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Le premier roman de Salomé Kiner s’ouvre sur un constat, celui de la surprise de la vie. La narratrice, une adolescente, voit comment la vie d’une certaine Amanda a tourné. Là où celle-ci s’expose, la narratrice montre tout de suite qu’elle se cache, qu’elle dissimule ce qui pèse sur son quotidien. Ses parents, leur manque d’argent, le regard féroce des filles de son école… Tout l’encombre et lui pèse. La narratrice manque d’espace dans sa réalité. Alors elle explore toutes les sorties possibles et Salomé Kiner la suit, reste à ses côtés, ne loupant aucun ressenti de son protagoniste. L’adolescente suce des hommes dans leur voiture, sur un parking. Elle fait cela pour l’argent, en a conscience, ce qui n’amoindrit jamais la violence de ces mecs se pensant puissant pendant quelques minutes. Ils la violentent par les gestes, par les mots, là où ses « amies » la méprisent avec les mêmes moyens. L’adolescente n’est pas épargnée, s’accrochant à ses rêves, puis rapidement prisonnière d’une bulle de références médiatiques et commerciales. Face à ses parents qui divorcent et au délitement de la famille, elle se construit un autre monde de repères et de figures, qui progressivement s’impose à elle et devient sa grille de lecture. Elle existe par les marques qu’elle porte, brillant comme un chevalier exhibant ses armoiries. Les noms de marques, de stars du moment et les slogans ponctuent le récit. La narratrice se retrouve dans une autre sphère où l’argent et le sexe deviennent synonymes de liberté. Et ce qui anime la narration c’est le point de vue de cette adolescente. Elle n’est pas écrasée par tout cela. Elle survit par son esprit, un certain humour et cette distance est salvatrice, alimentant l’espoir plus que la tragédie. Au cœur de cette vie de banlieue, grise et soumise au marketing, elle poursuit son chemin et Salomé Kiner, par les nombreux événements de son roman, creuse des thématiques fortes (le rapport au corps, ce recours aux images publiques, l’importance de la justice) sans jamais s’éloigner des préoccupations et de ce que cogite son personnage. Le roman s’installe et se déploie dans l’esprit de cet être en construction sans pour autant user des artifices d’un roman d’apprentissage. C’est plus intime, plus caustique et plus éclairant sur le basculement du regard des êtres sur leur propre société. Au fur et à mesure du roman, c’est tout un monde qui apparaît, de parents qui n’ont plus de liens avec leurs enfants, d’une solidarité familiale affaiblie et de la persistance de l’amour réconfortant et libérateur. Là encore, sous la plume vive de Salomé Kiner, l’amour existe dans toutes ses dimensions : le désir, le fantasme, la force des sentiments et l’importance des codes sociaux pour construire une relation. À partir d’un parcours personnel, l’autrice compose une topographie sensible de la société, rappelant la portée de l’urbanisme sur l’épanouissement des êtres et leur possibilité à se lier au présent et à construire leur futur.
https://animallecteur.wordpress.com/2021/11/24/grande-couronne-salome-kiner/
Grande couronne c’est une éducation sentimentale à la dure tout en étant une critique de la société de consommation. L’héroïne de ce livre rêve plus grand et mieux que ce qu’elle a, mieux qu’une vit en banlieue, elle rêve de vêtements de marques et de la capitale. Pour ça elle est prête à laisser son innocence en intégrant un réseau de prostitution à la fin du collège baptisé « Magritte » dont les clients qu’elle surnomme « zguègues » sont à peine plus âgés qu’elle. Avec eux elle découvre sa sexualité de manière frontale et brutale tandis qu’eux, sont à la recherche de performances. Les détails sont tantôt drôles tantôt sordides, c’est cru, difficile, bouleversant, trash, osé, violent. Cette adolescente est autant agaçante qu’attachante. Elle a grandit dans une fratrie dont la plus âgée est partie à ses 18 ans en Andalousie avec son copain pour travailler dans un Club Med, ainsi que deux petits frères dont un est passionné par l’histoire-géographie et les guerres et l’autre dispose d’un léger retard mental. Ses parents quant à eux se séparent à ce moment charnière du passage de l’enfance et l’âge adulte. Son père quitte la maison pour s’installer dans la capitale alors que ça mère sombre dans la dépression et n’est plus capable de s’occuper de la famille.
Sur fond d’Alliance Ethnik, Ricky Martin, Toy Story, Erin Brockovich ou encore Ophélie Winter, Salomé Kiner nous livre une chronique douce amer et mélancolique sur l’adolescence avec un sens de la formule indéniable en abordant les sujets de la banlieue, la famille, le sexe, l’amitié et l’amour. D’ailleurs ce roman m’a beaucoup fait pensé à Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu en abordant l’adolescence dans les années 90, l’ennui qui les ronge et le désirs de faire parti des « cool kids ».
Bref ce roman est dévergondé et décomplexé, il ne laisse pas indifférent !
Annoncé comme un livre coup de poing, ce roman d’apprentissage à la fin des années 90 m’a laissé une impression très mitigée.
J’ai apprécié le rythme saccadé, assez brut, collant au flux de pensée d’une ado ; l’ambivalence du personnage principal (d’un côté une jeune fille qui se prostitue et de l’autre une enfant qui prend soin de sa mère) ; l’image de l’ado proie de la société de consommation.
Je n’ai en revanche pas trouvé ça particulièrement inventif, ni impertinent et j’ai souvent eu une impression de déjà lu. Ça aurait pu être innovant si Virginie Despentes n’écrivait pas déjà depuis des années.
Je ne suis pas arrivée non plus à retrouver l’ambiance des années 90 malgré l’abus du name dropping et surtout je ne suis jamais entrée en empathie avec l’héroïne.
Une famille ordinaire en banlieue parisienne qui se désagrège par le départ du père et une mère fragile qui a beaucoup de mal à assumer la nouvelle situation, c’est le cadre de vie de la jeune fille de quatorze ans qui constitue la colonne vertébrale de ce roman dur, direct et à fleur de peau. L’aînée Rachel, 18 ans abandonne le foyer, les deux jeunes garçons, dont un handicapé ont besoin qu’on s’occupent d’eux et la jeune fille se sentant responsable du maintien de la cohésion familiale seconde sa mère défaillante tout en essayant de rester une collégienne normale avec ses envies et ses rêves. Tout cela n’est pas facile et elle cède aux sirènes du réseau Magritte qui lui permettent d’accéder à des vêtements de marque et de découvrir de façon frontale et brutale une sexualité plus contrainte que désirée. Les mots crus dévoilent une désinvolture apparente de l’adolescente dans ses relations avec les « zguègues » qui est adoucie par un humour rendant l’atmosphère plus supportable. Un roman abrupt dans les scènes de sexe, qui décrit néanmoins un univers social de façon très réaliste.
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