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Tu t'appelles Dorrit.
Au début de l'histoire, tu es un foetus. A l'abri, au chaud.
Indesirée.
On ne t'attend pas.
On t'appréhende. Te redoute.
Tente de te perdre.
L'avortement échoue.
On pourrait dire tant mieux.
Toi, tu le vivras tant pis. Toute ta vie.
Entre tes souvenirs, ceux de la mère surtout, les cinq années où elle sera là, avant l'abandon, et tes tentatives de comprendre et de survivre à tes traumatismes, se profile les crimes d'une société. Envers la femme.
Les lacunes d'une famille, la fatalité de l'héritage, d'indifférence et de reproches.
Tu écriras, Dorrit.
Tu prendras la plume pour raconter les combats perdus d'avance, les indésirables et les corps qui abandonnent.
Tu prendras la plume et tu raconteras l'être humain avec beaucoup de clairvoyance, de sensibilité et de justesse.
Ta plume sera l'arme.
Ta plume sera salvatrice.
Elle sera le mouvement. Celui qui évite de sombrer.
J'ai lu ce livre d'une traite, comme on s'abreuve, à pleine bouche. A prendre les mots avec les doigts, goulument, et à m'en mettre partout.
L'écho qu'il a trouvé en moi ne se limite pas au combat féministe. A la mère que nous avons et à celle que nous tentons d'être. A l'avortement.
Comme d'habitude, l'écriture de Nancy Huston m'embarque, et je suis touchée autant par ses mots que par ses engagements.
Etrange récit de souvenirs que celui de Nancy Huston dans BAD GIRL CLASSES DE LITTERATURE, qui dans un discours adressé au fœtus qu’elle fut , déroule pour elle, par vagues successives, le fil de ce que sera son enfance de créature non désirée au sein d’un couple fragile . « Accroche-toi, petite Dorrit » prévient-elle l’ embryon auquel elle a donné ce nom , ( allusion au personnage d’orpheline de Charles Dickens ?) , annonçant par là la vie difficile qui l’attend, racontée sans pathos ni gémissements .
BAD GIRL c’est ainsi qu’elle s’est sentie , quand sa mère a quitté le foyer en délaissant ses deux enfants, une expression déchirante qui traduit le sentiment de culpabilité de la petite fille qui , ne connaissant pas les motifs intérieurs du départ de sa mère, pense qu’elle l’a tellement déçue que celle –ci a fini par l’abandonner . « Bad girl, comment ne pas se sentir nulle quand votre mère vous quitte ?»
CLASSES DE LITTERATURE, parce que Nancy Huston y analyse les activités et des attitudes qui la sauvèrent , qui l’aidèrent à échapper à son destin d’enfant mal aimée, à transcender sa solitude intérieure, à se construire un univers de substitution, des activités qui deviendront le creuset d’où sortiront ses romans
.
Ce sont d’abord, l’habitude , prise très jeune de se raconter des histoires, de se bâtir des scénarios, « tu te parleras à la troisième personne, transformant chacun de tes gestes en une scène et ta vie quotidienne en roman » puis celle de la lecture, « en silence et en secret, grâce à la lecture, des histoires se tissent dans ta tête » ; Il y aura aussi la pratique du piano, «ta classe de piano te sera classe de littérature… tu y acquerras le goût du travail minutieux, patient, maniaque » .
Elle tirera matière de sa beauté de petite fille jolie , puis de jeune femme libérée « ta joliesse sera pour toi une classe de littérature », les attitudes et les propos des hommes qu’elle séduira alimenteront sa création littéraire « tu enregistres leur comportement, certaine de prendre un jour ta revanche en les transformant en personnages . Ecrivant , c’est toi qui auras le dessus, toi qui les manipuleras comme des marionnettes, toi qui décideras quand ils doivent l’ouvrir et la fermer »
Cet ouvrage plein d’émotion , qui traduit les angoisses secrètes de l’enfance, peut paraître au début déroutant par son procédé narratif et par son organisation, car la remontée des souvenirs, par fragments, s’accorde mal avec la rigueur du plan chronologique , mais il mérite qu’on le poursuive tant il est riche par la réflexion qui y est menée sur la famille, sur le rôle de la mère ou de ses substituts, et sur l’écriture comme moyen de résilience.
C’est aussi un ouvrage indispensable à la compréhension de la genèse et des thèmes récurrents de l’œuvre abondante de Nancy Huston
Bad Girl est le récit que la narratrice s'adresse à elle-même, Dorrit, et dans lequel elle retrace ses origines, l'histoire de ses aïeuls, la genèse de ses craintes, de ses passions, de sa vocation d'écrivain.
On y croise des féministes avant l'heure, un couple d'ancêtres sourd-muet et aveugle, des figures bienveillantes et une relation ambivalente avec sa mère Allison, qui confie ses trois enfants à leur père alors que Dorrit n'a que six ans, à la suite de l'adultère de ce dernier et de leur divorce.
La prose de l'auteur m'a plu immédiatement, elle est empreinte de poésie, rythmée, et nous dévoile l'intime de ses protagonistes avec finesse.
Dorrit, le personnage du livre, c’est l’auteur elle-même, à qui elle s’adresse en utilisant le « tu », comme dans beaucoup de ses livres.
C’est une introspection complète.
Elle revient souvent sur sa vie intra-utérine, sur sa naissance plus ou moins désirée.
Elle remonte à plusieurs générations de l’histoire de sa famille pour comprendre l’empreinte qu’elle a sur elle.
Elle ne se remettra jamais du traumatisme de l’abandon de sa mère, lui donnant la sensation d’être nulle puisque quittée. Elle se remettra mal aussi des incessants déménagements de son enfance, lui donnant l’impression de n’être de nulle part.
De tout cela, elle tente de s’en sortir par ses lectures, puis par ses écrits, sa seule manière de survivre. Et tous ses livres sont empreints de ces faits familiaux.
Celui-ci, c’est le roman de sa propre vie. Son autobiographie racontée à Dorrit, donc à elle-même. Elle analyse le rôle et la place de la femme et de la mère, dans la société.
Elle donne le sentiment de tourner en boucle depuis on enfance, de ne pas avoir trouvé d’issue, hormis dans la lecture et dans l’’écriture.
Mais elle ne guérira jamais, preuve en est le titre « Bad Girl »
Comme toujours, l’intelligence transparaît dans l’écriture de Nancy Houston, et cette lecture n’en est que plus appréciable, nous éclairant davantage sur ses autres livres et nous poussant à une réflexion sur nous-mêrme..
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