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Dans un film documentaire achevé en 2013 puis diffusé sur France 3, Annie Ernaux parlait de son métier d’écrivain au cours d’un entretien avec Michelle Porte. Dans de longues réponses très détaillées et très intéressantes, l’auteure révélait quantité d’informations permettant de connaître au plus près le travail d’écriture qu’elle mène avec beaucoup de talent.
Il était absolument indispensable de fixer tout cela par écrit, ce que "Le vrai lieu" réalise avec un intérêt supplémentaire puisque l’intégralité de ces entretiens filmés est retranscrite. Elle qui avait beaucoup de peine à parler de ses livres reconnaît finalement : « Dire ce qu’est pour moi l’écriture, j’y arrive un peu plus. Parce que, si on me pousse dans mes derniers retranchements, c’est tout de même là où j’ai l’impression d’être le plus. Mon vrai lieu. »
C’est à Cergy, près de Paris, qu’elle a écrit tous ses livres, sauf les deux premiers rédigés en Haute-Savoie. Bien qu’elle vive aux portes de la capitale, elle assure : « Je suis restée une fille de la terre par mes parents, une fille de la province aussi avec les jardinets autour des maisons. »
Son enfance et sa jeunesse, elle les a passées dans le café-épicerie de ses parents, à Yvetot mais ses études et la voie qu’elle a choisie lui font penser sans arrêt qu’elle est, en fait, un transfuge de classe. Elle qui a appris le beau langage à l’école, ne renie pas le patois du Pays de Caux car « Le langage d’origine fait corps avec nous, vraiment. »
Elle parle beaucoup de ses parents : « Ma mère était une femme violente, très autoritaire… Les lois religieuses gouvernaient sa vie… C’était une femme flamboyante… qui portait haut le savoir. Mon père était doux. » Adolescente, elle était en lutte avec elle dans le domaine sexuel et avoue : « elle se comportait en gardienne, gardienne de mon corps. »
Au fil des confidences, elle cite ses principaux livres et explique les changements de style, de ton. "Les armoires vides" parle de son avortement et son écriture est violente. "La place" est plein d’une violence rentrée. "Une femme" est consacré à sa mère. "Les années" traite du temps qui passe, de cette évolution incroyable de 1950 aux années 2000.
Annie Ernaux affirme enfin haut et fort : « Je ne suis pas une femme qui écrit, je suis quelqu’un qui écrit. » et précise plus loin : « Qu’on soit homme ou femme, c’est l’origine sociale qui détermine. » Dans ce lieu immatériel qu’est l’écriture, elle excelle et "Le vrai lieu" est une belle occasion de faire connaissance avec cet écrivain et donne encore plus envie de lire ses livres.
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