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Rome donna un nom au dieu des portes - à ce Janus dont le double visage, selon Macrobe (Saturnales, I, 9), s'imprimait aux deux portes célestes, inaugurant le jour en se levant, le fermant à l'heure de son coucher. Toujours selon le philologue, les portes de son temple, depuis le conflit qui opposa Romains et Sabins, étaient ouvertes durant les temps des guerres et fermées durant les temps de paix.
De Janus à proprement parler il ne sera pas question dans ces pages : en effet, comment le nommerait- on, de nos jours ? L'oeuvre de ce dieu très ancien et très nouveau, ce dieu de jamais et de toujours, est de passer - d'aller enfin. Il ne peut qu'avoir perdu son nom sur les chemins, dans les rues de nos villes devenues plus labyrinthiques que l'ouvrage de Dédale.
Le dieu des portes est de tous les passages, de tous les mondes. Toujours il paraît au seuil des demeures, qu'il franchit en un instant ; il passe par les fenêtres, et qui sait ? traverse même les murs. L'apercevrions-nous que nous verrions dans ses mains la clef du découvreur et le bâton du voyageur.
Ce dieu connaît le temps ; il le contemple ; il y passe, lui aussi - à nous de traquer à chaque instant sa présence, ses empreintes, sa voix, quels que soient ses éphémères visages - ses possibles visages.
La devise de Jean-Antoine Roucher était « Se regarder passer » ; nul doute qu'un dieu la lui chuchota entre deux portes.
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