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"Chmeliov - note Henri Troyat en avant-propos à Garçon ! - exprime une pitié profonde envers la race de ceux que Dostoïevski nommait les humiliés et les offensés. Son héros, un garçon de salle, ne prend pas prétexte de son abaissement pour dénoncer l'injustice sociale, mais pour chercher, à travers son malheur, le sens de la vie et l'explication du monde. C'est Dieu entrevu derrière des piles d'assiettes." En vérité, on ne saurait mieux définir la double réussite du romancier russe. C'est avec un réalisme parfait qu'il décrit la mentalité de ces petites gens de Russie dont il emportera le souvenir dans son exil en France. Mais à travers les pittoresques mésaventures de son personnage, il montre aussi que rien de ce que rencontrent les humbles ne les délivre des interrogations les plus graves. Et puis, quel témoignage sur la vie moscovite au début du siècle ! Il est bel et bien temps que cet écrivain, maintenu dans l'ombre par les péripéties de l'histoire politique, retrouve l'audience qui lui est due.
Ivan Chmeliov est né en 1870 à Moscou dans une famille de marchands. Garçon ! est son premier roman couronné de succès en 1911. S’il est favorable à la première révolution menée par les mencheviks en février 1917, il s’oppose à celle d’octobre. Réfugié en Crimée, où il souffre de la faim, il se résoudra à l’exil en France après que son fils unique fut fusillé par les bolcheviks en 1923 ; une histoire qu’il relatera dans son œuvre la plus célèbre, Le soleil de la mort. Il demeurera en France jusqu’à sa mort en 1950.
Le narrateur habite avec sa femme, ses deux enfants et deux locataires dans un appartement de Moscou ; il est serveur dans un restaurant.
Le roman ouvre ainsi sur plusieurs fenêtres : la haute société et ses habitudes parfois répréhensibles, les agitations de l’époque (le récit se passe en 1905, la période de la première révolution russe, dans laquelle Koliouchka, le fils de notre serveur, sera impliqué), la condition modeste des employés. On s’attache à la personnalité du « garçon » , Skorokhodov, qui devra faire face aux vicissitudes de l’histoire et les acceptera avec courage, sans chercher à se rebeller, pétri par la foi et le sentiment que toutes les épreuves ont un sens.
Le style de Chmeliov nous rend perceptible avec beaucoup d’acuité l’ambiance du restaurant, la vie des gens, leur caractère. Une belle introduction à l’œuvre de Chmeliov, malheureusement peu traduite en français.
Plus d'informations sur : https://evabouquine.wordpress.com/2016/11/01/ivan-chmeliov-garcon/
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