De précieux conseils de lecture pour toutes les envies de découverte...
Nous sommes en France, à la fin des années 1990. Dans une ville de banlieue pavillonnaire, une adolescente regarde passer les trains qui filent vers la capitale. Elle a des projets plein la tête : partir, devenir hôtesse de l'air ou avocate et surtout, plus urgent, s'acheter des vêtements de marque. Mais comment faire quand on n'a pas assez d'argent de poche et que la vie dont on rêvait se révèle être un champ de cactus??
Pour le moment, sa famille vacille et ses repères sont chamboulés. En très peu de temps, sans renoncer à ses désirs, elle devra tout apprendre : comment classer ses pensées, tenir tête à ses copines, assumer des responsabilités trop grandes pour elle et vivre ses premières expériences sexuelles.
Si l'adolescence est une ligne de crête menant à l'âge adulte, l'attachante héroïne de Grande Couronne s'y tient en équilibriste, oscillant entre le trivial et le terrible. Mais elle a une arme : une vision au laser grâce à laquelle elle dresse un tableau de son époque et de ses émotions aussi drolatique qu'impitoyable.
De précieux conseils de lecture pour toutes les envies de découverte...
Le premier roman de Salomé Kiner s’ouvre sur un constat, celui de la surprise de la vie. La narratrice, une adolescente, voit comment la vie d’une certaine Amanda a tourné. Là où celle-ci s’expose, la narratrice montre tout de suite qu’elle se cache, qu’elle dissimule ce qui pèse sur son quotidien. Ses parents, leur manque d’argent, le regard féroce des filles de son école… Tout l’encombre et lui pèse. La narratrice manque d’espace dans sa réalité. Alors elle explore toutes les sorties possibles et Salomé Kiner la suit, reste à ses côtés, ne loupant aucun ressenti de son protagoniste. L’adolescente suce des hommes dans leur voiture, sur un parking. Elle fait cela pour l’argent, en a conscience, ce qui n’amoindrit jamais la violence de ces mecs se pensant puissant pendant quelques minutes. Ils la violentent par les gestes, par les mots, là où ses « amies » la méprisent avec les mêmes moyens. L’adolescente n’est pas épargnée, s’accrochant à ses rêves, puis rapidement prisonnière d’une bulle de références médiatiques et commerciales. Face à ses parents qui divorcent et au délitement de la famille, elle se construit un autre monde de repères et de figures, qui progressivement s’impose à elle et devient sa grille de lecture. Elle existe par les marques qu’elle porte, brillant comme un chevalier exhibant ses armoiries. Les noms de marques, de stars du moment et les slogans ponctuent le récit. La narratrice se retrouve dans une autre sphère où l’argent et le sexe deviennent synonymes de liberté. Et ce qui anime la narration c’est le point de vue de cette adolescente. Elle n’est pas écrasée par tout cela. Elle survit par son esprit, un certain humour et cette distance est salvatrice, alimentant l’espoir plus que la tragédie. Au cœur de cette vie de banlieue, grise et soumise au marketing, elle poursuit son chemin et Salomé Kiner, par les nombreux événements de son roman, creuse des thématiques fortes (le rapport au corps, ce recours aux images publiques, l’importance de la justice) sans jamais s’éloigner des préoccupations et de ce que cogite son personnage. Le roman s’installe et se déploie dans l’esprit de cet être en construction sans pour autant user des artifices d’un roman d’apprentissage. C’est plus intime, plus caustique et plus éclairant sur le basculement du regard des êtres sur leur propre société. Au fur et à mesure du roman, c’est tout un monde qui apparaît, de parents qui n’ont plus de liens avec leurs enfants, d’une solidarité familiale affaiblie et de la persistance de l’amour réconfortant et libérateur. Là encore, sous la plume vive de Salomé Kiner, l’amour existe dans toutes ses dimensions : le désir, le fantasme, la force des sentiments et l’importance des codes sociaux pour construire une relation. À partir d’un parcours personnel, l’autrice compose une topographie sensible de la société, rappelant la portée de l’urbanisme sur l’épanouissement des êtres et leur possibilité à se lier au présent et à construire leur futur.
https://animallecteur.wordpress.com/2021/11/24/grande-couronne-salome-kiner/
Grande couronne c’est une éducation sentimentale à la dure tout en étant une critique de la société de consommation. L’héroïne de ce livre rêve plus grand et mieux que ce qu’elle a, mieux qu’une vit en banlieue, elle rêve de vêtements de marques et de la capitale. Pour ça elle est prête à laisser son innocence en intégrant un réseau de prostitution à la fin du collège baptisé « Magritte » dont les clients qu’elle surnomme « zguègues » sont à peine plus âgés qu’elle. Avec eux elle découvre sa sexualité de manière frontale et brutale tandis qu’eux, sont à la recherche de performances. Les détails sont tantôt drôles tantôt sordides, c’est cru, difficile, bouleversant, trash, osé, violent. Cette adolescente est autant agaçante qu’attachante. Elle a grandit dans une fratrie dont la plus âgée est partie à ses 18 ans en Andalousie avec son copain pour travailler dans un Club Med, ainsi que deux petits frères dont un est passionné par l’histoire-géographie et les guerres et l’autre dispose d’un léger retard mental. Ses parents quant à eux se séparent à ce moment charnière du passage de l’enfance et l’âge adulte. Son père quitte la maison pour s’installer dans la capitale alors que ça mère sombre dans la dépression et n’est plus capable de s’occuper de la famille.
Sur fond d’Alliance Ethnik, Ricky Martin, Toy Story, Erin Brockovich ou encore Ophélie Winter, Salomé Kiner nous livre une chronique douce amer et mélancolique sur l’adolescence avec un sens de la formule indéniable en abordant les sujets de la banlieue, la famille, le sexe, l’amitié et l’amour. D’ailleurs ce roman m’a beaucoup fait pensé à Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu en abordant l’adolescence dans les années 90, l’ennui qui les ronge et le désirs de faire parti des « cool kids ».
Bref ce roman est dévergondé et décomplexé, il ne laisse pas indifférent !
Annoncé comme un livre coup de poing, ce roman d’apprentissage à la fin des années 90 m’a laissé une impression très mitigée.
J’ai apprécié le rythme saccadé, assez brut, collant au flux de pensée d’une ado ; l’ambivalence du personnage principal (d’un côté une jeune fille qui se prostitue et de l’autre une enfant qui prend soin de sa mère) ; l’image de l’ado proie de la société de consommation.
Je n’ai en revanche pas trouvé ça particulièrement inventif, ni impertinent et j’ai souvent eu une impression de déjà lu. Ça aurait pu être innovant si Virginie Despentes n’écrivait pas déjà depuis des années.
Je ne suis pas arrivée non plus à retrouver l’ambiance des années 90 malgré l’abus du name dropping et surtout je ne suis jamais entrée en empathie avec l’héroïne.
Une famille ordinaire en banlieue parisienne qui se désagrège par le départ du père et une mère fragile qui a beaucoup de mal à assumer la nouvelle situation, c’est le cadre de vie de la jeune fille de quatorze ans qui constitue la colonne vertébrale de ce roman dur, direct et à fleur de peau. L’aînée Rachel, 18 ans abandonne le foyer, les deux jeunes garçons, dont un handicapé ont besoin qu’on s’occupent d’eux et la jeune fille se sentant responsable du maintien de la cohésion familiale seconde sa mère défaillante tout en essayant de rester une collégienne normale avec ses envies et ses rêves. Tout cela n’est pas facile et elle cède aux sirènes du réseau Magritte qui lui permettent d’accéder à des vêtements de marque et de découvrir de façon frontale et brutale une sexualité plus contrainte que désirée. Les mots crus dévoilent une désinvolture apparente de l’adolescente dans ses relations avec les « zguègues » qui est adoucie par un humour rendant l’atmosphère plus supportable. Un roman abrupt dans les scènes de sexe, qui décrit néanmoins un univers social de façon très réaliste.
J'ai découvert ce livre et cette autrice grâce à l'intime festival de Namur.
C'est un premier livre et l'autrice est une journaliste fort sympathique qui a su défendre son livre.
Il est, ici, question d'une jeune adolescente des années 2000, elle ne vit ni très bien l'adolescence, ni très bien la séparation de ses parents et la "disparition" des parents en qualité de représentation adulte solide.
Rien de de ce qui est décrit n'est impossible, tout est plausible et si j'osais, je dirais "so what ?". Effectivement, on entre dans la prostitution des adolescentes, dans les affres de la drogue, dans la banalisation du consumérisme mais j'ai suivi les personnages un peu "de loin" comme dans un reportage.
Le choix de ne pas livrer le nom de notre "héroïne" a pu jouer dans ce détachement qui m'a dérangé.
Le livre est bien écrit, l'histoire est cohérente et intéressante mais il m'a manqué quelque chose de fondamental pour basculer.
Elle a quatorze ans, une mère dont la dépression ne s’arrange pas lorsque le père les quitte, une soeur rebelle, deux frères, l’un obsédé par la guerre et l’autre handicapé.
Mais ce qui lui pèse le plus, ce sont les habitudes de consommation de la mère, qui refuse de tomber dans les pièges grossiers posés sur sa route dans les rayons des magasins (et en 1990, c’est moins tendance qu’en 2020, et carrément craignos de s’exhiber avec des sous-marques, qu’elles concernent des vêtements ou des compotes).
Comment réaliser ses rêves de Reebock, ou de sac Vialhero ? C’est Nelly, une fille du collège qui lui propose de se faire de l’argent de poche facile : elle intègre le réseau Magritte…
L’histoire met mal à l’aise, les mots sont crus, émis par une gamine de quatorze ans pour décrire ce qu’elle vit au quotidien auprès des « zguègues » qui la reçoivent dans leur voiture le temps d’une gâterie ! Et la désinvolture apparente de l’adolescente est édifiante. Et pourtant il y a derrière le récit explicite, un art de manier l’humour qui détend un peu l’atmosphère glauque du roman.
Cependant, même si elles ont un sens dans l’histoire, les scènes de sexe sont un peu trop insistantes, et il existe une certaine complaisance à en rajouter.
Avis mitigé donc pour ce roman qui a malgré tout de dénoncer la prostitution adolescente.
Explorateurs de la rentrée littéraire 2021
Comment parler d’un sujet grave en nous laissant le sourire aux lèvres? C’est l’exploit qu’a réussit Salomé Kiner. Son premier roman, « Grande couronne », malgré le ton très noir, nous séduit par sa fraîcheur et son humour.
Dans la grande couronne de Paris, dans les années 1990, on rencontre une adolescente qui est en proie aux malheurs de son âge, petits et plus grands. Par sa plume acérée, Salomé Kiner parvient à nous immerger totalement dans la vie de cette héroïne. Pour son plus grand malheur, ses parents refusent de lui acheter des marques. Se sentant mise à l’écart, elle décide d’agir pour trouver un moyen de gagner de l’argent de poche et entre dans un réseau qui propose aux adolescentes d’être rémunérées en échange de faveurs sexuelles. Sujet glacial, abordé par le point de vue de cette adolescente un peu perdue, qui va faire ses premières découvertes sexuelles dans ce contexte.
Le ton choisi est absolument génial. Cette héroïne est pleine de vie et fait face courageusement aux problèmes qu’elle rencontre avec les moyens qu’elle possède.
Non seulement elle doit gérer sa participation dans ce réseau, les mésaventures qui en découlent et les pensées qui surgissent après les rencontres qu’elle fait dans ce cadre, mais elle fait face en plus à une situation familiale compliquée: elle fait partie d’une famille nombreuse de quatre enfants. Le père, ayant fait une nouvelle rencontre, part de la maison familiale. La mère se retrouve en dépression totale et notre héroïne doit gérer le quotidien, entre sa soeur aînée en pleine crise de rébellion et ses deux petits frères, dont l’un est handicapé mental.
L’héroïne doit ainsi jouer le rôle de mère de famille alors qu’elle n’est elle-même qu’une enfant et que ce qui lui importe le plus est d’acheter ces produits de marque qui la rendront désirée, acceptée, intégrée, ce qu’on désire tous à l’âge adolescent.
Le ton est cru, le vocabulaire également. On peut passer du rire aux larmes, d’une scène d’une brutalité inouïe - racontée de ce ton d’adolescente qui n’a pas conscience de la gravité de la situation et qui arrive à ajouter sa touche d’humour et son regard original sur le monde - à un quotidien banal, aux petites aventures de la vie de tous les jours. Par exemple, sa première mésaventure dans ce réseau va s’avérer être une tentative de viol: et malgré le fait que l’héroïne sait que ce ce qui s’est passé est grave, elle poursuit son chemin et relativise, sans oublier, tout ce qui se passe. En comptant le nombre de services sexuels qui lui permettront de s’acheter tel ou tel objet ou vêtement de marque.
L’adolescente va vite se rapprocher d’une comparse du réseau, Chanelle. Une référence à la marque, probablement: Chanelle est un personnage également haut en couleur.
Salomé Kiner réussit à introduire de la beauté au milieu d’actes absolument gravissimes et innommables. Ainsi, à la fin du roman, on peut assister à une conversion entre les deux jeunes filles, où Chanelle parle de sa vie quotidienne d’un ton tout à fait normal, de sa vie amoureuse, de ses envies de futur alors que son copain l’utilise pour faire des vidéos pornographiques.
Ceci est également un élément central du roman, les envies de futur de l’héroïne. L’envie de partir, l’envie d’un avenir meilleur. Pourtant, sa vie n’est pas désastreuse. Mais elle possède une envie profonde, une grande sensibilité, et un regard absolument unique sur le monde qui l’entoure. Son cynisme et son sarcasme nous désarçonnent, nous touchent, nous font frémir et sourire.
En bref, un roman que j’ai adoré découvrir, extrêmement original, mêlant horreur et beauté, sensibilité, humour et vie quotidienne déprimante. Le livre se dévore et nous replonge dans ces années 1990, passé pas si lointain mais qui nous paraît presque un autre monde quand nous nous remémorons ce temps-là, avec cette technologie moindre, cette atmosphère différente. Salomé Kiner parvient de manière remarquable à nous immerger dans cette histoire et dans ses couleurs spécifiques. Ses textes sont très forts et extrêmement imagés, profonds sous le ton narratif parfois naïf, parfois désabusé et triste, parfois heureux ou amoureux. On en voit de toutes les couleurs et on suit les péripéties de cette héroïne, cette quête de soi, ces expérimentations qui vont chercher les limites qui nous caractérisent tous à cette période de la vie. Avis de la page 100, Explorateurs de la rentrée littéraire 2021
J’ai été tout de suite entraînée par le ton de ce livre. Le style d’écriture, rythmé et plein de fraîcheur, sans être caricatural, nous replonge dans notre adolescence et dans les années 90.
L’héroïne nous emmène avec elle entre les problèmes légers de cette période de vie, où le plus important est de paraître et de s’intégrer, et les drames de son quotidien, la vie de sa mère, femme au foyer qui élève ses quatre enfants tandis que le père décide de s’en aller. Le livre bascule dans la brutalité assez rapidement, quand l’héroïne décide de vivre ses premières expériences sexuelles pour avoir de l’argent de poche. Malgré la noirceur, la
violence et la gravité de la situation, l’auteure parvient à garder ce style qui raconte cette histoire avec humour et légèreté.
La narratrice est une adolescente vivant dans la banlieue parisienne à la fin des années 90. A cet âge, en pleine construction identitaire, elle cherche à ressembler aux autres et voudrait posséder des vêtements et objets de marque, que ses parents ne lui offrent pas. Prête à tout pour se faire un peu d'argent, une amie lui conseille d'aller voir Nelly qui peut lui proposer un petit travail.
La jeune fille a une telle envie de s'offrir ce qu'elle souhaite, qu'elle va, sans s'en rendre compte, être enrôlée dans un réseau de prostitution nommé « Magritte ».
En parallèle, elle doit affronter une situation familiale compliquée qui se dégrade. Ses parents décident de se séparer. Son père part vivre avec une nouvelle compagne à Paris et délaisse peu à peu sa progéniture. Sa mère sombre dans la dépression et passe ses journées prostrée dans le canapé à ingurgiter des médicaments. Elle ne sort plus et ne s'occupe plus de ses enfants. Pour se soustraire à ce climat délétère, la sœur aînée décide de partir en Espagne. La narratrice se sent abandonnée par son entourage et se voit obligée de s'occuper et de prendre en charge ses deux petits frères dont le plus jeune a un retard de développement important.
A travers « Grande Couronne » Salomé Kiner dresse le portrait d'une époque. J'ai aimé retrouver la fin des années 90. Certaines descriptions m'ont rappelé des souvenirs de cette époque. La plume est directe et brute et m'a conquise dès les premières lignes. Impossible de lâcher ce roman percutant qui aborde la période complexe et difficile de l'adolescence et la construction identitaire qui la caractérise, avec beaucoup de finesse et de justesse. Cette jeune narratrice, dont les parents sont défaillants, souhaite se conformer aux autres pour être reconnue, acceptée et appartenir à un groupe. Elle va devenir la victime d'un réseau très bien organisé qui profite de sa vulnérabilité et de sa fragilité.
C'est un livre qui aborde la désillusion et la colère d'une ado confrontée à la vie adulte et sa dure réalité. Le contraste entre son quotidien très glauque (la prostitution, la prise en charge de sa famille qui est clairement dysfonctionnelle) et ses rêves d'adolescente (devenir hôtesse de l'air, quitter la banlieue pour Paris, trouver l'amour) est saisissant.
J'ai eu beaucoup de mal à refermer ce roman d'apprentissage très intense car je me suis attachée au personnage de cette jeune fille à l'humour et à la force de caractère impressionnants.
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