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Face caméra, une femme adresse un témoignage à tous ceux qu'elle a aimés (au seul qu'elle ait jamais aimé). Elle se livre sans limites, laissant cette confession, intense, brutale et bouleversante, comme ultime trace de son passage dans la vie.
Dans ce texte, intense et intimiste, Éric Pessan tisse les fils d'une vie brulée à la poursuite d'un amour idéal, usée à courser un bonheur qui s'échappe à mesure qu'on croit le tenir.
Sylvie Sauvageon scrute inlassablement les temps multiples d'un même visage. À force d'ajouts, d'effacement, de repentirs, jouant des blancs comme d'une lumière trop forte , elle poursuit la quête d'une simple présence.
Une enveloppe reçue au courrier. Aucune mention de l'expéditeur ni à l'extérieur ni à l'intérieur. Seul un DVD la remplit. L'homme qui la reçoit attend avant de le visionner craignant quelque arnaque ou mauvaise surprise. Le lendemain seulement, il l'insère dans le lecteur de son ordinateur. C'est Elle. La femme avec laquelle il a vécu une histoire quelques années auparavant. Elle se raconte en diverses séquences. Le DVD débute par une phrase inscrite, un titre : "J'ai un chagrin d'amour avec le monde entier."
Eric Pessan écrit et Sylvie Sauvageon dessine des portraits d'une même femme avec différentes expressions, parfois un côté masqué par la fumée de cigarette, parfois sourainte, parfois plus grave. C'est elle que l'on imagine sur la vidéo racontant ses histoires. Ses histoires d'amour avec des hommes qu'elle a aimés et qui l'ont peut-être aimée en retour. Pas toujours. Et toujours elle revient à lui, au destinataire du courrier. Son rapprochement timide. Leurs échanges, leurs rendez-vous.
C'est très beau, intime, très profond. Cette femme se livre comme elle ne l'a jamais fait. En vidéo, sans crainte d'être interrompue par quiconque sauf elle-même. Avec le doute d'être regardée, écoutée. Elle dit la rencontre, les moments de doute, de gêne, les débuts :
"Il me raconte des histoires : les siennes, celles des gens qu'il connaît, celles qu'il lit dans les livres. Certains hommes cachent leur silence derrière le bavardage. Je sais qu'il a peur de ce qui adviendrait si on laissait le silence s'installer entre nous.
Il faut se taire pour oser un geste.
Il faut se taire pour qu'une main frôle une main.
Il faut se désemplir la bouche des mots pour y recevoir la langue de l'autre." (p.15)
C'est un livre de grandes beautés : celle du texte, celle des dessins et celle de l'objet-livre, couvertures et rabats et mise en page. De ceux que l'on trouve dans les bonnes librairies, pas toujours mis en évidence, ce qui est fort dommage ; de ceux que l'on a plaisir à acheter, à ouvrir et à lire et à offrir ensuite tant on est sûr de faire plaisir.
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