Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Un trentenaire désabusé traîne son spleen à La Havane, entre son bureau et le Malecón... L'espoir se fait rare, la vie est un disque rayé. Rhum, salsa, tabac, et parfois un détour chez la Russe du neuvième étage. Il fait une chaleur criminelle et la révolution semble s'être oubliée au milieu du gué.
Seule la mer, au loin, promet encore quelque chose...
Canek Sánchez Guevara, petit-fils du Che, fait vibrer Cuba comme jamais : le désenchantement s'écrit dans une langue intense, hypnotique, et la crise des balsas est prétexte à un formidable hymne à la liberté.
Né à La Havane en 1974 et décédé en 2016, Canek Sanchez Guevara était le petit-fils du Che.
Artiste libertaire, il a écrit "33 Révolutions", son unique roman, comme trente-trois photographies ou trente-trois pages d'un journal : de petits textes sur la vie quotidienne, l'apathie d'un peuple qui n'a plus d'espoir.
Cuba est comme "un disque rayé", on y entend toujours les mêmes paroles officielles et les mêmes silences.
Tout s'effondre, les murs des maisons comme les idées politiques.
Le narrateur travaille dans un ministère, où règne l'ennui : ses seules occupations consistant à faire des photocopies, à tamponner des circulaires, à attendre l'heure du déjeuner puis celle du départ.
Quand à sa vie personnelle, elle se réduit à boire du rhum frelaté, à flâner sur le Malecon pour regarder la mer, aussi infranchissable qu'un mur de barbelés. Et pourtant, les jeunes cubains sont prêts à la traverser cette mer, au péril de leur vie, sur des radeaux de fortune. L'espoir s'appelle la Floride (les Etats-Unis d'Amérique).
Canek Sanchez Guevara le sait : "Il n'y a rien de positif à attendre d'aujourd'hui. Dans les jours pareils, la vie lui semble ..... un traité de l'inutile et du superflu, et il marche lentement, les yeux rivés au sol, avec l'envie de tomber dans le caniveau et de mourir écrasé par l'habitude."
Dans "33 Révolutions", on entend les télévisons qui diffusent les telenovelas et l'on sent l'humidité poisseuse de La Havane. Quant à la politique, elle est morte depuis longtemps, et ne survit que dans le disque rayé d'une lointaine et historique révolution cubaine.
C’est une première fois entre la littérature cubaine et moi: une quatrième de couverture plutôt alléchante, un paumé qui s’arrose d’alcool pour noyer sa routine quotidienne, un type perdu qui s’égare. Oui, mais après? Que reste-t-il d’une lecture comme celle-ci? Assez peu de choses à mon sens. Peut-être quelques phrases ayant la beauté et la tristesse des illusions perdues tout au plus, mais subsiste l’impression plus forte d’avoir vite lu ce titre en n’en gardant que quelques vapeurs alcoolisées. Alors certes, le nom de l’auteur ne laisse pas indifférent et éveille les curiosités, on se demande quelle sera la plume du petit-fils du si célèbre Che Guevara. Rien de particulièrement singulier, rien d’étonnamment transcendant. Et pourtant, quand on sait que ce roman sera un éternel premier roman, on est tenté de s’interroger sur la fragilité de ce héros perdu qui laisse probablement transparaître, entre les lignes, celle de son auteur.
Chronique complète: https://aumilieudeslivres.wordpress.com/2016/09/02/33-revolutions-canek-sanchez-guevara/
Lien : http://livresselitteraire.blogspot.fr/2016/11/33-revolutions-canek-sanchez-guevara.html
« Il s'assied au comptoir, commande un rhum, allume une cigarette et laisse errer ses pensées : l'univers est un disque rayé, qui échappe totalement à la relativité ou à la physique quantique, plein de sillons où se déroule cette vie de poussière cosmique, de graisse industrielle et de goudron quotidien. Il boit une longue gorgée, se racle la gorge et penche la tête, écœuré et reconnaissant.
Le rhum est l'espoir du peuple, se dit-il. »
A travers un personnage dont on ne connaît pas l’identité, Canek Sánchez Guevara nous joue la musique du disque rayé de la vie cubaine. 33 chapitres qui offrent au lecteur toute la réalité d’un pays, les rêves et le désenchantement d’un peuple.
Son personnage a la trentaine et est torturé par la monotonie de la vie qu’il mène sur l’île. Son quotidien se résume au boulot, à l'alcool, aux clopes et dodo. Il n’a pas cet esprit de révolution que d’autres peuvent avoir, il regarde, simplement, l’ironie de cette vie cubaine. Puis petit à petit, les gens vont tenter de fuir sur des radeaux de fortune la dictature instaurée. C’est à ce moment là du récit que l'effervescence va naître et que ce trentenaire va peu à peu cesser d’être observateur.
Un roman par le petit-fils du Che ça peut surprendre, laisser perplexe et pourtant on l’oublie bien vite lorsque l’on démarre les premières pages de ces 33 révolutions car ici il n'est pas question d'un réel esprit de révolution. Canek Sánchez construit son récit autour de ce qu’il appelle le disque rayé tel un 33 tours où l’espérance est utopique, où les conditions de vie ne font pas rêver les touristes que nous pourrions être. Exit les plages paradisiaques, les façades colorées... L’auteur nous dresse là, à travers cette fiction, la sombre réalité de ce qu’a été Cuba durant la dictature de celui qui est appelé le « vieux » (comprenons Fidel Castro). Et pourtant on se sent habité par La Havane, par l’odeur humide de la rue, le cigare, le rhum. On sent la chaleur de la salsa passer dans nos veines, on pourrait presque en transpirer.
33 révolutions c’est 82 pages, 33 chapitres, 33 toiles de vie peintes où la mélancolie et la noirceur sont de mises à travers une écriture concise, précise et poétique débouchant sur un message d’espoir et de liberté car au bout de la privation il y a la mer « attirante comme l’infini ».
Et après ces quelques 80 pages, l’éditeur a eu la très bonne idée de mettre quelques textes, interviews liés à l’auteur pour compléter la lecture et ainsi comprendre un peu mieux quel homme était Canek Sánchez Guevara, décédé en janvier 2015. 33 révolutions est ainsi le premier et dernier roman du petit-fils du Che. Dommage car après une telle lecture, on aurait envie de le voir publier d’autres romans.
https://bruitdepapier.wordpress.com/2016/11/06/33-revolutions-canek-sanchez-guevara/
33 REVELATIONS
Canek Sanchez Guevara
Editions Métailié
(nouvelles plumes 2016)
83 p + un extrait de son livre « Les héritiers du Che » et l’entretien avec le journaliste Daniel Pinos du Monde Libertaire de novembre 2005
L’auteur
Né en 1974 à La Havane et mort en 2015 à Mexico dès suites d’une opération du cœur. Petit-fils de Che Guevara, élevé en partie à Cuba puis au Mexique , en passant par l’Europe, suivant ses parents militants de gauche au cours de leurs fuites et exils.
Ecrivain, musicien de rock et graphiste talentueux, c’était un anarchiste, totalement rebelle à la révolution, critique féroce des tenants du régime, des militaires et de la bourgeoisie socialiste qui n’ont jamais accepté de voir l’héritier du Che s’opposer à eux.
Il dénonce les injustices apportées par la révolution qui a fait naître une nouvelle bourgeoisie socialiste faussement prolétarienne et un système répressif et anti-démocratique. Il a fui l’île en raison de la « criminalisation de la différence au moyen de la persécution des homosexuels, des hippies, des libres-penseurs, des syndicalistes et des poètes. Il considère « le Vieux » (Fidel Castro) comme un traître aux idéaux révolutionnaires, qui a mis en place un système anti-démocratique et tyrannique, exerçant une surveillance inhumaine sur son peuple et écrasant violemment toute opposition au régime.
Le roman (premier et unique)
Un jeune homme Noir d’une trentaine d’années nous livre ses ressentis et sa lassitude face au déroulement de sa vie cubaine. Il s’est découvert une passion pour la lecture et la musique. Il a divorcé. En lui existe un total décalage entre des aspirations et la vie qu’il est contraint de mener.
Tout est «disque rayé » ; comme un leitmotiv, cette expression revient tout au long du livre ; tout est répétition à l’infini, répétition de la noirceur, de la dégradation de chaque chose et de la décadence jusqu’à extinction totale des êtres et des choses.
Extraits : « le pays entier est un disque rayé (tout se répète : chaque our est la répétition du précédent, chaque semaine, chaque mois, chaque année ; et, de répétition en répétition, le son se dégrad jusqu’à n’être plus qu’une vague évocation méconnaissable de l’enregistrement : « De la boue. De la crasse, encore de la crasse. Un disque rayé et crasseux. Des millions de disques rayés et crasseux. La vie tout entière n’est qu’un disque rayé et crasseux. Répétition sur répétition du disque rayé du temps et de la crasse. »
Ces extraits en introduction au livre nous plongent au cœur de l’extrême lassitude et de l’écoeurement absolu du peuple cubain. Se suivent 33 chapitres (33 révolutions) dans lesquels l’auteur évoque le travail (avec la photo obligatoire du dirigeant), la nourriture (le plateau avec le cercle de potage, le carré de riz, le rectangle de patate douce), la vie dans la rue, le rhum frelaté, la résistance à la solitude et à l’isolement quotidien, la survivance dans la répétition, les cauchemars… jusqu’à la rencontre avec un groupe de jeunes face à la mer, tentant de fuir sur un radeau de fortune.
Il va voir un médecin et ami et lui demande un arrêt de travail. Pendant ces quelques jours de repos, un « bateau coule » ; la presse s’en empare ; il refuse de dénoncer au Parti « tout événement échappant aux normes établies ». Il est mis sous surveillance ; le désespoir le prend à la gorge ; il passe ses journées à photographier le bord de mer et ceux qui s’enfuient… jusqu’au jour où, pellicules en main ( valeur monnayable pour les Américains lui semble-t-il), il franchit le pas et embarque sur un radeau. A la 33ème révolution, le radeau coule…
Mon avis
Un très court et très dense roman ; l’art de la concision et de l’image ; on est immédiatement immergé dans cette atmosphère glauque et moite, on ressent le vide, l’absence de tout, la décadence que l’auteur donne à voir sans description ostentatoire, sans débordement. On a peine à espérer avec lui et avec les jeunes fuyards…. L’univers s’ouvre pour eux dans une partie de leur esprit, l’autre partie restant désespérément prisonnière d’un dénouement presque inévitable. L’interview finale de l’auteur nous livre la réalité de la vie Cubaine, l’émergence des contre-cultures malgré les efforts du gouvernement pour s’y opposer, la position que devrait adopter la gauche internationale si elle était solidaire du peuple Cubain (répudier la dictature). Pour lui « le socialisme n’est pas un édifice qui doit se construire. Il doit s’apparenter à un organisme vivant, composé de millions de cellules (les individus) qui se développent. » « Le fidélisme va mourir parce que la société ne va plus accepter un modèle unique, et parce qu’il n’y a personne dans la sphère castriste qui ait la capacité de cohésion qu’a Fidel Castro ».
https://unepauselitteraire.com/2016/08/25/33-revolutions-de-canek-sanchez-guevara/
Un nom peut vite se révéler être un poids, un fardeau que l’on traîne inlassablement, un fantôme des exploits passés. Et c’est un peu contre ce nom que s’est battu, sa vie durant, Canek Sánchez Guevara, lui le petit-fils du Che. Un combat qui s’est tragiquement terminé par une victime. Car, forcément, la mort n’est jamais loin, prédatrice rôdant inlassablement et, à défaut de pouvoir se détacher du poids de la célébrité de son aïeul et de ce que l’on attendait de lui, « le petit-fils du t-shirt », comme il était surnommé, opposant au régime castriste, a trouvé la mort des suites d’une opération du cœur, en janvier 25 à Mexico. Publié à titre posthume, son seul et unique roman, 33 révolutions, qui paraît aux éditions Métailié, ne peut s’empêcher d’avoir la saveur amère du testament politique.
La Ville des Colonnes en arrière plan, d’ordinaire si chantante et rythmée par les accords de musique, ici triste et silencieuse, le lecteur déambule en compagnie du personnage principal, un anonyme parmi tant d’autres, déjà la trentaine d’une vie passée à répéter, infatigablement, la doctrine castriste. Mélancolique et désabusé, l’individu est un homme de couleur, à la peau noire, amateur de photographie dont il cherche à saisir le quotidien d’une ville, d’un pays qui a en permanence la gueule de bois. La vie est rythmée par les tempêtes tropicales, par les cubains qui tentent de rallier le continent et par un détour chez la Russe qui habite au neuvième étage de son immeuble, tenté d’y chercher un peu de confort. Mais une chose ne fonctionne pas : il y a forcément une rayure sur le disque qui tourne sans discontinuer, une marque, une brèche qui se répercute sur la société cubaine.
Dès les premiers mots, les premières lignes, la simplicité du langage, cette écriture épurée et mélancolie frappe le lecteur qui en ressort avec l’impression d’avoir lu un grand livre, de ceux qui deviendront forcément des classiques. Loin de présenter cette image de carte postale qui sied si bien à La Havane, Canek Sánchez Guevara décrit un pays qui se réveille au lendemain d’une fête et qui découvre l’étendu des dégâts. Désabusés, ils ne croient plus aux illusions, aux rêves vendus par le Parti communiste de Cuba et par ses dirigeants. L’auteur emploie alors l’image de ce disque rayé, image omniprésente, tout comme la musique est une composante de la population cubaine : une musique forcément enjouée qui n’invoque ici, pour le lecteur, que le silence.
Un silence qui se manifeste par le peu de dialogue que comporte l’ouvrage, préférant jouer la carte du récit contemplatif nourri de non-dits. Car ce disque rayé, qui représente aisément le régime cubain, s’efforce de paraître normal, efficace pour la population : « je vis sur un disque rayé […] qui tous les jours se raye un peu plus. La répétition endort » [page 19] se dit le personnage principal, qui cherche à comprendre pourquoi la population s’enlise dans une sorte d’image d’Épinal, faite de rhum, de cigare et de musique, qui composent, à eux seuls, « le disque rayé de la culture nationale » [page 22].
La population, désabusée, immobile, n’est que le reflet d’une crise politique majeure qui s’étend à toutes les ramifications de la société, comme en démontre l’une des scènes les plus saisissantes de l’ouvrage, celle où le personnage principal, se mettant à courir, se retrouve interpellé par des policiers, trouvant suspect qu’un homme noir court. Ce racisme, qui court-circuite le fonctionnement de la police et qui gangrène la société, est plus qu’un reflet de notre époque, c’est même un aperçu d’un malaise social d’ordre mondial. Mais on retrouve aussi la peur des arrestations arbitraires, mêlée à l’inquiétude qui avait prise et qui minait la vie des habitants de l’ex-URSS. Le résultat est une population aux aboies, qui tend vers la fuite ou, comme l’écrit fabuleusement l’auteur, ils prennent part à l’odyssée, une épopée mythique où un Ulysse perdu et hébété n’est plus à la recherche de son domicile, mais d’une vie meilleure, non pas faites d’idéaux, mais de liberté et de vérité.
33 révolutions trouve un écho particulier auprès du lecteur, notamment lorsque les médias montrent des images d’une île célébrant, le 13 août, les 90 ans de son ancien leader historique, Fidel Castro. Fait de 33 petits chapitres, rappelant les vinyles 33 tours et cette image du disque rayé, Canek Sánchez Guevara signe là un ouvrage engagé et empli de poésie, dont la lecture est littéralement hypnotique avec, pour seul horizon, cette mer contradictoire, à la fois dangereuse et pleine de promesses. Un formidable ouvrage dans lequel se dessine, en filigrane, le mot Liberté.
https://unepauselitteraire.com/2016/08/25/33-revolutions-de-canek-sanchez-guevara/
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