Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
News from the poetic front par Alain Helissen [Poezibao] Jean-Pierre Bobillot déplie depuis de nombreuses années des chantiers poétiques qui s'imbriquent les uns dans les autres, faisant l'objet de publications ponctuelles en revues ou en volumes. Les textes produits connaissent de multiples versions ou « états », tant cet auteur aime à les remanier, à les augmenter au fil du temps. En somme, un « work in progress » constitutif d'une oeuvre dont l'éclatement a fini par devenir la singularité. Jean-Pierre Bobillot y intègre théorie et création poétique, le plus souvent voisines dans un même ouvrage, comme c'est le cas de ce news from the poetic front. Soucieux de traçabilité, l'auteur fournit en fin de volume l'historique détaillé des textes rassemblés ici. Le lecteur pourra ainsi en reconstituer le parcours un rien labyrinthique. Sans entrer dans ce détail, disons que le livre intègre des écrits des années 90, revus et augmentés, auxquels s'ajoutent deux compositions plus récentes, datées de 2009. Au total, cinq parties et un prologue. Ce dernier, « Poésie c'est. » ─ il fut publié dans l'anthologie permanente de Poezibao ─, compte au nombre de ce que Jean-Pierre Bobillot appelle ses « textes de scène », objets de performances que le bruyant poète propose régulièrement. Il s'agit là, comme pour « America », d'une longue énumération prenant effet de litanie. Mais bien d'autres formes apparaissent dans ce recueil. Ainsi, celle du journal, tenu pendant 23 jours, du 30 décembre 1991 au 21 janvier 1992, et qui brasse les désordres du monde en y infiltrant « la femme de sa vie ». Partie quatre, on retrouve le penchant « essayiste » de l'auteur dans un texte intitulé « Rimbaud, Thiers, Pétain et les autres : halte à la falsification ! » Auparavant, une incursion du côté de la poésie visuelle. News from the poetic front, c'est l'effervescence bobillotienne toujours régénérée, à force pieds-de-nez, outrances humoristiques, inventions verbales, emprunts à la langue anglaise, pirouettes et hue-dada version « chercheur de poux », quand y'en a p(l)oux y'en a encore. Assurément, Jean-Pierre Bobillot demeure l'irremplaçable trublion dont les grains de sel rehaussent la poésie contemporaine d'un rien de fantaisie bavarde, juste ce qu'il faut pour la rendre vivante et désirable.
NEWS FROM THE POETIC FRONT par François Huglo [Sitaudis] Compil ou best of ? Ici (« nulpart », dirait Ziegelmeyer) interfèrent (alternent, se mêlent) poèmes et fragments d'essais de Jean-Pierre Bobillot (now-here man ou no-where man : « POésie C'EST le hic & l'nunc »). Collage, mais en 3 D : volume (pump up the), mise en perspective du poétique par le politique et l'inverse. Car « ni vers ni prose, ni mètre ni esclave », frontale, effrontée, sans frontières, pop et free, « POésie C'EST. » lignes de front. La lutte « de partout » (titre d'un recueil de Sylvie Nève) continue « par d'autres moyens » (d'autres media : CD, internet, ici douze photographies du complice américain, Alan Greene). Et continue le « combat spirituel » de Rimbaud (« aussi cruel que la bataille d'hommes »), celui de Nietzche contre « un siècle de journalisme » (« encore un [.] et tous les mots pueront » : nous y sommes), celui d'Artaud contre « tous les moyens possibles » de la force, et ses « vertus écrasantes », américaines par « surexcellence ».
Combat quichottesque, perdu d'avance ? « POésie C'EST l'insuccès assuré ». Et pourtant, elle tourne, « sillon sans fin », et « POésie C'EST l'réel », puisque Le Réel est un spectre. Elle ne joue pas du double pouvoir des mots, symbolique et idéologique, elle s'en joue, déjoue leur surveillance, n'est pas dupe du discours médiatique qui, faisant l'événement, se substitue à lui. Que manipule, que manigance la poésie ? C'est à d'autres fins, à d'autres « fêtes de la faim », qu'elle donne leur chance aux mots. « Give words a chance ». On retrouvera aussi le « Yew yeah Yew » d'Instant Karma, du même « John Winston Lennon » - Winston, comme le personnage de 1984 d'Orwell - interférant avec Gimmie Shelter et l'album des Rolling Stones, Let it bleed - titre saignant sur une image rêvée de crème épaisse (impure ?) coulant sur (abreuvant ?) des sillons de vinyl : « Pig Other is Catching Yew yeah Yew ».
« POésie C'EST. » gratuit : Jean-Pierre Bobillot ne l'écrit pas dans le poème qui ouvre le recueil, mais dans une note en bas de page de l'essai qui le clôt (ou presque) : à André Guyaux qui soupçonne Rimbaud d'avoir « été un précurseur de l'utopie formaliste », il répond : « Que le résultat ne soit qu'hermétisme et inintelligibilité gratuites (ah, la gratuité, cette tare, ce péché mortel à l'aune du Marché !), on a déjà entendu ça » - André Guyaux, appelé à incorporer Rimbaud dans la « Pléiade », ce « coeur, de longtemps dévitalisé, du dispositif spectaculaire-marchand de l'édition française » ! Coeur ou « caca-rente » ? Du « Coeur volé » au « Coeur sous une soutane », Rimbaud is not Musset, time is not money - but life (time and life are free, temps et vie sont libres et gratuits, comme le signifiant), and heart is sex !
Tout se tient, dans ce manuel de guérilla « POétic » : Rimbaud immanentiste (« le droit vaut quand même mieuX que la Loi »), matérialiste, prolétarien, athée, communard, républicain, et nous de Beyrouth, Wall street, Tokyo, Gaza, place Tiananmen, Bagdad (« bad gag »), Alger, Dubrovnik, « France Kultür », la télé. Nous, vous, et eux, Raskolnikov et Lolita, le Peuple et le dictateur, « le petit mitron » et « le Grand Communicateur » qui nous roulent dans la farine : « Cindollarella », Euromickey, Zorro-dollar. Nous, spectateurs-acteurs d'une « nouvelle séquence géopolitique » et lecteurs actifs de ces POetic news, dans une même guerre « des tranchées du réel » - « Qu'un sang gain pur. » - où toute l'histoire fermente en plis intimes. Tchernobyl, c'est déjà Fukushima. « Dirty free » et « le repos du guerrier pour héros du Paris-Dollar », c'est déjà LE procès franco-américain en mondio-voyeurisme.
Ces pièces patiemment assemblées depuis 1991, avec Rimbaud toujours en arrière-plan et en perspective, cette histoire rapiécée, ce grand jeu poétic, ludic, et lucid in the sky (no God, no stars, but « we all shine on »), c'est pour aujourd'hui et pour demain. De ce livre, il y aurait de quoi tirer quelques tracts. En l'un d'eux, une note rimbaldienne et internationaliste en bas de page, l'auteur se montre le plus ardent défenseur, depuis Serge Gainsbourg, d'une Marseillaise falsifiée par les discours officiels. Parce qu'elle préfigure l'Internationale ? Le discours officiel, de Thiers à Barrès, de Pétain à Sarkozy, n'a pas changé : « Pour lutter contre l'échec : supprimer les succès. Pour lutter contre l'exclusion : supprimer les admissions. Savonnez, y a rien à savoir ». Entre les mains de Jean-Pierre Bobillot, entre les nôtres, Rimbaud redevient un pavé dans les vitrines idéologiques des droites anti-républicaines, toutes xénophobes. « POésie C'EST. » le front pop !
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