Des conseils de lecture qui sentent bon la rentrée !
Domestique au service des bourgeois, elle est travailleuse, courageuse, dévouée. Mais ce week-end-là, elle redoute de se rendre chez les Daniel. Exceptionnellement, Madame a accepté d'aller prendre l'air à la campagne. Alors la petite bonne devra rester seule avec Monsieur, un ancien pianiste accablé d'amertume, gueule cassée de la bataille de la Somme. Il faudra cohabiter, le laver, le nourrir. Mais Monsieur a un autre projet en tête. Un plan irrévocable, sidérant. Et si elle acceptait ? Et si elle le défiait ? Et s'ils se surprenaient ?
Des conseils de lecture qui sentent bon la rentrée !
La petite bonne, la bonniche, elle est au service des bourgeois depuis qu'elle a sept ans.
Laver, nettoyer, repasser, cuisiner.............
elle ne fait que ça, encore et encore, inlassablement, infatigablement.
Chez les David, l'ambiance est spéciale.
A peine mariés, Monsieur, pianiste, est parti à la guerre et il en est revenu mutilé et gueule cassée.
Depuis des années, il ne vit plus que dans sa chambre, sur son fauteuil roulant.
Madame lui est entièrement dévouée depuis.
Elle a délaissé la vie sociale et essaye de soulager la vie fichue de son mari.
Le roman raconte ces trois personnages et les rapports qu'il y a entre eux..
Quand c'est la petite bonne qui parle, l'écriture est présentée sous forme de vers libres, verticalement, sans ponctuation.
Et ça donne une grande force à cette voix, une très forte résonance.
Les voix de Monsieur et de Madame sont retransmise en prose simple.
C'est un roman absolument magnifique.
L'écriture est très belle et frappe où il faut dans le registre de l'émotion.
Les rapports entre les personnages, en particulier entre la petite bonne et Monsieur sont d'une intensité bouleversante.
Un livre précieux.
Un premier roman qui percute tout à la fois par :
• le style et certains choix narratifs : particulièrement les mises en page des expressions successives à trois voix, et surtout la scansion de courtes phrases, voire mots, avec ces retours à la ligne qui donnent un rythme et une ampleur rare.
• La simplicité de l’histoire : une (petite) bonne intervient chez un couple bourgeois où Monsieur, pianiste est une « gueule cassée » de la bataille de la somme qui s’étiole. Elle va accepter de s’occuper tout un WE de Monsieur pendant que Madame va (enfin) essayer de respirer ailleurs ; et la bonne et Monsieur vont nouer une proximité exceptionnelle redonnant de l’envie, de la vie, … ; au moins pour un temps … (il faut laisser le lecteur découvrir la fin de cette histoire très structurée) ;
• La fugacité et pudeur des thématiques abordées qui donnent une épaisseur et une densité à ces vies cabossées (y compris pour Madame … bien qu’elle ne soit pas la plus reluisante !) ;
Une lecture qui touche. Du (très) bel ouvrage.
Je remercie #NetGalleyFrance et les Éditions Les Avrils pour cette très belle découverte, aussi captivante que surprenante !
"Une gueule cassée
une femme désespérée
et une maladroite
Nous voilà bien"
Lorsque Madame Alexandrine lui demande de la suppléer deux jours, peut-être trois, auprès de son mari infirme, Blaise,
la petite bonne n'a pas idée
de refuser.
Même rebutée,
angoissée,
à l'idée de devoir s'occuper de la maison des Maîtres
et surtout du Maître
des chambres
et surtout de la chambre mortuaire
Malgré tout, l'idée y est dès le départ. C'est décidé, Blaise va demander de l'aide à la petite bonne...
Voici que je m'essaie à la narration déconcertante, percutante, travaillée, choisie par Bérénice Pichat ; encore imprégnée de ce style saccadé, à la mise en page particulière. L'autrice nous propose ici une sorte de huis-clos ouvert, en nous faisant entrer dans le foyer, les récits et les pensées de ses personnages. L'ambiance oppressante, sombrement inquiétante, m'a engloutie. Et le style y est pour beaucoup !
Dans ce très court roman - qui pourrait se lire d'une traite s'il n'était pas si sombre et si lourd - Bérénice Pichat alterne entre narration à la troisième personne et poèmes sans rimes à la troisième et à la première personne. Les thèmes sont pourtant si peu poétiques : servitude, infirmité, avortement, asservissement et mutilations de guerre...
J'ai mis un peu de temps à situer l'histoire dans le temps et l'espace, puis les contours des personnages et de la situation se précisent progressivement. Nous sommes après guerre et Blaise n'en est pas rentré indemne. Il traîne avec lui toutes ses déceptions de pianiste avorté, et tout le désespoir de sa femme, Alexandrine, qui lutte comme elle peut contre leurs projets envolés. La petite bonne, quant à elle, va chambouler leur quotidien sans y prendre garde, sans même s'en rendre compte, en quelques jours seulement.
Ce très court roman (moins de 150 pages) m'a aussi surprise que touchée. J'ai hâte de lire d'autres textes de Bérénice Pichat !
#LaPetiteBonne #NetGalleyFrance
La Petite Bonne, premier roman de Bérénice Pichat, se distingue par sa construction astucieuse et son style poétique. Nous sommes plongés dans l’atmosphère des années 1930, au sein de la maison de la famille Daniel, un couple atypique marqué par les cicatrices de la guerre puisque lui est une Gueule Cassée. Au bout de plusieurs années de survie commune, Blaise Daniel conseille à sa femme de prendre l'air et de partir en week-end à la campagne avec des amis pendant que la bonne le gardera . En nous immergeant dans ce huis-clos de trois jours, l'auteure dévoile les tensions et les émotions des personnages, tissant un tableau psychologique d’une grande richesse.
La structure du roman, alternant prose et vers libres, est l’un de ses aspects qui m'a marqué. Les passages en prose, élégants et descriptifs, laissent entendre les voix des bourgeois, tandis que les vers libres, courts et dépouillés, incarnent la perspective de la petite bonne. Cette dualité stylistique crée un rythme particulier, permettant au lecteur de saisir l'intériorité de chaque personnage tout en maintenant une tension palpable.
Les vers, alignés à gauche pour la bonne et à droite pour des passages mystérieux, ajoutent une profondeur inédite à la narration. L'attente et l'angoisse vécues par la bonne résonnent dans ces lignes, chaque mot étant soigneusement choisi. Au fil de la lecture, on perçoit une intimité croissante entre les personnages, presque confessionnelle, révélant leurs vulnérabilités et désirs. Bérénice Pichat transforme des instants simples en scènes poignantes, où même un contact fugace entre la bonne et Monsieur devient un moment de grâce.
À travers cette œuvre, l'autrice aborde des thématiques telles que la classe sociale, le sacrifice et la quête d'identité avec une finesse remarquable. Les relations entre les personnages, empreintes de méfiance et de tension, évoluent progressivement, dévoilant les nuances de leur humanité partagée. La conclusion du roman, inattendue mais délicatement amenée, laisse une empreinte durable et invite le lecteur à reconsidérer la profondeur des émotions véhiculées par les vers.
Bérénice Pichat réussit à captiver son public du début à la fin, laissant derrière elle un écho de réflexion et d'admiration pour ce premier roman. A LIRE !
Ce roman nous plonge dans le quotidien des domestiques au début du 20e siècle.
Le récit suit une jeune bonne, laissée seule avec Monsieur, un ancien pianiste défiguré par la guerre, après le départ de Madame pour le week-end.
L’atmosphère est lourde, ponctuée de silences et de tensions.
Monsieur, rongé par l’amertume, incarne une figure brisée par la guerre, tandis que la jeune bonne, discrète mais forte, doit faire face à une situation inattendue.
J’ai été complètement captivée par cette histoire, où l’on sent dès le début qu’un événement tragique se profile.
Au fil des pages, le suspense monte et c’est avec une tension grandissante que j’ai tourné chaque page, jusqu’à une fin très réussie.
Le style de Bérénice Pichat, à la fois poétique et percutant, révèle avec finesse les émotions enfouies de ces femmes invisibles, quelle que soit leur classe sociale, et de ces hommes marqués par le conflit.
Ce roman questionne la place des oubliés de l’Histoire, notamment les « gueules cassées » et les femmes dévouées à leur foyer, qui doivent faire preuve de courage face aux épreuves de la vie.
Un texte intense, poétique et touchant, une lecture incontournable de la rentrée littéraire.
Au mitan des années 1930, la petite bonne est au service de plusieurs familles bourgeoises de région parisienne, dont les Daniel, couple atypique composé d'une ancien pianiste, survivant de la bataille de la Somme dont il est revenu gueule cassée, amputé des membres inférieurs au niveau des genoux, les mains mutilées, et son épouse. Poussé par son mari, cette dernière accepte exceptionnellement de passer un week-end à la campagne chez une amie. La petite bonne est chargée de s'occuper de Monsieur. Bérénice Pichat concentre le récit sur ce huis-clos de trois jours dans la maison des Daniel.
La première chose qui frappe et étonne, c'est la structure choisie par l'autrice. Des passages en vers libres alternent avec des passages en prose, tous à la troisième personne. Dans certains romans, ce type de forme s'apparente à un gadget avec lequel l'auteur se regarde écrire en mode épate-bourgeois. Mais là, le procédé est d'une évidente pertinence pour changer de points de vue de façon lisible et aller au cœur de la psyché des personnages.
Les vers libres sont associés à la voix de la petite bonne, des phrases courtes, simples, épurées, sans aucune ponctuation. Le rythme apporté par les retours à la ligne et le choix des mots déploient immédiatement une poésie et une musicalité qui soulignent les silences et marquent les respirations. La prose de récit à l'élégance classique porte elle les voix de Madame et Monsieur; les phrases, plus amples, sont riches en adjectifs et descriptions.
Un dialogue se crée entre ces trois voix, à égalité, rapprochant ainsi des classes sociales qui ne se côtoient que dans un rapport hiérarchique immuable. Le vécu de chacun, son intériorité s'entrelace avec ceux des autres. Progressivement, le récit monte en crescendo dans leur intimité, presque dans le registre confessionnel, tant Bérénice Pichat compose des tableaux psychologiques d'une grande finesse, avec une attention particulière posée sur les corps, leur sensualité et leur sensibilité.
« Son époux est son destin. Du pire, elle a découvert comment tirer le meilleur. Son bonheur est son honneur, engagé et tenu devant tous. Hors de question de songer, même un bref instant, qu'il pourrait en être autrement. Il suffirait ensuite d'y repenser un peu trop souvent. Alors le fragile équilibre patiemment construit s'effondrerait comme un château de cartes. Alors elle saurait avec certitude qu'elle a traversé tout cela pour rien. »
Hors-champ loin de son foyer, Madame reste une présence invisible du huis-clos, elle la mutilée sociale, dévouée à son travail d'épouse avec une abnégation sacrificielle doublée de la culpabilité d'être partie quelques jours. Le tragique de sa condition accompagne le bras de fer qui se joue entre son mari et la bonne.
« Pour l'instant elle l'observe
autant que lui la regarde
en douce
Sans en avoir l'air
ils se jaugent
Le premier qui bougera
aura perdu
aura raison »
Le lien inattendu qui se crée entre eux fascine. On le voit se construire dans une tension à la fois pudique et ferme. Au-delà du mépris de classe, de la méfiance, de la peur et du dégoût, ils se testent, se parlent, apprennent à cohabiter et à comprendre l'altérité face à eux. L'intensité émotionnelle est telle qu'on est subjugué par la beauté de certaines scènes, comme celle-ci lorsque la petite bonne voit Monsieur pleurer et ose le toucher :
« Le contact frémissant
la chaleur des paumes minuscules
sur ce grand dos d'homme abattu
arrêtent le temps
Les tressautements s'apaisent
Le silence se fait
Ils restent longtemps
comme ça
Elle debout
droite
solide
indispensable
derrière le corps brisé
de celui qu'elle n'appellera plus jamais le vieux
même pas dans sa tête
mais Monsieur
parce qu'elle ne se voit plus comment s'adresser à lui
autrement. »
La fin est vraiment inattendue mais parfaitement amenée. Elle a résonné longtemps en moi, m'a bouleversée même, m'amenant à reconsidérer certains passages en vers libres, alignés sur la droite contrairement aux autres alignées sur la gauche, que je n'avais pas vraiment compris, happée que j'étais par la puissance des enjeux. Je les ai relus et je ne suis que plus admirative du travail de cette autrice sur ce premier roman sublime de bout en bout.
J’ai aimé ce huis-clos entre ce couple et la petite bonne.
J’ai aimé découvrir son sceau trop lourd, l’eau froide qui habite les mains, le carrelage sans fin à nettoyer, ses différents patrons : son univers.
J’ai aimé découvrir par petites touches le passé de Blaise le pianiste devenu handicapé lors de la Première Guerre Mondiale.
J’ai moins été sensible à l’univers de sa femme Alexandrine qui se dévoue pour son jeune mari. Je l’ai trouvé un peu trop collet monté.
J’ai aimé ces trois jours pendant lesquels Blaise et la petite bonne se jaugent.
J’ai aimé qu’elle découvre grâce à lui la musique de Mozart qui ne le quittera plus jamais.
J’ai aimé que le secret de la petite bonne réponde à l’envie de mourir de Blaise et à la précédente bonne Mariette sur qui s’ouvre le roman qui a été retrouvée pendue.
Mais si il est question de mort dans ces pages, il est également question de la musique comme cicatrisante et apaisante, source de vie.
J’ai aimé suivre la petite bonne en vers libres. Cette présentation donne une touche aérienne au propos parfois pesants et au climat de renfermé de la chambre de Monsieur.
Un roman très fin et adroit sur les ravages de la Première Guerre dans les corps et dans les esprits.
L’image que je retiendrai :
Celle du corps meurtri par le travail et son mari de la petite bonne.
https://www.alexmotamots.fr/la-petite-bonne-berenice-pichat/
Trois protagonistes , trois voix particulières: la petite bonne à tout faire travaille chez un couple de bourgeois entre les deux guerres. Lui est gueule cassée de 14-18, elle une épouse dévouée à son mari handicapé. Elle part un week-end pour décompresser et demande à la petite bonne de s'occuper de son mari en plus de ses travaux habituels. La relation qui va se créer entre eux est magnifiquement décrite, on pénètre dans l'intimité et les pensées de chacun par un procédé subtil: la bonne s'exprime en vers libres, le couple en prose.
Une mise en page originale qui m'a surprise au départ mais à laquelle on s'habitue très vite et qui nous régale de beauté , de tendresse et nous fait réfléchir. Bérénice Pichat nous parle de classes sociales et de difficultés à vivre mais de façon tellement jolie que c'est un roman qui m'a mise en joie malgré des sujets difficiles. Un des plus beaux romans de la rentrée littéraire 2024.
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