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«Il est des lieux maléfiques qui ne devraient pas exister. Il est des villes malfaisantes où l'on ne peut demeurer. Calcutta est de celles-là. Avant Calcutta, pareille idée m'aurait fait rire. Avant Calcutta, je ne croyais pas au mal, et surtout pas comme s'il était une force indépendante des hommes. Avant Calcutta, je n'étais qu'un imbécile.»
Robert Luczak est envoyé à Calcutta par sa maison d'édition pour récupérer le mystérieux manuscrit d'un poète que tous croyaient mort depuis huit ans. Mission simple en apparence, mais qui prend des allures de descente aux enfers dès lors que son chemin croise celui des Kapalikas, secte vouée à l'adoration de la meurtrière Kali dont les membres font régner la terreur sur la ville.
Sacrifices humains, cadavres ressuscités, meurtres en pagaille... Luczak comprendra - mais trop tard - que rien n'arrête le chant macabre de Kali.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier Babelio ainsi que Pocket pour ce Masse Critique qui m'a permis de découvrir Dan Simmons par le biais d'une réédition de son premier roman : Le chant de Kali.
Si mon choix s'est porté sur ce roman, ce n'est pas seulement pour combler mes lacunes de lecteur. Le réel déclencheur a été le cadre de l'histoire - Calcutta à la fin des 1970's - qui a titillé d'emblée mon imaginaire car il laissait la porte ouverte à bien des développements. L'Inde, depuis toujours, fait fantasmer l'imaginaire des occidentaux, car elle est le berceau à la fois des médecines alternatives, mais également du surnaturel, d'une spiritualité protéiforme, parfois bien loin du cadre rassurant (?) de nos bons vieux monothéismes.
Malgré mon enthousiasme premier, j'avais quelques doutes sur l'objectivité de l'auteur. Au milieu des 1980's, un thriller fantastique écrit par un Américain qui se déroule à Calcultta... En toute honnêteté, j'avais peur de me retrouver face à une Inde caricaturale aux côtés d'un héros moralisateur, condescendant... Soyons clair, il y a un peu de tout cela dans Robert Luczak, mais pourtant cela n'entache pas la qualité de l'intrigue, car sans ce décalage, ce manque de repères, ce choc des cultures, le héros de cette histoire ne basculerait pas, ne s'enfoncerait pas dans les “méandres méphitiques de la ville” pour reprendre les mots de la quatrième de couverture.
Bien qu'il soit classé dans la catégorie “SF”, “Le chant de Kali” s'apparente plutôt à une œuvre fantastique tant l'histoire, si riche en rebondissements soit-elle, tend vers le “plausible”, prend un malin plaisir à flirter avec le surnaturel sans jamais réellement choisir son camp. Malgré son occidentalisme un chouïa agaçant au début, Robert Luczak suscite rapidement l'empathie, un sentiment qui va en s'accroissant, qui ne quitte jamais le lecteur y compris dans les pages les plus angoissantes.
L'auteur se démarque de ses contemporains - dont l'un se fait d'ailleurs un peu écorner au passage - par l'épaisseur de ses personnages, la qualité des descriptions, mais également dans sa filiation, plus littérature généraliste que de genre. Preuves en sont les nombreuses références à Rabindranath Tagore, à la poésie romantique sans oublier l'élément déclencheur de l'histoire, le mystérieux manuscrit du poète indien Das. Après quelques recherches, il a bien existé un poète de ce nom en Inde, mais difficile, n'étant pas spécialiste du genre, de savoir si Dan Simmons s'en est inspiré et; le cas échéant, dans quelles proportions.
Je suis donc plutôt conquis par cette première excursion du côté de chez Dan Simmons, car il a su rapidement balayer mes premières réticences et m'a offert quelques frissons bienvenus, brillamment disséminés dans une enquête bien ficelée au rythme soutenu.
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