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L'oeil bande ouvre grand l'espace de la ville mêlé à l'espace intime, dans une fragmentation des perceptions reflétées sur la rétine. Promenade sensorielle, qui attrape au passage le détail des vitrines, le flash des ampoules, le noir des rues, dans une restitution littéraire du regard et de ses clignements, dans la mobilité permanent de l'oeil qui embrasse dédales de rues, d'immeubles, de façades de pierres et de dos d'hommes.
Emmanuel Laugier use de cette disparité de perceptions et d'informations pour nous restituer le monde.
Il se dégage un sentiment d'enregistrement direct, cette sensation - debout, chaotique - de vivre en direct au fil du texte, sur la bande passante d'un oeil qui déroule ses barres de rues, ses misères d'hommes perdus, ses anonymats. Une humanité animale, étalée, prise dans les phares crus d'une réalité syncopée.
A travers la fente, quelque part à travers la vitesse affolée du nerf optique, dans un saisissement des choses aperçues, toucher le corps, atteindre l'autre, se retrouver, quelque part au milieu de cette humanité qui se déplace. Nos vies battent dans les rues, nos vies hantent les rues, agitations sous le ciel. Sous la neige qui recouvre le jour, multiplie les réflexions, l'oeil neige vers la lenteur, vers le plan fixe. L'oeil fixe.
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