Il n'est pas trop tard pour les découvrir... ou les offrir !
Nos pères, nos frères, nos amis est une enquête immersive, un livre essentiel pour comprendre un point aveugle de notre société.
« La petite graine de la violence, elle pousse, elle pousse, et je pense que cette graine est en moi depuis longtemps, elle fait partie de mon bagage, de ce que m'ont transmis mes parents. La violence surgit comme un instinct animal, et vous murmure à l'oreille : «C'est la faute de l'autre.» ».
Pendant quatre ans, le journaliste Mathieu Palain s'est rendu dans des groupes de parole, dans une Maison des femmes, à des auditions judiciaires. Il a eu accès à des histoires et des témoignages d'une rare puissance.
J'ai découvert Mathieu Palain avec le livre "Ne t'arrête pas de courir" consacré à Toumany Coulibaly, champion de 400 mètres. J'ai eu l'honneur de le "rencontrer" lors du salon du livre à Paris. A cette occasion, j'ai découvert qu'il avait écrit sur les hommes violents. Alors banco, j'ai pris le livre pour poursuivre avec la plume de ce monsieur que j'avais beaucoup apprécié.
Le présent travail de Mathieu Palain, qui est journaliste, a préalablement fait l'objet de podcast "France Culture" au cours desquels il donne en grande partie la parole aux hommes violents.
L'angle est donc particulier puisqu'il est principalement (non exclusivement) l'homme violent vu par lui-même.
Pour dérangeant qu'il soit, cet angle apporte énormément au propos.
Je n'ai eut de cesse que de me remémorer le livre de Rebecca De Lighieri "Il est des hommes qui se perdront toujours" qui traite notamment de la violence "gratuite".
Ce qui est particulièrement remarquable dans le travail de Mathieu Palain, c'est son absence de jugement. IL est narrateur. Il est questionné, il est remué, il nous invite à son cheminement de façon assez clinique pourtant progressivement il s'interroge lui-même, il s'interroge socialement, il s'interroge intimement. J'avais déjà été bluffée à la lecture de "Ne t'arrête pas de courir" et il réitère avec cet ouvrage.
J'aime définitivement le travail réalisé par Mathieu Palain, j'aime son écriture, son cheminement, son intelligence. J'aurais tout de même aimé un peu plus de place à l'angle féminin même si j'ai conscience que c'est surement ce partie pris qui donne toute la force à l'ouvrage.
Je vous invite sans réserve à découvrir tant les podcasts que cet ouvrage qui ne vous laissera pas indemne.
Mathieu Palain est un journaliste, romancier que j’ai découvert avec « Ne t’arrête pas de courir » que j’ai utilisé pour mon atelier dans le cadre de la Nuit de la Lecture 2024 à la maison d’arrêt de TOULON-LA FARLEDE.
Il m’est arrivé d’avoir des participants à mes ateliers d’oralité qui étaient détenus pour violences physiques, harcèlement moral et physique. Lire l’enquête de Mathieu Palain était un bon moyen de tenter de comprendre la genèse et les causes de ces actes de violence.
Le journaliste a assisté pendant quatre années à des groupes de paroles, des auditions judiciaires. Il a aussi recueilli la parole de victimes dans une Maison de femmes.
Ce qui surprend dès le début, c’est le déni dans lequel ces hommes se trouvent : minimisation de leurs actes et de leur culpabilité . En effet, c’est leur victime qui les a poussés à bout….
Un « cycle de la violence conjugale » a été identifié, une sorte de rythme cyclique :
» Première phase, un climat de tension s’instaure, l’homme se met en colère, multiplie les reproches envers sa compagne, puis il passe à l’acte et violente sa victime, qui est traumatisée, désemparée. Dans la troisième phase, il lui reproche ce qui vient d’arriver ; puis dans la quatrième phase, il s’en veut, présente ses excuses, se dévalorise, offre des cadeaux et menace, parfois, de se suicider. Cette phase dite de lune de miel laisse penser qu’un nouveau départ est possible. Mais le cycle se remet en branle. »
J’ai découvert avec intérêt la thèse de l’épidémiologiste américain Gary Slutkin. Selon lui, la violence doit être traitée comme une épidémie. La pauvreté, si souvent incriminée, n’est pas toujours l’élément déclencheur de la violence.
» Les enfants exposés à la violence, qui l’ont subie ou en ont été témoins, sont contaminés. La tuberculose vous l’inhalez et elle attaque vos poumons. Le choléra, vous l’avalez et vos intestins font le reste. La violence pénètre votre cerveau une fois que vous y avez été exposé. Et ensuite vous copiez, parce que nous sommes des machines à copier. (…) La solution ? Bloquer l’épidémie. Vous pouvez vous démener pour sortir un enfant de la merde, aucune étude scientifique ne prouve que ce que vous avez fait pour lui a une influence quelconque sur son environnement. C’est donc sur son environnement qu’il faut agir. Vous changez l’environnement, vous changez les gamins du quartier, parce qu’on ne grandit pas seul mais dans un bain d’influences. »
Cette enquête passionnante devrait être lue par tous les professionnels travaillant sur le terrain.
Très intéressant de traiter se sujet ,il me tarde de le lire ,u problème dur à cerner ,une façon de voir peut être les choses différemment à découvrir
Pendant plusieurs années, le journaliste Mathieu Palain étudie les violences conjugales... Du point de vue du bourreau. Que se passe-t-il dans la tête des hommes qui battent leur femme ?
Si vous me suivez depuis longtemps, vous savez que c'est extrêmement rare que je lise un essai. Je préfère de loin lire un roman (même une histoire vraie) car j'ai besoin qu'on me raconte une histoire. Mais vous savez aussi que le thème des violences conjugales est cher à mon cœur, et en ouvrant cet essai, j'ai découvert qu'il se lisait presque comme un roman.
J'étais un peu réticente au départ car j'avais peur de ressentir de l'empathie pour les hommes violents. Or pour moi, quelqu'un qui frappe quelqu'un qui l'aime et qui lui fait confiance ne mérite pas d'empathie. Mais les choses ne sont pas du tout présentées ainsi. Au fil de ces interviews avec les hommes violents, on voit que beaucoup d'entre eux se présentent comme victimes. D'autres, plus rares, reconnaissent les faits, admettent que c'est mal, mais la plupart, hélas, recommenceront.
Ce qui m'a particulièrement plu, c'est que Mathieu Palain ne se positionne pas comme extérieur à cette violence. Si ce n'est évidemment pas un homme qui bat sa femme, il s'interroge sur les petites actions de son passé qui ont constitué des actes de violence : par exemple, se montrer un peu trop insistant pour qu'une fille l'embrasse. Et ce côté à l'opposé du "c'est les autres, moi je suis un mec bien", j'ai trouvé ça rafraîchissant.
Certains de ces hommes m'ont vraiment donné envie de croiser les jambes très fort et de ne plus jamais voir de mec de ma vie... Et je dis ça alors que mon propre chéri est l'homme le plus adorable du monde...
Un livre important, à lire absolument pour comprendre la violence.
Mathieu Palain livre un récit non fictionnel, un récit porté par la confiance que lui ont fait des groupes de paroles, des femmes, des victimes,…
Tous ces témoignages font prendre conscience que TOUT LE MONDE peut être touché par la violence et certainement des gens que nous côtoyons et aimons.
« 220000 femmes déclarent chaque année subir des violences conjugales. Prenons l’info dans l’autre sens 220000 mecs violents. Ça fait du monde. » page 113
« Alors vous devriez interroger votre fascination face au crime. Là où il y a de la violence, il y a de la sidération… notre justice n’est pas une justice de punition, mais de réhabilitation dans la société. Pour empêcher la récidive, être capable de dire : « Oui je l’ai fait », ça ne sert à rien. » page 190
L'auteur met en lumière un chiffre alarmant : 220 000 femmes déclarent chaque année être victimes de violences conjugales. Un chiffre qui, selon lui, est largement sous-estimé. Les agressions de ce genre sont malheureusement bien plus courantes qu'on ne l'imagine. Des monstres se cachent dans l'ombre, peuvent-être même parmi nos proches, sans que nous en soyons conscients.
Mathieu Palain remet en question les stéréotypes qui entourent les auteurs de violences, démontrant avec force que ces comportements abjects peuvent toucher toutes les couches de la société. Il interroge des sujets douloureux tels que l'emprise, cette domination insidieuse qui piège les victimes, l'amour malgré la violence, cette ambiguïté tragique qui provoque certains couples dans une spirale destructrice, ainsi que le déni de cette réalité insoutenable qui gangrène notre société .
L'ouvrage souligne l'importance vitale de ne pas fermer les yeux face à ces violences. Il met en avant l'éducation comme un outil essentiel pour lutter contre ce fléau qui a détruit des vies. L'auteur adopte une approche humble, évite tout pathos inutile, mais n'hésite pas à utiliser des mots percutants pour décrire ces gestes tragiques et ces existences brisées.
"Nos pères, nos frères, nos amis" est un documentaire percutant, une plongée vertigineuse dans les mécanismes des violences conjugales en se focalisant sur les auteurs.
Il offre une perspective troublante sur la normalité de ces agressions, sur leur présence insidieuse dans notre quotidien.
Ce livre brise les silences, réveille les consciences endormies et souligne l'urgence d'une sensibilisation massive et d'une éducation adaptée pour mettre fin à ce phénomène destructeur. Mathieu Palain nous pousse à ouvrir les yeux, à dénoncer ces violences insupportables, pour que les femmes ne soient plus les victimes silencieuses.
"Le truc avec la violence conjugale, c'est qu'on ne se sent pas concerné. Notre fascination pour la mort nous pousse à compter celles qui ne peuvent plus témoigner - 146 femmes assassinées en 2019, 102 en 2020, 113 en 2021 - mais si on s'intéresse aux chiffres, il existe une autre statistique : 220 000 femmes déclarent chaque année subir des violences conjugales. Prenons l'info dans l'autre sens et on se retrouve avec 220 000 mecs violent. Ça fait du monde. Surtout quand on sait que toutes les victimes en parlent pas et qu'on ne voit jamais l'iceberg en entier. Mais restons sur ce chiffre. Ces 220 000 mecs violents, ce ne sont pas 220 000 monstres, 220 000 bêtes féroces qui sillonnent nos rues à la recherche d'une proie facile. Ce serait si simple. Un loup, ça se traque, ça se tire, ça s'empaille. Non, dans ces 220 000 hommes, il y a votre père, votre oncle, votre frère, votre meilleur ami, votre voisin, votre patron, votre collègue de bureau, le boulanger du coin de la rue, le fromager sympa qui file du comté à votre fils. Pas de monstres. Des mecs normaux. Et c'est bien le problème."
"S'ils sont violents, c'est parce que la société le permet."
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Ne t'arrête pas de courir
Sale gosse
Nos pères. Nos frères. Nos amis. Un titre faisant référence aux propos de l’actrice Adèle Haenel. En 2019, sur le plateau de Médiapart, celle-ci dénonçait les agressions sexuelles dont elle avait été victime.
« Les monstres, ça n’existe pas. C’est notre société. C’est nous, c’est nos amis, c’est nos pères. Et on n’est pas là pour les éliminer, on est là pour les faire changer. Mais il faut passer par un moment où ils se regardent. Une femme sur cinq- et je suis gentille, car c’est beaucoup plus que cela- est confrontée à la violence des hommes. Donc on peut quand même questionner ce que c’est que la virilité, aujourd’hui. »
Durant 4 ans, Mathieu Palain, rassemble les paroles de ces hommes violents. Il entre dans leur tête et les propos sont durs à entendre. La réalité est là. Il se la prend de pleine face. Dans des groupes de parole ou lors d’auditions judiciaires, ces hommes livrent les faits, le pourquoi du comment, leur version, leur justification et j’en passe.
« La violence, m’a-t-ton expliqué, suit un rythme cyclique : dans la premières phase, un climat de tension s’instaure, l’homme se met en colère, multiplie les reproches envers sa compagne, puis il passe à l’acte et violente sa victime, qui est traumatisée, humiliée, désemparée. Dans la troisième phase, il lui reproche ce qui vient d’arriver. ‘Tu m’as poussé à bout’, ‘C’est de ta faute, tu vois que je m’énerve et tu continues’, puis dans la quatrième phase, il s’en veut, présente ses excuses, se dévalorise –‘Je ne te mérite pas’-, offre des cadeaux et menace, parfois, de se suicider. Cette phase dite de ‘lune de miel’ laisse penser qu’un nouveau départ est possible. Mais le cycle se remet en branle, et avec lui vient la tension, les insultes, les coups, les justifications, les cadeaux… Plus la relation dure, plus les cycles sont courts. Chez certains, on passe des coups à la lune de miel deux fois dans la même journée »
Il n’est pas question d’excuser ou de défendre qui que ce soit. Ce livre est une enquête, bourré de témoignages plus révoltants les uns que les autres. Je l’ai reçu comme une urgence de dire encore et plus fort que « tout se joue dans l’enfance ». Aux jeunes garçons, qu’il faut éduquer au respect et aux valeurs humaines. Aux petites filles, à qui il faut dire qu’elles ont toute leur place dans cette société qui leur en fait douter. Il y a tant à faire pour que les choses bougent, pour que les comportements évoluent. C’est à nous adulte, parent, de prêter attention aux gestes du quotidien, aux paroles, aux regards qui blessent, brisent, détruisent. La bienveillance doit être au cœur de nos vies.
« La violence ne définit pas une personne. On a beau être drôle, attachant, sensible, intelligent, on peut aussi être violent. On a beau être aimant, fragile et même tendre, on peut encore être violent. »
http://www.mesecritsdunjour.com/archives/2023/05/22/39916425.html
« Les violences faites aux femmes, c’est un truc qui t’intéresse ? ». Voilà la question déclencheuse qui va lancer Mathieu Palain dans une enquête pour comprendre le mécanisme qui conduit chaque année en France plus de 100 femmes à la mort et 220 000 à subir des violences au sein de leur couple.
Le bandeau de couverture est catégorique : Mathieu Palain est « le jeune surdoué de la littérature du réel ». Je ne sais pas vous, mais moi ce genre d’affirmation me dispose assez mal en général par rapport au livre que je vais lire. Je n’aime pas qu’on me dise ce que je dois penser de l’auteur ou du récit et j’estime (en toute modestie) être capable de me faire ma propre opinion.
Une fois cela posé, il est indéniable que ce livre possède de nombreuses qualités. Déjà d’accepter ses limites. Non, Mathieu Palain ne va pas nous livrer la solution pour que tout cela s’arrête, ce n’est pas son rôle. Son rôle ici est de nous interroger, d’interroger la société, de s’interroger sur ce qui fait que la violence naît, qu’elle se propage. Que des hommes violents vont répéter ce schéma, que des femmes vont subir, que la justice va parfois faillir à les protéger.
Mathieu Palain ausculte, décortique pour comprendre les mécanismes des agresseurs comme des agressées. Reproduit-on des comportements auxquels on a été confrontés étant enfant, la violence est-elle un sujet de classe sociale, peut-on sortir d’une relation toxique, que transmet-on à nos enfants de cette violence. Autant de questions qu’il explore en participant à des groupes de parole, en écoutant des hommes violents mais aussi des victimes ou des psychologues.
Le livre est aussi intéressant parce qu’il oblige chaque lecteur à se confronter à son propre vécu et Mathieu Palain fait lui aussi cet exercice en tant qu’homme de se demander si, parfois, il n’a pas été un prédateur qui impose et abuse de la faiblesse de la personne qui se trouve face à lui.
A travers ce livre, il interroge une société qui évolue, qui accepte moins, mais sans doute encore trop lentement devant ces chiffres qui restent alarmants. A l’issue de cette lecture, on se dit qu’il reste encore bien du chemin à parcourir car finalement peu d’hommes présentés ici semblent capables de se remettre en cause. Par ailleurs, quel travail est possible sur des hommes qui ne sont pas identifiés car leur compagne ne porte pas plainte ou qu’ils sont protégés par leur statut social.
Il semble qu’il soit bien difficile de sortir d’une sorte d’engrenage dans lequel la violence engendre la violence sans prendre le mal à la source plutôt qu’une fois l’acte accompli.
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