"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une femme et un homme, un soir, au Café Beaubourg. À les observer, on pourrait hâtivement conclure à une rupture amoureuse. Comme des amants, Vesper et Victor se fréquentent clandestinement depuis vingt-cinq ans. Elle dirigera dans quelques heures le service secret extérieur de la France, la DGSE. Il a longtemps été son meilleur agent sur les théâtres d'opérations en Afrique. Ce n'est plus le cas.
Ce soir d'automne, c'est leur dernière rencontre, le moment des adieux. Vesper doit annoncer à Victor qu'elle l'abandonne. Comment se séparer ainsi, quand on a parfois, ensemble, modifié le cours de l'histoire ? La passion d'un homme pour celle qui le manipule depuis toujours peut-elle être supérieure à la raison d'État ? Et si, entre eux, pesait un tout autre secret ?
Des rivages trompeurs du Mozambique à Berlin réunifié, un grand roman d'amour et d'aventures sur fond d'espionnage.
« Le facteur humain », c’est un peu le problème lorsqu’on écrit un roman : on ne sait jamais à qui l’on s’adresse. Par la voix de Victor, agent de la DGSE en fin course répondant à l’ultime convocation d’une supérieure adulée, Vesper, Vincent Crouzet convoque les amateurs du genre, dans une ambiance aussi codifiée que les messages de ses héros. Ici, les hommes passent du treillis au costume trois pièce avec la même aisance qu’ils bondissent de la brousse africaine aux rouges fauteuils d’une salle de concert, pillant sans vergogne les objets rituels africains mais pleurant sans retenue sur Wagner ou Brahms dirigé par les plus grands maestros d’Europe, se saoulant fraternellement sous les étoiles des sublimes ciels d’Afrique ou d’ailleurs mais encodant ses messages de Graham Greene . Ici les femmes sont rousses, sublimes, exotiques dominatrices ou soumises, volontiers qualifiées de « garce », « chienne » ou « splendeur », tacticiennes rouées mais dénuées de culture générale, objets de désir, de plaisir, de fantasmes mais incapables de sentiments. Peu portée sur les détails des relations politiques entre états africains, la fibre féministe frémissante à chaque nouvelle considération aux connotations ouvertement misogynes, il m’est apparu assez rapidement que je n’étais pas la lectrice idéale. N’aurait été la mission qui était la mienne et que j’avais acceptée de bon cœur (rédiger une chronique en échange d’un exemplaire du roman offert par Babelio), j’aurais pu renoncer vingt fois à poursuivre ma lecture, égarée que j’ai été entre les phrases touffues de l’auteur, les nombreux allers-retours du récit comme du héros et la géopolitique foisonnante et confuse du vaste continent dont je ne maîtrise ni les contours ni l’histoire. J’aurais sans doute eu tort. Car j’aurais raté un final en apothéose sur fond de Mahler et d’accent suédois et, surtout, j’aurais manqué ces lumineux passages jalonnant le roman, où Vincent Crouzet, en amoureux de l’Afrique, semble soudain se dépouiller des artifices de l’auteur-espion-bourlingueur pour s’effacer derrière la beauté à couper le souffle de cette terre douloureuse et sublime dont il a partagé la troublante intimité durant de longues années.
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