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Dans les rues du Caire, Gohar, ex-philosophe devenu mendiant, sillonne avec nonchalance les ruelles de la ville et croise des figures pittoresques et exemplaires. Dans ce petit peuple où un manchot, cul-de-jatte, subit les crises de jalousie de sa compagne, on rencontre aussi Yéghen, vendeur de hachisch, laid et heureux, et Set Amina, la mère maquerelle. Il y a aussi Nour El Dine, un policier homosexuel, autoritaire mais très vite saisi par le doute à mesure que progresse son enquête. Un meurtre a eu lieu, celui d'une jeune prostituée...
Dans les rue du Caire, Gohan, ancien professeur de philosophie a choisi de vivre en mendiant, sa seule préoccupation étant de satisfaire son besoin quotidien de drogue que ne manque pas de lui fournir son ami Yeghen, lui-même quelque peu désoeuvré. El Kordi quant à lui, vivote de son poste au Ministère mais rêve d'un soulèvement du peuple égyptien et est amoureux d'une prostituée. La vie suit ainsi son cours jusqu'à ce qu'Arnaba, prostituée exerçant dans la maison close que ces trois hommes fréquentent se fasse assassiner. Le commissaire Nour el Dine va entrer en scène, et l'enquête va un peu chambouler tout ce petit monde, mais la chute est loin d'être celle à laquelle on s'attend !
Ce très beau roman d'Albert Cossery nous plonge dans la vie de personnages hauts en couleur, une sorte de cour des miracles aux personnalités étonnantes et attachantes, mais sous le vernis d'une histoire somme toute assez simple, se cache une véritable question philosophique, celle de l'importance de la possession . Est-on plus heureux avec des biens ? Sous couvert de cette histoire, Albert Cossery nous livre cette conclusion : ne rien posséder ouvre les portes de la liberté, le dénuement offre la sagesse et vivre dans le dénuement n'entache en rien la dignité... Au point de devenir mendiant, par choix !
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Albert Cossery aime ses personnages, et ça se ressent. Ce n’est pas l’intrigue qui alimente le plaisir de lire, mais l’intensité, le naturel et la simplicité de chaque personnage. Cette œuvre est remarquablement transparente : tout comme chez Jean Meckert (publié dans la même collection), les idées sont revêtues de personnages, et non l’inverse. Chacun porte en soi des valeurs, des idées, et s’entrechoque aux autres ; ils sont hauts en couleur, improbables mais espérés, et forgés par tant d’idéalisme qu’on les fait siens dès les premières pages.
Mendiants et orgueilleux, tout à la fois, est un texte riche de significations, qui résonne, qui ébranle par la manière dont Albert Cossery décrit ses personnages. L’écriture est mystérieuse tant elle est à la fois douce, mouvante, harmonieuse dans ses formes, et sincère, dure, réaliste, dans son fond. On entre dans la pensée d’un homme engagé pour lequel la paix ne passe pas par le progrès et l’accumulation de richesses. En constant recul sur la société et son fonctionnement, il offre une lecture captivante, et pourtant relativement peu connue.
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