"Tout est parti de mon père...", confie la comédienne
Il est peintre et sa fille est comédienne. Certains esprits attendris les qualifient de doux rêveurs. Mais ce qu'ils partagent, c'est plutôt un net penchant à éviter tout contact trop brutal avec la réalité. Esquives, subterfuges et mises à distance, tout est permis pour ne pas se heurter au réel. Pour lui, l'affaire est désormais conclue puisque la réalité s'est confondue avec la fiction qu'il se raconte, assez joyeusement d'ailleurs, depuis sa maison de retraite où il croit dur comme fer que des Japonais vont lui acheter une fortune l'une de ses plus fameuses toiles. Pour elle, néanmoins, la vie est encore longue... Alors quand elle reçoit un appel de son amie Victoire, metteuse en scène, qui lui propose de travailler sur l'adaptation d'un roman de Pouchkine, elle se prend à rêver d'incarner le rôle de Tatiana. Entre deux visites à son père, elle va chercher à ce que, pour une fois, la réalité se plie à son désir.Rachel Arditi signe un premier roman malicieux et élégant sur un père et une fille occupés à réenchanter le monde.
"Tout est parti de mon père...", confie la comédienne
Une image très attachante de la relation fille père en fin de vie associée une sensation de syndrome de l'imposteur. Ce roman donne à réfléchir.
L'artiste-peintre, la comédienne et l'amour
Rachel Arditi nous offre un premier roman plein de sensibilité sur les affres d'une comédienne qui se bat pour son père atteint d'Alzheimer et pour sa carrière de comédienne et crée des passerelles entre son quotidien et la vie rêvée.
Commençons par le côté autobiographique de ce roman, histoire d'en finir d'emblée. Oui, Rachel Arditi, comme la narratrice, est comédienne et oui, son père était, comme celui du roman, artiste-peintre. Et oui, elle est arrivée à l'écriture par l'adaptation de romans pour la scène. Il n'est par conséquent pas erroné de trouver au fil des pages de ce savoureux roman, du vécu. Mais c'est bien de ce terreau que se nourrissent tous les romanciers, consciemment ou non.
La scène d'ouverture, qui donne bien le ton du roman, retrace le dialogue forcément un peu surréaliste entre la narratrice et son père qui entend fuir son Ehpad de Nogent-sur-Marne et va solliciter pour cela l'aide de sa fille. Âgé de 96 ans et atteint d'Alzheimer – son état va empirer tout au long du livre – son esprit vagabonde. Alors sa fille joue le jeu. Les encouragements qu'elle prodigue à ce vieil homme étant tout à la fois une marque d'affection et une thérapie permettant à son cerveau de rester en éveil.
De retour à son appartement situé du côté de Montmartre, elle rencontre Betsy, une fille espiègle qu'elle croise régulièrement et qui l'entraîne aussi sur la voie onirique. Un autre moyen de ne pas s'épancher sur sa carrière de comédienne un peu à l'arrêt. «Me voilà, à 35 ans mais sans âge, stagnant dans le ressac de ma propre existence, où par moments je crains de faire naufrage. Les luttes que j’ai menées ne m’ont conduite nulle part. Sauf à me dire de façon assez vertigineuse que je n’ai jusqu’ici vécu que pour continuer à vivre.»
L'éclair va arriver après une rencontre avec son amie Victoire qui lui propose d'adapter Eugène Onéguine pour le théâtre. Un projet d'autant plus enthousiasmant pour elle, qu'elle entrevoit la possibilité d'endosser le rôle de Tatiana, l'amoureuse éconduite par le dandy qui donne son titre au roman.
Le récit va alors alterner entre le travail d'adaptation, les bonnes et les moins bonnes nouvelles autour du financement du projet, du casting et des trouvailles pour la mise en scène et les visites à Nogent.
En jouant sur les temporalités, l'imaginaire des protagonistes qui, de manière plus ou moins voulue, choisissent de rêver leur vie plutôt que de la vivre, Rachel Arditi tisse un fil entre eux. Alors le théâtre se retrouve dans la peinture, la jeune fille d'aujourd'hui se retrouve aux côtés de Pouchkine et Betsy embarque avec elle le vieil homme au crépuscule de sa vie.
L'humour et la vivacité de la plume de la primo-romancière entraînent le lecteur dans ce tourbillon plein de poésie qui permet d'affronter les difficultés qui jalonnent une vie d'artiste. Ajoutons qu'en prenant la plume, Rachel Arditi a trouvé le moyen de ne plus dépendre de personne pour mener à bien son projet, contrairement à la comédienne de son livre, soumise aux caprices et aux humeurs des autres. Gageons que ce premier roman, sur lequel souffle un vent de fraîcheur, sera bientôt suivi d'un autre. On l'attend déjà avec impatience!
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"Une folie joyeuse" celle du père qui se voit encore faire fortune en vendant ses tableaux aux japonais. Un rêve utopique, celui aussi de revivre dans son appartement ou plutôt dans le petit hôtel particulier rue Machin-Chouette.
La fille actrice se retrouve sur un projet d'adaptation d'Eugène Onéguine, mise en scène par son amie Victoire. A partir de là le personnage de Tatiana prend toute sa place dans le quotidien de l'actrice ,"Moitatiana". Le rôle lui est dévolu, me semble-t-il? Et puis non, ce sera une jeune et belle actrice Elise Schneider qui lui volera le rôle.
Cruelle déception, une amitié qui prend du plomb dans l'aile. Dans ce monde artistique, il faut louvoyer, rester jeune surtout rester jeune. Le reflet de notre société. Le Paraître. Le Mal-Etre aussi.
Merci à lecteurs.com pour l'envoi de ce roman et la découverte d'une nouvelle autrice.
Voilà un livre qui m' a touché, son écriture fluide, simple, accessible, remplie d'amour et de rêves. Je suis très touchée par la relation qu'elle a avec son papa. J'ai aimé ce livre qui décrit aussi sans fard l'univers du théâtre .J'ai aimé l'idée qu'on puisse peindre un tableau dans sa tête. J'ai aimé qu'elle aussi voit la lune.
Ce livre m'a beaucoup émue. MERCI lecteurs.com pour cette découverte
Rachel Arditi est comédienne et, depuis peu, écrivaine. Avec J’ai tout dans ma tête, une phrase prononcée par son père, à 96 ans, quelque temps avant sa mort, elle écrit un premier roman très original.
Bâti autour de l’œuvre en vers de Pouchkine, Eugène Onéguine, dans la traduction d’André Markowicz, ce livre plonge au cœur des relations entre une fille et son père, Georges Arditi, un nom de famille très connu dans le monde artistique.
Celui qui nomme sa fille « ma biche » ou encore « ma minouche », est un peintre hélas peu connu. Il se trouve en maison de retraite, à la « Maison des Artistes » de Nogent. Malgré la maladie d’Alzheimer qui progresse, il garde énergie et grain de folie, ce qui lui permet d’espérer vendre ses tableaux à des Japonais afin d’engranger beaucoup d’argent.
Sa fille a 35 ans. Elle est liée par une profonde amitié à Victoire qui évolue aussi dans le théâtre, plutôt dans la mise en scène. C’est elle qui lance le projet d’une adaptation d’Eugène Onéguine, adaptation qu’elles doivent mener ensemble.
Au travers de cette expérience assez chaotique, Rachel Arditi me plonge dans le monde artistique parisien, un monde où il est très difficile de faire sa place.
Entre visites à son père et rencontres de travail avec Victoire, elle livre tout son mal-être, ses souvenirs d’enfance, ses moments de bonheur comme ses périodes de doute quand elle se trouve insignifiante. À l’école, elle a même dû affronter l’incrédulité de la maîtresse du CP quand elle a dit que son père avait 68 ans.
Obnubilée par le personnage de Tatiana, l’autrice fait tourner en boucle dans son esprit « Moitatiana » car ce rôle ne peut être que pour elle alors que Victoire l’abandonne un temps pour mettre en scène une autre pièce.
Quand on veut réussir sa vie d’artiste dans ce monde très parisien, il faut beaucoup de force et de courage pour refuser un rail de coke et ne pas toucher au punch plein d’ecsta. Beaucoup de carrières se jouent dans ce microcosme bien appréhendé par l’autrice.
Les nombreuses citations d’Eugène Onéguine, une en tête de chacun des nombreux chapitres, permettent de maintenir l’attention sur cette pièce que la narratrice et Victoire ont décidé d’actualiser. En prime, Rachel Arditi offre le texte de son interview, imaginaire je pense, diffusée sur France Culture, dans sa grille d’été : « Les rencontres insolites de Richard Gaitet ». Jeu et enjeux de l’adaptation. C’est délicieux !
D’une écriture fluide, précise, crue parfois, Rachel Arditi n’écarte aucun problème et me touche beaucoup lorsqu’elle se livre à propos de la mort de l’être qui lui est le plus cher : son père.
Lorsque ce dernier ne retrouve plus le prénom de sa fille, celle-ci comprend que cet homme tellement précieux pour elle n’en a plus pour longtemps. Vivant un peu les mêmes choses avec ma mère en ce moment, je suis profondément ému par les mots très justes trouvés par Rachel Arditi. Même si son père a parlé jusqu’au dernier jour, sa déconnexion complète avec la réalité est difficile à vivre et j’admire la manière très élégante, à la limite du fantastique, avec laquelle elle conclut son livre.
Je remercie bien sincèrement Lecteurs.com et les éditions Flammarion pour cette découverte, ce roman à la fois original et profondément humain, un livre superbement illustré par un bandeau affichant son portrait peint par son père alors qu’elle avait 6 ou 7 ans. Là, elle confie qu’elle a l’air ailleurs mais, si ça peut la rassurer, depuis, elle a bien repris place parmi nous comme le prouve J’ai tout dans ma tête.
Chronique illustrée à retrouver sur https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
J'ai tout dans ma tête, le premier roman de Rachel Arditi. En tre fiction et réalité l'autrice brosse un portrait très actuel de notre société.
Le récit met en parallèle deux destins. Celui du père, peintre, qui nous dévoile ses rêves à l'heure où ils ne sont plus réalisables. Et celui de la fille, actrice, qui nous dévoile l'envers du décors et ses projets artistiques. Le tout est parsemé d'extraits d'Eugène Onéguine.
Un récit poétique par moment mais aussi très réaliste à d'autres. Je ne saurais dire si j'ai aimé cette lecture ou non. C'est facile à lire et divertissant, mais porté par une plume parfois un peu lourde en descriptions. Je n'ai pas su m'approprier le texte pour réellement l'apprécier.
Un grand merci à lecteurs.com pour l'envoi et la découverte de ce roman.
Double narration pour ce roman de l’inconstance. Trahison de l’âge et trahison des vies rêvées.
Elle est actrice, sans visibilité de star et son amie scénariste lui propose d’adapter pour théâtre Eugène Onéguine, l’oeuvre célèbre de Pouchkine. De quoi se rêver interprète de Tatiana.
Pendant ce temps son père, artiste peintre lui parle de ses rejets de contrats avec les japonais, avec chaque fois qu’elle lui rend visite à l’Ehpad qui l’héberge.
Est-ce la cohabitation des deux univers distincts qui m’a dérangée ? Chaque volet est intéressant, mais leur alternance crée une scission qui atténue la cohérence du récit, même si dans la vraie vie, on endosse aussi parfois des costumes renvoient à des univers parfois bien éloignés les uns des autres.
J’ai aimé effleurer le texte de Pouchkine, proposé en tête de chaque chapitre. J’ai aimé la restitution de l’ambiance du milieu de la création artistique, sans compassion ni considération pour les potentiels blessés des egos.
Un premier roman agréablement écrit, qui se lit sans déplaisir.
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