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La mémoire tyrannique

Couverture du livre « La mémoire tyrannique » de Horacio Castellanos Moya aux éditions Metailie
  • Date de parution :
  • Editeur : Metailie
  • EAN : 9791022610025
  • Série : (-)
  • Support : Papier
Résumé:

1944. Lorsque Pericles, un journaliste critique du dictateur salvadorien, le “sorcier nazi”, est arrêté et emprisonné, son épouse Haydée, une jeune femme de la bonne bourgeoisie, décide d’écrire le journal des événements. Pendant qu’elle note ce qu’elle considère comme des conversations avec son... Voir plus

1944. Lorsque Pericles, un journaliste critique du dictateur salvadorien, le “sorcier nazi”, est arrêté et emprisonné, son épouse Haydée, une jeune femme de la bonne bourgeoisie, décide d’écrire le journal des événements. Pendant qu’elle note ce qu’elle considère comme des conversations avec son mari – qui avant de devenir opposant a été collaborateur du régime –, elle raconte les progrès des arrestations, les interdictions de visite au pénitencier ainsi que ce qui se passe pour le reste de la famille, composée d’un côté de militaires, soutien du régime, et de l’autre des libéraux, opposés au tyran. Sur ce, un coup d’État contre le dictateur éclate, son fils Clemente, le fêtard, le coureur, l’ivrogne, est impliqué et raconte ce qui se passe chez les conspirateurs. Ses aventures parfois désopilantes alternent avec l’éveil de la conscience politique de Haydée, qui organise la rébellion avec d’autres femmes : épouses, filles, petites-filles, voisines, domestiques.

Un grand roman de Castellanos Moya, une riche combinaison de voix et de registres littéraires, du journal intime à l’action cinématographique, en même temps qu’une prodigieuse incarnation de l’histoire d’un pays dans les destins d’une famille, un épisode fondateur : le début de La Comédie inhumaine de l’auteur.

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Avis (1)

  • Du 24 mars au 8 mai 944: 6 semaines importantes dans la vie du San Salvador : les derniers jours de la dictature du Général Martinez, surnommé «le sorcier nazi», qui a dirigé le pays d'une poigne de fer pendant 12 ans .
    Castellanos Moya fait vivre au lecteur ces moments agités au travers de...
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    Du 24 mars au 8 mai 944: 6 semaines importantes dans la vie du San Salvador : les derniers jours de la dictature du Général Martinez, surnommé «le sorcier nazi», qui a dirigé le pays d'une poigne de fer pendant 12 ans .
    Castellanos Moya fait vivre au lecteur ces moments agités au travers de la vie de la famille Aragon, famille riche de la capitale. Périclés, journaliste critique du dictateur vient d'être emprisonné, son fils aîné Clemen est en fuite . Haydée, l'épouse de Périclès décide alors de rédiger le journal de ce qu'elle vit «défouloir où j'écris mes peines», «succédané des conversations avec Périclés» .

    Elle y note chaque jour un compte-rendu fidèle et précis de ses démarches, de ses contacts, tout son quotidien de femme aisée qui remue ciel et terre pour sauver les siens, ce qui permet au lecteur de suivre les étapes des événements politiques qui se succèdent lors de ces semaines décisives pour l'avenir du pays : putsch militaire destiné à renverser Martinez, répression, grève générale, reprise en main puis renversement final .

    Ce journal s'interrompt à 4 reprises pour laisser place à un chapitre dialogué permettant de suivre en direct les péripéties burlesques de la fuite de Clémen et de son cousin Jimmy déguisés l'un en femme de chambre, puis en sacristain, l'autre en curé, tentant d'échapper aux recherches de la police. Deux personnages en totale opposition, dont les échanges frisent le comique. Autant Jimmy, le jeune militaire qui a participé au putsch contre le dictateur est prudent, calme et rationnel, autant Clémen, animateur de radio, porté sur l'alcool et les femmes est fébrile, angoissé et imprudent .

    Cette totale rupture de ton, à l'effet de douche écossaise, est surprenante pour relater ces jours dramatiques où se joue les destin d'une nation, mais n'enlève rien au suspens qui continue à régner . Elle m'a semblé utile pour apporter de l'oxygène au roman, pour contrebalancer la densité et la monotonie du journal d'Haydée qui relate scrupuleusement mais sans effets de style son quotidien d'épouse désemparée. Les personnages y sont multiples, ceux de sa propre famille, ceux de la famille de Périclés, leurs amis, auxquels s'ajoutent tous ceux qu'Haydée rencontre, auxquels elle se joint . Personnages si nombreux que j'ai bien failli m'y perdre! Par chance les chapitres consacrés à nos deux compères au tempérament opposé ont réveillé mon intérêt .

    Un intérêt qui ensuite n'a plus cessé pour culminer dans les 40 dernières pages qui transportent brusquement le lecteur une trentaine d'années plus tard .
    Un vieil ami de Périclés, Chelon, poète et peintre à ses heures y évoque avec tendresse le couple Périclés-Haydée . Dans ce retour sur le passé à la tonalité mélancolique, il retrace le long parcours politique et idéologique de Périclès . Cette partie est précieuse pour le lecteur car elle lève le voile sur celui qui constitue le personnage pivot du roman, personnage central présent/absent. Présent parce qu'il est celui pour lequel famille et amis se mobilisent mais qui n'apparaît que dans de très rares pages, et qui garde son mystère.

    J'ai apprécié ce roman riche, touffu et tout en tension où le destin d'une famille se mêle à celui d'un pays .
    Si le contexte historique du roman est bien celui du Salvador en 1944, les personnages sont fictifs. Ils donnent vie et chair à l'ouvrage .
    Je me suis surtout attachée à celui d'Haydée, qui s'éveille peu à peu à la conscience politique . Rien ne préparait cette femme irréprochable de la bonne bourgeoisie, épouse dévouée et bonne chrétienne, pour tout dire bien conventionnelle, à l'engagement et à l'activisme politique. Il est des moments où la vie d'une femme rangée et respectable prend une autre dimension : c'est lorsque qu'elle prend des risques et lutte pour sauver un mari et un fils en danger de mort . Je n'ai pu m'empêcher de voir en elle,l'image de ces mères Courage qui se sont ardemment battues pour sauver leurs proches des griffes des dictateurs en Amérique latine.

    Ce roman constitue l'un des 11 maillons déjà publiés du projet de Castellanos Moya  intitulé LA COMEDIE INHUMAINE au travers de l'histoire d'une famille : la famille Aragon. Projet dont le titre n'est pas sans rappeler celui de Balzac : La Comédie Humaine . Nul doute que je vais placer dans ma LAL d'autres titres de cette Comédie inhumaine . 0

    Un grand merci à Lecteurs.com de m'avoir permis de découvrir ce roman dans le cadre du Cercle livresque

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