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Ce livre est une enquête sur l'agriculture cellulaire. Le terme relève de la novlangue en ce qu'il annonce comme relevant de l'agriculture la production d'aliments - plus particulièrement des produits animaux - à partir de cellules souches. Viandes, oeufs, laitages, gélatines, cuirs, soie sont (ou seront) fabriqués industriellement sans passer par la ferme. L'enquête s'attache aux start-up de cette nourriture artificielle ; aux financeurs des fondations qu'ils alimentent et aux mouvements que ces fondations soutiennent par ailleurs, notamment les végans ; l'enquête va aussi explorer les liens - discrets mais réels - d'une part avec une agence de la sécurité intérieure américaine, d'autre part avec les transhumanistes.
Gilles Luneau, qui n'en est pas à son coup d'essai dans l'écriture en soutien à l'agriculture bio, mène une charge sévère contre le véganisme.
Sa thèse est assez simple : s'il peut y avoir des végans sincères, peu nombreux et qui, sous prétexte de bien être animal, vont sans en avoir conscience à l'encontre de la préservation de la biodiversité, le mouvement est aujourd'hui largement noyauté par des start-up californiennes et les grands de l'agroalimentaire, qui y voient d'abord une nouvelle source de profits.
Faire de l'alimentation végan, à base de protéines végétales ou de viandes cultivées en laboratoire, ne peut être rentable que si une part significative du marché, bien au delà du mouvement végan, bascule vers ces produits. D'où toutes les tentatives d'intimidation à l'encontre des "mangeurs de viandes" et les campagnes de lobbying pour convaincre législateurs et consommateurs que viandes naturelles ou viandes de synthèse, c'est la même chose...
Pour ce faire, innovateurs et industriels n'hésitent pas à appeler à la rescousse toutes sortes de théories, notamment le transhumanisme, mouvement philosophique et scientifique qui vise à améliorer la condition humaine grâce à l'utilisation de technologies permettant de dépasser nos limites biologiques. Si on parvient à produire de la viande en laboratoire, alors pourquoi pas des "morceaux" de corps humains pour guérir des maladies ou augmenter des capacités (musculaires, par exemple).
Dans cet exercice de conviction, l'auteur ne cache pas ses partis prise : homme de terroir pour qui l'alimentation doit être lié à l'agriculture et à l'élevage, ou la chasse, il n'occulte pas non plus les biais possibles d'une enquête trop à charge.
Le résultat est donc plutôt convaincant, surtout conclu par l'interview d'un agriculteur-éleveur bio qui défend sa cause avec d'excellents arguments. On sort de cette lecture enrichi de connaissances sur ce que devrait être le bien-être animal et l'agriculture bio post-industrielle, en évitant les écueils du véganise et du spécisme animaliste.
Ajoutons que le livre est écrit assez simplement, évitant de tomber dans le jargon technique, et apportant les éclaircissements nécessaires pour que le lecteur non averti comprenne ce qui se cache derrière les mots. Je ne lui ferai qu'un petit reproche, que je fais souvent à ce genre d'ouvrage : ne pas ouvrir chaque chapitre ou partie par une petite synthèse expliquant ce que l'auteur va essayer de démontrer dans les pages suivantes. Cela faciliterait encore la lecture et la compréhension.
http://michelgiraud.fr/2020/04/11/steak-barbare-hold-up-vegan-sur-lassiette-gilles-luneau-laubefondation-jean-jaures-une-charge-utile/
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