face. »
A travers la fiction, Gaël Faye aborde de nombreux sujets comme la transmission familiale, les origines du génocide dans l’histoire coloniale du pays, la souffrance des survivants et les familles dispersées, les orphelins livrés à eux-mêmes. C’est cette histoire, souvent méconnue en France, que j’ai trouvé intéressante pour mieux comprendre le vécu de ces familles survivantes. Les différents témoignages sont effroyables et l’on comprend mieux pourquoi le pardon, la réconciliation et la résilience des victimes sont difficiles.
Par contre, j’ai beaucoup moins adhéré au parcours de Milan, ses rencontres. La candeur du narrateur peut parfois agacer, et les dialogues, nombreux, sont souvent verbeux.
J’ai le sentiment que Gaël Faye a écrit ce roman pour exorciser la haine et la souffrance. Il croit aux valeurs humaines, à la résilience et à la réconciliation d’un peuple et on a très envie d’y croire avec lui.
De ma lecture, plutôt que l’écriture qui n’a pas su me séduire, je retiens la force des témoignages qui m’ont touchée.
En 1994 les journaux télévisés rapportaient aux Français des nouvelles de l’épouvantable génocide rwandais mais à l’époque, je crois que le monde était loin d’imaginer l’horreur de la situation. Gaël Faye avait commencé à nous révéler dans Petit Pays ce qu’il a vécu, enfant, au début des massacres. Dans Jacaranda, il raconte son retour au Rwanda trente ans plus tard.
N’arrivant pas à briser le silence maternel Milan part en quête de réponses au cours de son séjour. Il en trouvera certaines auprès de Claude, son ami d’enfance, et surtout lorsque Stella rendra la parole à leur aïeule disparue avec le secret révélé du Jacaranda.
Pour les villageois, le temps a fait son effet. Après les procès les enfants arrivent à cohabiter. Dans un bar Milan et Claude saluent même des tueurs qui ont éliminé la famille de Claude. Avec les années, le pardon est envisageable, la cohabitation entre les ethnies est possible.
J’ai beaucoup aimé ce roman tout en le trouvant un peu moins intense que Petit Pays et pour moi les informations historiques comme le discours de Stella manquaient un peu de naturel.
Mais c’est un récit pudique, humaniste, sur la force de la transmission, le pardon malgré l’horreur et la survivance car « l’indicible est la force des survivants à poursuivre leur existence malgré tout « .
Un très bon roman sur la recherche de l histoire d une famille et le génocide au Rwanda.
Huit ans après "Petit Pays" écrit de nouveau sur le génocide rwandais dans "Jacaranda".
Cette fois, nous suivons le point de vue de Milan, jeune métis français dont l'énigmatique maman est rwandaise. Mais de ses origines rwandaises, le jeune garçon ignore tout. En 1994, sa famille va brièvement accueillir Claude, un petit garçon rwandais blessé et traumatisé mais sans en expliquer les causes à Milan.
Alors, quand plusieurs années après il se rend le temps d'un été au Rwanda avec sa mère et qu'il s'y découvre une famille, c'est le choc: choc émotionnel et choc des cultures.
Alors, année après année, Milan va en découvrir plus sur ce pays et son histoire traumatique.
Gabriel Faye, une nouvelle fois, parvient à faire revivre sous nos yeux cette période de l'histoire du Rwanda mais va plus loin en nous laissant voir également les conséquences sur le pays et ses habitants dans un roman puissant et poignant.
Après Petit pays, que j'avais beaucoup aimé, je retrouve la plume pleine de douceur du passeur de mots et d'émotions qu'est Gaël Faye. Il réussit dans le roman Jacaranda à nous raconter des scènes difficiles des massacres du Rwanda sans que ces personnages s'apitoient sur leur sort mais sans non plus nous cacher les faits. Un grand bravo à lui pour ce roman qui m'a embarquée aux côtés d'une femme avocate, d'une vieille dame, d'une petite fille et de jeunes hommes, tous éprouvés par ce génocide atroce et qui pourtant vont de l'avant. Mon personnage préféré reste Stella, petite fille, voix de la sagesse qui se ressource dans son Jacaranda , qui nous fait vivre à travers ses yeux et sa candeur la souffrance et la résilience d'un peuple.
Ma chronique : " C’est pas une chanson triste, c’est juste une pause, un temps d’arrêt, Le soleil se couche, Dieu rentre au Rwanda, Le ciel a des teintes mauve jacaranda"
Gaël Faye, une fois de plus, nous montre l'infinie beauté de sa plume que ce soit dans ses romans ou ses chansons.
Le jacaranda c'est cet arbre somptueux aux fleurs mauves qui ombrage les jardins et enferme les secrets des hommes.
A travers l’histoire de Milan, c'est le parcours tragique de la famille de l'auteur, dévastée par le génocide des Tutsis.
C'est le silence de sa mère, sa mémoire meurtrie que l'auteur tente de percer.
C'est le silence du Rwanda, entre désir de vengeance et besoin de réconciliation, qu'il veut comprendre.
Milan, métis d'un père Français et d'une mère Rwandaise, partage sa vie entre le collège de Versailles et ses vacances dans la maison sur l'île de Ré. Il a 12ans quand la guerre du Rwanda s'invite à la télévision. Pourquoi sa mère n'en parle jamais ?
Qui est Claude, ce jeune réfugié qui passe quelques semaines chez eux en France ? A partir de 1998, 4 ans après le génocide, Milan se rend plusieurs fois au pays de sa mère. Il réalise que le silence prend trop de place dans ce pays, que " le cycle de vengeance est sans fin".
Il retrouve Claude et fait la connaissance de "Sartre" l'intellectuel, grand frère des Mayibobos, ces orphelins de guerre qu'il protège.
Milan assiste aux tribunaux populaires, les Gacacas, qui jugent les génocidaires vers les années 2000.
Près du Jacaranda vivent Eusébie, une amie de sa mère, sa fille Stella et la grand-mère Rosalie, 115 ans et très pieuse. Elle nous raconte qu'après son enfance dans une famille royale, elle n'a plus jamais connu la tranquillité. On apprend les origines des génocides, ces vieilles haines entre Hutus et Tutsis, l'intervention des colons Belges et des pères Blancs et l'exil des Tutsis au Burundi.
Même si les histoires de guerre vous rebutent, ne passez pas à côté de ce livre magnifique. La beauté des paysages, des couchers de soleil sur le lac Kivu, le bleuté du jacaranda et la douceur des mots de Gaël Faye adoucissent la barbarie. L'auteur s'interroge " comment autant de haine a pu exister dans ce jardin d'Eden ?
C'est aussi un livre sur la transmission et la réconciliation afin que ces drames ne se reproduisent plus !
Marteler la porte close du passé
Il y a huit ans j’avais eu le bonheur de rencontrer Gaël Faye pour la sortie de Petit pays. J’avais apprécié ce livre lumineux sur un sujet des plus sombres, le génocide des Tutsi, il y avait de la douceur à faire connaître l’indicible. Dans ce premier roman il avait choisi de raconter à hauteur d’enfant.
Il a parfaitement raison de dire que Jacaranda n’est pas une suite.
Ici le lecteur va suivre l’histoire du Rwanda sur quatre générations et voir comment cette histoire va transformer un adolescent en homme.
La construction est appropriée pour percer le silence autour de l’Histoire de ce pays et faire évoluer Milan, d’adolescent en homme conscient, qui va creuser la question des origines, l’appartenance et ce sentiment prégnant d’être chez soi.
Milan est le fils de Venancia mère rwandaise et de père français.
Une famille ordinaire jusqu’à ce jour de 1994 où le Rwanda s’invite à la table du diner par le biais du journal télévisé.
Milan reçoit le silence de sa mère comme une bombe il s’aperçoit qu’il ne connait rien de ses origines.
Ses parents se séparent et Milan va suivre sa mère pour des vacances dans ce pays inconnu.
« Tu viens ici en touriste et tu repartiras en pensant avoir passé de bonnes vacances. Mais on ne vient pas en vacances sur une terre de souffrances. Ce pays est empoisonné. On vit avec des tueurs autour de nous et ça nous rend fous. »
Il va rencontrer la meilleure amie de sa mère Eusébie et sa fille, la petite Stella, qui est très proche de son arrière-grand-mère Rosalie.
Eusébie œuvre jour et nuit à faire de ce pays un lieu vivable.
« Il faut que Stella et Milan puissent vivre dans ce pays en toute sérénité, en étant fiers d’être rwandais. Pas qu’ils grandissent en rasant les murs et en craignant constamment pour leur vie, comme ce que nous avons connu, toi, moi, et toute notre génération. »
Attitude très différente de celle de Venancia qui n’a de cesse de répéter à Milan « Le passé ne te regarde pas ».
Finalement c’est la quatrième génération qui va nous raconter l’Histoire de ce pays, c’est la force de cette narration.
Sartre est un personnage haut en couleur qui a lui seul montre l’ambiguïté de la folie des hommes, il est Hutu et recueille des orphelins Tutsi.
Claude marqué dans sa chair est l’oncle de Milan, mais ils ont le même âge.
Autour de ces personnes l’édifice qu’est ce pays va s’ériger pierre à pierre grâce à cette jeune génération qui ne veut pas du silence.
Une phrase de ce livre le résume entièrement « L’indicible ce n’est pas la violence du génocide, c’est la force des survivants à poursuivre leur existence malgré tout. »
Et j’ajouterai « ici et maintenant ».
Si la violence perdure ainsi que les traumatismes, la mémoire n’est pas un mausolée mais un lien solide pour une réconciliation qui permette de construire pour les générations d’après.
Surtout ne rien esquiver, les faits des uns doivent se transformer en mots pour les autres pour tisser un avenir possible et apaisé.
Gaël Faye avance avec pudeur et élégance, douceur et force, c’est sa marque. Une plume qui souligne qu’il y a des mains armées qui frappent mais aussi des mains vides qui laissent faire, et c’est avec ce matériau qu’il faut composer pour ne pas propager, proroger la haine.
C’est un livre qui ne répond pas à la question, pourquoi la folie des hommes ? Mais c’est un ciment pour construire et dire l’importance de s’emparer de l’Histoire pour les générations qui n’ont pas connu la période, elles peuvent œuvrer pour la paix.
©Chantal Lafon
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J'ai aimé le début de ce roman hommage à la mère, jusqu'au discours de Stella.
Ce discours trop didactique m'a agacé : pourquoi bien tout expliquer au lecteur alors que le narrateur même est dans le flou ?
J'ai eu de la peine pour Stella qui ne peut pas faire correctement le deuil de sa grand-mère et est terrassée par la coupe de son arbre.
J'ai été étonnée par la mère de Stella qui va de l'avant, fait partie du gouvernement, mais ne comprend pas l'attachement au passé.
J'ai été surprise par Sartre qui cache bien son jeu.
J'ai eu de la peine pour Milan, le narrateur, qui ne sait pas parler à sa mère, qui elle refuse de s'attarder sur le passé.
J'ai aimé Claude qui souhaite se venger, s'exile et revient le coeur apaisé.
J'ai été étonnée par la facilité des migrations dans les pays voisins.
J'ai découvert la bière de bananes et les tribunaux gacaca de villages.
J'ai adoré le Palais de Sartre plein de livres, de musiques et de fêtes.
L'image que je retiendrai :
Celle de la maison reconstruite d'Alfred, au bord du lac sous une colline.
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