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L'été des éditeurs, entrez dans les coulisses estivales de quelques maisons d’éditions 3/3

L'été des éditeurs, entrez dans les coulisses estivales de quelques maisons d’éditions 3/3

C’est le troisième et dernier épisode de notre mini série consacrée à six éditeurs de la rentrée littéraire, tous différents, et tous à la tête d’une stratégie éditoriale singulière pour faire sortir leur production du lot des 560 romans à paraître entre fin août et fin septembre.

 

Aujourd’hui souvent regroupés au sein de grandes entreprises ou rassemblés sous la bannières des gros distributeurs qui font les intermédiaires entre l’édition et la librairie, les maisons d’éditions gardent dans leur ruban d’adn le sens de l’artisanat, la patience, le goût pour l’échange et la maïeutique qui permettra de faire surgir les écrivains emblématiques de l’époque que nous traversons. A défaut, ils nous auront fait rire, pleuré, agacés, emballés, édifiés, et de toute façon divertis.

 

Ce que nous vous invitons à vérifier dès lundi avec l’opération des Explorateurs de la rentrée, qui verra la publication de plus de 200 chroniques de livres de la rentrée de littérature française dans nos pages.

 

En attendant, Cécile Boyer-Runge, PDG de Robert Laffont évoque la rentrée d’un groupe d’édition complexe et riche, dans ses enjeux, ses problématiques contemporaines toujours tournées vers la qualité littéraire et l’attachement à une marque prestigieuse.

Betty Mialet quant à elle racontera comment, en sa qualité de codirectrice des éditions Julliard, elle organise chaque année la rentrée d’une famille, car c’est le mot, celle des auteurs qui compose le fonds d’une maison à l’ancienne.

 

 

Le groupe

Cécile Boyer-Runge,

PDG du groupe Robert Laffont

 

Préparer une rentrée pour un éditeur, cela implique des textes, mais ensuite ?

 

On a mis en place une stratégie globale au sein de laquelle chaque roman a sa place, en articulant la rentrée Robert Laffont avec celle des éditions Julliard. Chacun dans la maison a joué son rôle, d’abord toute les équipes de conception, de l’éditeur au design, puis les équipes commerciales qui ont la responsabilité de présenter la rentrée aux libraires. Les attachées de presse interviennent parallèlement pour présenter les romans aux medias et medias sociaux qui jouent un rôle important d’amplification lors de cette rentrée de septembre. C’est tout une chaine de valeur qui se passe le relais.

 

Et tout commence quand ?

 

C’est toute la question du bon moment qui se pose. Certains journalistes - et libraires- curieux nous demandent dès février ce que l’on prépare pour fin août ! Il faut évidemment se préparer tôt, sachant que chez Robert Laffont, on publie des romans chaque mois. Si la partie éditoriale commence donc bien en amont, la préparation de la rentrée, en tant que telle, auprès des prescripteurs que sont les libraires et les medias, démarre au printemps. La clef de voûte d’une rentrée, ce sont les textes. Tout bascule dès lors qu’on obtient les premiers retours de lecture, et c’est un moment très émouvant. Nous élaborons des épreuves (des textes qui ont la forme physique du livre mais qui ne sont pas totalement aboutis NDLR) à ce moment-là.

Le deuxième moment est celui de la tournée de présentation des textes choisis aux libraires et aux journalistes en mai et juin. Le groupe Robert Laffont a organisé une réunion de présentation le 24 juin à Paris à laquelle nous avons convié 120 libraires et partenaires, correspondants étrangers, représentants de l’édition de poche et de club, où les auteurs et traducteurs ( pour la littérature étrangère ) sont venus parler de leurs romans.  
Nous avons organisé de nombreux rendez-vous individuels éditeurs / commerciaux , avec des libraires, Paris et Province et en Belgique et Suisse. Nos représentants ont fait un formidable travail de terrain. Au préalable, ils ont mis au point  des argumentaires préparés avec les éléments fournis par les éditeurs et les auteurs, qu’ils ont adaptés à l’adresse de leurs interlocuteurs libraires. Nous avons aussi participé à de nombreuses réunions de présentation avec toutes les principales enseignes culturelles ( Grandes Librairies et Chaînes d'hypermarchés) pour qui la rentrée est un moment économiquement très important dans l’année.

 

Les premiers livres sont sortis hier en librairie, dans quel état d’esprit vous trouvez-vous  ?

 

J’ai le sentiment d’avoir abouti à un ensemble de romans susceptibles de plaire à des publics variés, au moment où plus que jamais je crois dans le livre et dans la force du roman pour chercher et donner à comprendre un monde qui vit tant de bouleversements. Le roman s’impose comme un compagnon, il est du registre de l’intime, on y puise du réconfort, de l’imaginaire et une stimulation intellectuelle comme la distraction au sens fort du terme. Plonger dans un roman c’est renouer avec quelque chose de très intime et à soi. Ça devient rare.

 

La rentrée Robert Laffont s’illustre cette année avec Jean Le Gall, Yasmine Ghata, Arnaud Le Guilcher, Julien Suaudeau, Colm Toibin, Steve Sem-Sandberg, Romain Slocombe, Jean-Michel Delacomptée, Jean d’Ormesson et Charles Dantzig.

 

http://fr.calameo.com/read/000913544406c7c12690b

 

 

La maison à l’ancienne : éditions Julliard

 

Betty Mialet partage avec Bernard Barrault la direction des éditions Julliard, la maison de Philippe Besson, Yasmina Khadra, Philippe Jaenada ou Jean Teulé. La rentrée littéraire est un moment-clef, avec cette année 5 romans en lice.

 

« Nous publions les livres quand ils arrivent, il n’y a pas de stratégie. Cette année ils sont cinq et c’est beaucoup par rapport à l’habitude », souligne Betty Mialet. Chez Julliard, on publie les auteurs qu’on a découverts en ouvrant l’enveloppe postale d’un manuscrit comme cela a été le cas pour Anne Akrich, la petite dernière de la maison, Fouad Laroui ou Philippe Besson : aucun écrivain n’est arrivé par les tractations d’un mercato. « Quand on choisit un auteur, c’est pour longtemps, et on lui fait confiance jusqu’à ce qu’il ait trouvé son public. Je pense aussi qu’on publie des auteurs qui ne seraient pas forcément bien ailleurs, des personnalités littéraires atypiques, un peu cinglés… ». Cette méthode à l’ancienne, minutieuse et propre aux petites maisons littéraires, est, selon les aveux de Betty, plus difficile à appliquer par les temps qui courent. L’appel des prix qui se concentrent  principalement entre six marques d’édition est un chant parfois irrésistible pour les auteurs, « mais quand les auteurs partent, ils finissent par revenir », glisse malicieusement Betty.

 

Mi-juillet, le plus dur est fait… Ou pas : « Les livres sont envoyés aux journalistes et aux les libraires, les stars de la rentrée sont repérées par les listes de prix littéraires, mais ce sont encore beaucoup de déjeuners, de coups de fils, de lettres aux différents acteurs de la rentrée ». Inlassablement jusqu’à Noël, la maison Julliard va se battre pour faire remarquer ses romans. « Mais pas seulement les romans, confie Betty Mialet, cela nous est arrivé de devoir trouver un appartement ou inscrire les enfants à l’école pour nos auteurs ». Chaque année, Betty voit arriver juillet comme un cycliste la fin du tour, avec des bosses et le corps qui souffre : pied plâtré, dos coincé. C’est cela qui doit s’appeler prendre les choses à cœur.

 

Cette année, sur les quatre romans programmés pour la fin août, les éditions Julliard publieront dans le même temps Fouad Laroui et Yasmina Khadra. Il y en aura pour tout le monde : « Ceux qui détestent Yasmina Khadra parmi les medias, adorent en général Fouad Laroui », s’amuse Betty Mialet, tandis que le public, plus généreux dans ses enthousiasmes, les embrassera dans le même élan. Et puis Lionel Duroy qui revient pour L’Absente, aux côtés d’un autre chouchou, Jacques A. Bertrand, avec ses Biographies non autorisées. « Jacques A. Bertrand, c’est le classique absolu, nous pourrions sortir ses livres à n’importe quel moment de l’année, alors justement, pourquoi pas à la rentrée ». Un peu plus tard en septembre, c’est le livre de Michèle Sarde, Revenir du silence, qui terminera le bal. Un livre auquel Betty Mialet tient beaucoup. Mais ne lui demandez pas de choisir entre tous ses auteurs, elle ne le saurait pas : une mère ne choisit pas entre ses enfants.

 

à paraitre éditions Julliard

 

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