Deux romans en lice pour le Prix des lecteurs du Livre de Poche
Tonitruant, comme un sol de terre sèche foulé par les sabots d'un criollo. Il reste la poussière est de ces livres qui ne vous promettent rien, et qui vous donnent beaucoup. D'une mine presque douce, mais néanmoins affutée, Sandrine Collette raconte la...
Deux romans en lice pour le Prix des lecteurs du Livre de Poche
Sous la poussière, la plume
Encore une fois, la plume de l’auteure, à la fois violente et pleine d’humanité m’a subjuguée.
Je me suis retrouvée dans un passé indéfini ou régnait le servage et la misère. Une époque ou le choix n’était que de travailler encore et encore, toujours plus, simplement pour survivre.
Dans un petit hameau entre campagne et forêt, 3 maisons pour 3 familles.
Il y a Aelis, son mari et leurs garçons.
Il y a Ambre (la sœur jumelle d’Aelis) et son mari
Et puis il y a la vieille Rose.
3 femmes qui se soutiennent, s’épaulent.
Et puis un jour, une fillette affamée sort de la forêt, et vient « illuminer » leur quotidien.
Comme un baume sur leur vie si difficile.
Je ne vous en dirai pas plus, la 4ème de couverture en dit déjà tellement.
Mais ce qu’elle ne dit pas ce sont :
✨ les mots toujours justes de Sandrine Collette et les émotions fortes qui transpercent tout au long de la lecture ;
✨ c’est la nature qui peut tant donner mais aussi tant reprendre ;
✨ c’est la force de la solidarité, la puissance des liens familiaux, la beauté des sentiments simples, l’émotion des non-dits ;
✨c’est la violence (humaine ou terrestre) qui surgit parfois, comme un tsunami et qui vient balayer le peu de bonheur qui a été construit ;
✨C’est la beauté et la poésie des mots pour évoquer la nature, la misère, la brutalité, la famine, le froid, l’amour, la fraternité …
Bref, cette 4ème de couverture ne dit pas toute la richesse de ce roman, toute la beauté sauvage de cette plume, toutes les émotions ressenties.
Un roman tragique magnifiquement captivant et émouvant.
Bon, vous vous en doutez, c’est un coup de ♥️
Genre : Littérature générale
Avis : GLACIAL
Livre audio
Quand un roman vous entraîne dans l’absolu…
Sandrine Collette qui m’avait bluffée avec « On était des loups » récidive aujourd’hui avec un roman que la lecture intelligente de Clément Bresson met parfaitement en valeur. Sa voix sourde, oppressée, presque caverneuse donne aux lignes la force obscure que les mots exhalent.
Madelaine, une fillette affamée et sauvage sort de la forêt et rejoint Les Montées, un hameau que l’on ne peut situer ni dans le temps, ni dans l’espace. Elle est accueillie par Rose, puis par Ambre qui va la considérer comme la fille qu’elle ne peut pas avoir alors que sa sœur Aelis, elle, a trois garçons et un mari bien plus aimable que le sien. Madelaine va révolutionner leur vie et tout brûler sur son passage mais cela, Eugène l’avait bien perçu à son arrivée !
J’ai à nouveau écouté quasiment en apnée cette histoire d’avant, ce conte intemporel et cruel des pauvres contre les puissants. Car avec cette romancière, point de légèreté, les sentiments sont lourds même quand ils sont bons. Et que dire des mauvais ? Ils génèrent des actions de saccages, de massacres et d’injustices que les paysans doivent accepter en plus des ravages que la nature leur inflige sans discontinuer.
Mais il y a Madelaine et cette gamine qui grandit auprès d’eux porte en elle tous les espoirs du monde, toutes les beautés que le courage, l’intelligence, l’empathie peuvent donner aux êtres qui connaissent trop tôt la vie et qui en tirent résilience et force face à l’adversité. Et Sandrine Collette excelle dans l’écriture pour nous le faire vivre, dans des huis-clos de pleine nature qu’elle construit à merveille.
Qui à part elle peut nous décrire les différences dans les aboiements des chiens avec une telle justesse, qui peut donner autant de sens à l’intensité de certains regards, qui peut faire naître des personnages si près de ceux que nous connaissons par delà les siècles ?
Pourrions-nous trouver quelques invraisemblances, elles seraient gommées par la forêt, la nature, la fureur et l’amplitude des tâches à accomplir pour rester vivant. Car la romancière frappe fort mais réussit à faire monter tout au long du roman une dramaturgie que rien ne semble pouvoir arrêter. C’est compact, touffu, entremêlé, éclairé juste par Madelaine et les liens familiaux qui tissent la trame d’une lecture habitée.
Ne ratez pas ce roman de la rentrée, il a déjà été repéré pour plusieurs prix, moi, d’ores et déjà, je lui donne celui de la différence.
Je remercie très sincèrement #NetGalleyFrance et Audiolib pour #Madelaineavantlaube
VERSION AUDIO
Le nouveau roman de Sandrine Collette, Madelaine avant l’aube, nous plonge dans le hameau isolé des Montées, où la vie est marquée par la pauvreté, l’oppression, et une nature impitoyable.
Dans ce petit village, les habitants doivent affronter non seulement des conditions de vie difficiles, mais aussi le tyrannique fils du maître Ambroisie, qui impose sa loi avec violence.
L’arrivée de Madelaine, une fille sauvage recueillie par Rose, bouleverse cet univers rigide. Sa rébellion et son courage apportent un souffle de vie dans ce monde étouffant.
Elle devient la fille adoptive d’Ambre et se dresse contre l’injustice et la soumission qui règnent dans le hameau.
En version livre audio, Madelaine avant l’aube prend une dimension passionnante grâce à la voix de Clément Bresson et à l’intensité de l’histoire qu’il nous narre.
C’est un roman puissant et parfois bouleversant qui met en lumière des thèmes comme la rébellion, l’amour familial, la nature et la lutte contre l’injustice.
J’attends toujours avec impatience le nouveau roman de l’autrice, qui ne manquent jamais de me remplir de joie et d’émotions.
Dans cette campagne française d’autrefois ravagée par les pluies et les hivers glaciaux, la famine et les épidémies, le tout sous le joug impitoyable et brutal du servage – pourquoi pas durant le Grand Hiver 1709 dans le Morvan cher à l’auteur ? –, l’ordre pyramidal du monde féodal semble immuable, les gueux écrasés par l’impôt et l’arbitraire d’un pouvoir sans limite si tant est qu’il leur arrive de survivre aux conditions extrêmes qui les réduisent à l’état d’êtres « rachitiques, minuscules et fripés », usés et sans espoir. Pourtant, si les hommes « se plient [et] s’habituent à tout [parce qu’]ils ne veulent pas mourir », la révolte finit souvent par venir des femmes, « prêtes à donner leur sang pour leurs enfants ». Ainsi adviendra-t-il dans cette histoire que son imprécision de lieu et d’époque, comme ces contes commençant par « il était une fois », pare d’une tonalité universelle et atemporelle.
Isolé sur un pan de terre ingrate par le Basilic, un fleuve au nom de reptile légendaire, démoniaque et mortel, le hameau des Montées ne compte que trois minuscules et misérables fermes, comme toutes celles de la région la propriété du seigneur d’Ambroisie, nom encore une fois mythologique évocateur d’onction divine. Menés par le goût du sang, les hommes du château, qui, lorsqu’ils ne guerroient pas, aiment à chasser aussi bien serfs que cerfs aventurés hors de leurs tanières, saignent si bien leurs paysans dans tous les sens du terme que, sur leurs terres exsangues, l’on meurt aussi bien de faim, de froid et de maladie, que de la terreur meurtrière qu’ils y font régner. Adultes et enfants y triment du lever au coucher, avec pour seul prix de leurs efforts l’épuisement qui leur permettra peut-être d’échapper encore un peu à la mort qui décime silencieusement leurs rangs. Pas « le droit d’être chagrin », juste « les coups et l’entêtement à [se] redresser pour [se] rendre forts ». « Obligés d’être invulnérables, de refouler peurs et désespoirs au fond des ventres, [ils] crèv[ent] du manque d’amour ».
C’est alors que, « fille de faim » condamnée à l’errance sauvage par les siens « crevés des famines », une enfant se laisse attraper aux Montées alors qu’elle venait y voler quelque rognure perdue. Prise sous l’aile des femmes promptes à défendre et aimer une de leurs semblables dans le monde sec et sans âme de leurs hommes et fils endurcis, la fillette grandira, pleine de courage mais aussi la rage au coeur, menant irrémédiablement les habitants des Montées au drame qui fera exploser leur vie en même temps que leur soumission ancestrale. La bascule du récit interviendra en son milieu, en une surprise narrative des plus réussies et originales.
Une fois de plus, Sandrine Collette réussit à nous tenir dans le poing d’une narration tout en force et en intensité, tendue et rythmée par l’affrontement entre humanité et sauvagerie, que ce soit celle des hommes entre eux ou des hommes face à une nature puissamment âpre et impérieuse, aux débordements dévastateurs. Ce sont encore les liens familiaux qui sous-tendent la lutte pour la survie dans l’ébranlement d’un monde condamné à terme à l’écroulement. Terriblement noir et pourtant lumineux dans son combat entre tendresse et cruauté, injustice et liberté, c’est aussi un livre poétique d’une grande beauté, sur la survenance, à force de douleur et de rage, de l’étincelle qui finira par mettre le feu aux ténèbres, annonçant l’aube d’un monde nouveau et plein d’espoir. Coup de coeur. (5/5)
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