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La prose de Dominique Fabre se fait vers libres pour nous parler de cette enfance brinquebalée, solitaire et rêveuse, celle d’un enfant placé.
L’auteur nous livre des petits bouts de vie, son trait se fait léger pour raconter la dureté de l’abandon, l’incompréhension des adultes et la banlieue désabusée. Ce pourrait être profondément triste, c’est juste mélancolique avec un humour doux-amer.
« Parfois on voudrait bien disparaitre/ il suffirait de faire un vœu/ on ne serait plus là »
A l’âge adulte, Dominique Fabre a gardé cette faculté de raconter son enfance comme s’il était toujours ce » gosse aux pieds trop nus. » Souvent il s’émerveille, avec cette candeur qui peut parfois faire mal dans sa précision de la souffrance subie.
« Parfois il manque/ un petit quelque chose à ce rien/ dont on s’évade à peine. »
L’auteur possède pourtant ce don d’évasion. Il nous livre de petits fragments de son enfance, de sa vie d’adulte, qu’il enveloppe avec pudeur dans l’imaginaire, comme des rêves racontés, du merveilleux fabriqué avec trois bouts de ficelle pour s’évader de la banlieue triste.
« On ne peut plus vraiment dormir/ quand on a déchiré le tissu des rêves. »
Avec l’évocation lapidaire du père, de la mère absents « de père n’aurai pas eu/ n’en aurai aucun besoin/ de mère à peine /non plus. » il convoque les personnes qui ont compté dans sa vie d’enfant placé : sa nourrice de Haute-Savoie et son mari, et puis « les vieux caramels de la mémé Sonza. »
Et toujours cette enfance, difficile, mais ô combien consolante lorsque viennent les chagrins d’adulte.
« Mon enfance me rassure/ Ses chagrins sont passés. »
Les dernières pages évoquent une ville dans la ouate, suspendue, où tout est chamboulé. Au détour de situations cocasses ou de scènes de cauchemars, dans cette neige qui paralyse tout, on tombe sur une évocation discrète du corona qui a transformé nos vies, provoqué des comportements insolites.
« …et la neige tombe encore / la nuit s’approfondit/ tout ceci merveilleux/ il ne fait ni chaud ni froid. »
Tous ces petits riens, ces choses intimes, représentent le « je » profond de Dominique Fabre
On se laisse prendre à ces instants vécus, parfois anecdotiques, où la mémoire faite remonter ici et là des souvenirs sensibles où l’espoir s’inscrit en filigrane dans le malheur.
Lecture que j’ai beaucoup appréciée, même si le texte garde parfois sa part d’énigme.
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