"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un roman rapide à lire mais dont j'attendais un peu plus car je pensais que l'histoire était davantage centrée sur l'atelier d'écriture. J'ai été aussi surprise par l'utilisation de la 2ème personne du singulier dans la moitié des chapitres du livre. La quête de Suzanne quant à son passé m'a paru aussi un peu en décalage par rapport au reste du roman. Ce livre est original néanmoins et touchant
Le calame noir
Magique, magnifique, un bel ouvrage auquel il ne manque que des illustrations reprenant quelques oeuvres de ce peintre sortant de l'ordinaire.
Comme bien souvent quand il s'agit de peinture, les références culturelles sont nombreuses. Ici, elles sont inattendues puisque nous entrons dans l'univers de l'artiste, croyant plutôt solitaire en la religion de Mani, maitre du manichéisme, et respectant ses traditions tout en calquant sa vie sur les préceptes musulmans..en apparence!
Nous les suivons à la fin du XV eme siècle dans un pays lointain, environ l'Azerbaidjan et sa capitale d'alors Tabriz et les steppes d'Asie centrale où le peintre se réfugie tous les ans pour se ressourcer et faire évoluer son talent si different de tous les miniaturistes de son époque.
Sa vie d'ermite y est alors décrite ainsi que les pratiques de tribus nomades qui viennent alors passer l'été.
.L'originalité de ce livre réside dans le fait que sa vie, ô combien solitaire est racontée par sa fille à une jeune femme de notre siècle, elle aussi souffrant du décès de son père.
Le style de l'auteure est remarquable de pureté et de simplicité; nous suivons la vie de cet homme sans difficulté et trouvons, nous aussi le temps de nous pencher sur les méfaits de la vie en ville, les bienfaits du retour à la nature et l'aparent dénuement de ces tribus dans des territoires " reculés"
Dans le même temps nous éprouvons une fois encore que la barbarie n'estaps du coté que l'on croit, les isolés, les différents mais que nous les découvrons toujours chez les nantis, les rois et les armées, prompts à décimer et tuer, à recruter s'il le faut des bras armés pour combattre et tuer encore.
J'encourage bien volontiers les lecteurs à se plonger dans ce roman, vous n'en ressortirez pas intact, car vous aurez aperçu, entrevu le bonheur! ou plutôt la félicité!
Ce roman nous introduit au cœur de la vie de Siyah Qalam, peintre énigmatique de la fin du XVe siècle.
Il décrit le parcours de ce peintre au travers du regard de sa fille.
Ce roman comporte peu de rebondissements mais il m’a donné envie de découvir l’œuvre du « calame noir ».
Au travers des yeux d’Aygül, la fille de Siyah Calame, Suzanne fait aussi le deuil de son père.
Ecriture sensible où s’entrecroisent deux histoires celle d’Aygül et celle de Suzanne et où l’on perçoit ce lien indéfectible qui lit une fille à son père.
Yasmine Ghata confirme son grand talent dans ce cinquième roman qu’elle mène avec beaucoup d’originalité, un style qui touche beaucoup son lecteur tout en évitant longueurs et surcharges. "J’ai longtemps eu peur de la nuit" permet de comprendre au plus près ce que vivent les déracinés ayant vécu au plus près les violences les plus extrêmes.
Suzanne mène un atelier d’écriture dans le collège où elle a été elle-même élève. Elle demande aux élèves de 3ème qui sont en face d’elle, de parler d’un objet familier présent depuis longtemps dans la famille. Un adolescent noir a fini le premier et fixe Suzanne.
C’est Arsène et le récit va alterner entre récit classique et texte écrit à la deuxième personne du singulier. L’objet qu’il a choisi est une valise, cette valise qui l’a accompagné et sauvé durant sa fuite du génocide rwandais : « Tu te rappelles la faim, la soif, les nuages au loin qui barraient la route à tout espoir… Pour toi, elle loge un cadavre ; celui de ton enfance pillée, en lambeaux. »
Grâce à la confiance de Suzanne qui retrouve aussi des souvenirs douloureux, Arsène parle de Willy, Flora et Trésor, ses frères et sœurs. Il avait 8 ans et, grâce à sa grand-mère, il a pu fuir à temps, avec cette valise : « vous étiez deux sur ce chemin. Seul, tu n’aurais pas survécu. » Encore près de chez lui, il a entendu les rafales, les cris, les hurlements et vu « des silhouettes familières traînant les corps, récupérant le bétail. »
uzanne est patiente mais se comporte avec rigueur, bienveillance, exigence et familiarité. Arsène continue : « Inséparable de ta valise, tu as dormi sept nuits dedans, le lit neuf te terrorisait. Une parcelle du Rwanda respirait encore à travers les lambeaux de cuir. » Le rapport de l’enfant avec sa valise est étonnant mais se comprend très bien : « Ta survie ne dépendait plus que d’elle, elle était ton toit, tes murs et ton plancher. »
Si Yasmine Ghata a choisi cette façon de raconter à la seconde personne du singulier, c’est parce qu’Arsène n’arrive pas à écrire son histoire. Il raconte à Suzanne qui rencontre le couple d’enseignants qui l’a adopté après beaucoup de temps et de précautions. Il le fallait car Arsène, dans le camp de réfugiés où il a enfin pu être recueilli, n’arrive pas à dormir : « Leurs cris, leurs pleurs, hantaient la nuit. » C’est pourquoi, il a longtemps eu peur de la nuit. Heureusement, dormir dans sa valise tenait les morts à distance…
Chronique illustrée à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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