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Inaugurée avec la publication « originale » des textes publiés de son vivant, Légende posthume (Grèges, 2013), cette édition des oeuvres du poète se termine avec ce nouvel ouvrage principalement composé de textes inédits. Il vient compléter Y a-t-il lieu d'écrire ? (Grèges, 2015), dont la sélection de textes couvrait les années 1942-1969. Cette fois, c'est la période 1970-1994 qui est traversée, c'est-à-dire à nouveau une vingtaine d'années. Ce deuxième moment de la vie poétique de Racine est emblématique. Il semble en effet proposer deux mouvements successifs contradictoires : une percée (les années soixante-dix) et un retrait (les années quatre-vingt).
Ce qui frappe dans ces textes qui cultivent parfois l'inachevé comme un art poétique, c'est la cohérence d'une oeuvre qui aura fait de sa recherche perpétuelle le processus en cours de son élaboration. Une oeuvre processuelle en effet, où se lit l'affirmation d'un style et d'un matériau, de thèmes ou de motifs, entre innovation (étrangeté syntaxique ou lexicale) et simplicité (évidence des propositions, nudité du geste d'écriture). Une poétique des restes, de l'éparpillement, à travers laquelle le poète « étripé », supplicié à la lettre, confronte son corps autant que son esprit à ce désir d'incarnation poétique qui le meut, jusqu'à souffrir d'une telle - improbable sinon impossible - transsubstantiation. « Le poème me récolte et me dénude et me laisse là, démuni. » La question du sujet (de l'individu ou indivis poétique) constitue en effet le coeur de sa poésie.
Cette poétique de la dispersion et de l'inachèvement, cette difficulté de se rassembler, se reflètent bien évidemment dans les papiers laissés et archivés par le poète, proposant souvent des textes dans un état précaire, suspendus à l'instant d'un travail toujours en cours. Nous ne présentons pas une édition critique ni complète, mais un parcours singulier rendant compte d'un tel travail à l'oeuvre. Une exhumation. Certains textes étaient comme en attente de publication, d'autres plus rétifs, saisis dans le travail de leur précipité. Comme pour les volumes précédents, et plus particulièrement dans la lignée de Y a-t-il lieu d'écrire ?, nous avons procédé à des choix, choix de poèmes ou de mises en forme. Nous avons globalement respecté la chronologie de textes le plus souvent datés, parfois avec précision.
Afin d'organiser l'afflux épars de ces derniers, nous avons découpé des séquences en suivant la logique de certains ensembles ; les titres proposés sont extraits de poèmes ou proviennent des multiples notes ou notations, réflexions ou ajouts, qui jalonnent les manuscrits et les tapuscrits : Nuit mais que la nuit s'achève (regroupant des textes des années 1970-1972), Le pain défait que rejoigne la mie (1971-1973), La voix de l'eau perchée (1973-1975), Il faut avoir traversé l'écriture (1975-1979), Le feu éteignit le feu (1980-1984), Une missive (1985-1994).
Parallèlement à ce découpage relativement arbitraire se distinguent des cycles ou de grands ensembles poétiques délibérément constitués et, pour la plupart, nommés : Une femme au bord de l'heure (1969/70), Ondée des cordes (décembre 1971), Fable déflorée (mars 1975), Pérouse (octobre 1975), Rome (septembre/octobre 1978), Le Testament (mars 1983) ou Convenir du poème (janvier 1984).
Charles Racine (1927-1995) est un poète suisse romand dont l'oeuvre fut partiellement publiée de son vivant. Outre une plaquette, Sapristi (Zürich, Hürlimann, 1963), il publia sous son nom deux livres : Buffet d'orgue (Zürich, Hürlimann, 1964) et Le Sujet est la clairière de son corps (Paris, Maeght, 1975). Il collabora par ailleurs à de nombreuses et prestigieuses revues en France, dont Le Nouveau Commerce, La Traverse, L'Éphémère, Po&sie ou Argile. Il fut ainsi le contemporain ou l'ami de nombreux poètes qui écrivirent l'histoire de la poésie des années 60 et 70, comme Jacques Dupin, André du Bouchet, Jean Daive ou Michel Deguy, et fut soutenu par d'éminents critiques tels Georges Poulet ou Jean Starobinski, pour ne citer que quelques noms.
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