"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Né en 1994, le gourmet solitaire a conquis, au fil de deux décennies de flâneries propices à des expériences culinaires précieuses et intimes, un public japonais et occidental toujours grandissant. Ces 32 repas (dont celui publié dans le numéro 2 de la revue Pandora) sont ici réunis pour la première fois au même format que les éditions cartonnées de Quartier lointain et Le Journal de mon père.
Ne négligez pas la lecture du préambule de Patrick Honnoré qui m’a fait sourire.
« Rassemblez votre « yoyû » et goutez-moi ça, vous m’en direz des nouvelles. »
L’homme la quarantaine, célibataire, arpente le pays pour placer sa marchandise, il va à la rencontre de sa clientèle et prospecte aussi.
Au départ il cherche un entrepôt et se trouve à San’ya le quartier des ouvriers à la journée, les précaires donc, le sous-prolétariat, les parias, quartier où la police n’intervient pas, elle laisse le quartier gérer avec ses propres règles. La visite de l’entrepôt n’est pas concluante et il a faim. Il se met à la recherche d’un endroit où déjeuner. Ce faisant, il s’égare et s’aperçoit qu’il détone dans cet endroit. Il se définit ainsi :
« J’ai un petit business d’import et de revente d’articles et d’accessoires de mode, mais je n’ai pas de boutique. Gérer un magasin c’est comme le mariage. Les responsabilités augmentent au bout du compte, les semelles de la vie s’alourdissent. N’avoir de compte à rendre à personne, s’assumer en solitaire, pour moi c’est ça être un homme. »
La question primordiale de ses journées est où manger et quoi manger ?
Pour cela il flâne avant de s’arrêter.
Dans ce quartier ouvrier il remarque que tous ces hommes portent une casquette qu’ils gardent sur la tête le temps du repas, ils plaisantent beaucoup et il y a aussi beaucoup de repas à emporter. Pas pour manger seul dans son coin, non pour partager en extérieur.
Souvent il passe des commandes gargantuesques, car c’est un voyage culinaire mais dans les réminiscences de ses souvenirs : enfance, petites amies…
Ses voyages lui apprennent les contraintes du vivre en commun et s’il il le faut il joue des poings.
Drôle son voyage en train Shinkansen et savoureux.
Les Japonais ont découvert la viande rouge au XXe siècle à travers la cuisine occidentale et coréenne. La viande de bœuf grillée fait partie de leurs mets préférés.
La phrase qu’il prononce le plus : « C’est plus copieux que je ne pensais. »
Il a deux particularités originales : il est zéro alcool et il aime les cactus.
Dans le voyage que fait le lecteur avec ce gourmet solitaire, il y a de nombreuses similitudes avec les films d’Ozu, tout est dans les détails qui rendent « visibles et sonores le temps et la pensée ». Dessins sobres et esthétiques qui vous font contempler le quotidien comme une œuvre d’art.
C’est toujours une invitation à prendre le temps.
J’aime cette simplicité apparente qui vous balade et vous apprend les us et coutumes d’un pays. C’est universel et personnel, qui n’a pas de souvenirs culinaires liés à l’enfance ou à des moments particuliers de la vie. La nourriture terrestre comme lien.
Toujours, en filigrane ici, l’image du père qui accompagne l’enfant devenu adulte, et très présente la solitude de l’homme au travail.
Le lecteur comme le protagoniste se pose vraiment, savoure, observe, engrange de petites choses qui deviendront de petits bonheurs essentiels.
Le plaisir comme dénominateur commun.
©Chantal Lafon
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