Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Le (grand) Raimu avait imposé de jouer César alors qu’il était pressenti pour un autre rôle. Après les films de la trilogie, et les écrits de Pagnol, Eric Stoffel (que je remercie au passage pour sa dédicace crayonnée de César … car il manie aussi le crayon !) est à la manœuvre pour adapter avec efficacité l’œuvre de Pagnol.
Cette adaptation de « César » en BD est une réussite en restant fidèle à l’esprit de Pagnol et de l’œuvre tout en apportant sa nouveauté (graphisme, coloration … avec une exigence élevée en ayant reproduit certains lieux, bateaux, etc. en 3 D pour être le plus fidèle possible à ces références emblématiques ; et particulièrement Marseille dans le rendu de la BD.
Car il y a bien Marseille, une Marseille resplendissante et fidèle (et quand on y vit une grande partie de l’année, on y est d’autant plus sensible) ; c’est bien le « quatrième tiers » de la trilogie ! (*)
On ne parlera pas de l’histoire tellement elle est connue ; et si tel n’est pas le cas, alors c’est une bonne occasion pour (re)lire Pagnol (et voir qu’il est plus profond et sensible que ce que certains pourraient parfois lui reprocher) et / ou découvrir son univers dans cette série.
(*) Pour ceux que ça intéresserait, dans Marius, César donne la recette du « picon-citron-curaçao » : « Tu mets d’abord un tiers de curaçao. Fais attention : un tout petit tiers. Bon. Maintenant, un tiers de citron. Un peu plus gros. Bon. Ensuite, un BON tiers de Picon. Regarde la couleur. Regarde comme c’est joli. Et à la fin, un GRAND tiers d’eau. »
Hiver 1910, la Seine submerge la capitale, c’est la grande crue. Tout remonte à la surface, les rats, les passions, les vieux démons et les cadavres.
Le corps d’une femme atrocement mutilée et démembrée est retrouvé dans une malle flottant au fil de l’eau. Ange Leca, journaliste enquêteur corse, accompagné de son fidèle chien Clémenceau vient d’être mis à la porte de son journal pour alcoolisme. Il est accros à la « fée verte » l’absinthe, opiomane abstinent et volage, il est l’amant d’une femme mariée. Ange se lance dans l’enquête afin de pouvoir identifier ce cadavre mystérieux, mais ce qu’il ne sait pas encore, est que son enquête va toucher sa vie privée.
L’année dernière, Pelaez et Chabert, dans cette même collection « Grand Angle » nous offraient également avec « Automne en Baie de Somme » un polar d’époque et d’ambiance. Avec « Ange Leca » nous sommes projetés vingt ans plus tard et nous sommes immergés dans l’époque post Mucha au moment où la Seine déborde et inonde de nombreux quartiers de Paris. Victor Lepointe dessine ce moment inhabituel et le Paris de la belle époque dans un réalisme surprenant. Les personnages féminins avec leurs grandes tenues, et même sans, sont tout en grâce et en élégance. Le dessin, d’une grande finesse est abouti. Hormis quelques planches, il reste dans une ambiance grisâtre correspondant au mauvais temps et à l’enquête malsaine pour laquelle il va graphiquement très loin.
Les scénaristes se sont inspirés des grandes figures de cette époque pour créer l’intrigue. Nous retrouvons Docteur Paul, médecin légiste qui interviendra lors des plus grands procès de l’époque tels ceux de Landru, Petiot, Bonnot. Mais également Marie-François Goron, chef de la Sureté, ici devenu détective après son départ à la retraite. Sans oublier Raoul de Vaux dit « le Baron Perché » et Jules Lévy libraire et éditeur parisien, noctambule avéré. L’histoire colle également aux affaires de l’époque où de nombreux cadavres de femmes démembrées furent retrouvés. Enfin, les personnages féminins sont inspirés des « demi-mondaines » ou « grandes horizontales », telles « La belle Otero » ou « La Païva », ces reines des nuits parisiennes, belles et intelligentes qui étaient entretenues par des hommes souvent mariés, suffisamment riches pour subvenir aux besoins de leur foyer et de leur maîtresse.
Un document de huit pages nous resitue, photos à l’appui, le contexte historique, les personnages évoqués dans l’album et les grandes affaires criminelles de l’époque.
Cet album est destiné aux adultes car les dessins très réalistes pourraient heurter. Annoncé au départ comme un album unique, Victor Lepointe, lors d’une séance de dédicace, m’a averti que la fin abrupte pouvait surprendre mais qu’ une suite était en cours.
La Bande dessinée Ange Leca raconte une enquête autour d’un meurtre sordide au temps de la Belle Epoque. Un journaliste spécialiste des faits divers s’improvise détective et c’est très réussi.
Lors de la grande crue de 1910, Ange Leca finit une nuit très alcoolisée dans le lit de sa maîtresse, espérant que le mari sera retenu en raison des événements climatiques. En rentrant chez lui, à l’aide des pompiers et de leur barque, ceux-ci lui parlent de cadavres qui remontent et notamment celui d’une femme non identifiée, horriblement mutilée. L’enquête d’Ange Leca commence !
L’attrait de cette BD ne se situe pas forcément dans l’intrigue, en fait plutôt assez peu probable. Ce sont les illustrations et l’ambiance qui est savoureuse. Le contexte historique est respecté avec attention et documentation.
Tom Graffin, auteur d’un premier roman adapté en BD, et Jérome Robert, enseignant féru de criminologie et de l’époque victorienne, se sont associés pour écrire son scénario. Victor Lepointe s’est chargé des illustrations et de la colorisation.
À la fin, quelques pages pour replacer l’histoire dans la grande et les personnages dans une réalité ! Intéressant !
Ange Leca est à découvrir pour son univers et la qualité de son graphisme. Une bande dessinée historique à l’allure de polar assez réussie.
Certainement, le début d’une série !
Suite de la chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2023/08/04/ange-leca/
« ANGE LECA » de Tom Graffin et Jérôme Ropert au scénario et Victor Lepointe à la palette graphique se déroule à Paris en 1910 au moment de la grande crue de la Seine. Un journaliste corse exilé dans la capitale, Ange Leca, découvre fortuitement un abominable crime et va s’improviser enquêteur sans se douter que cette affaire pourrait bien concerner certains de ses proches …
L’intrigue ne déparerait pas dans la série « Paris Police » écrite par Fabien Nury puisque l’histoire commence aussi par la découverte d’une « malle sanglante et qu’ on y trouve de même, au milieu des personnages de fiction, des personnes ayant réellement existé.
Comme la Seine en sortant de son lit fait remonter à la surface ce qu’on a voulu y enfouir - la fameuse malle - l’album va écorner l’image de papier glacé qu’on a de la Belle Epoque et nous en montrer l’âpre réalité.
Graffin a longtemps œuvré comme biographe familial et est habitué à travailler sur faits réels tout en les mettant en scène pour susciter l’intérêt. Ropert, quant à lui, passionné de criminologie et de l’époque victorienne, est co-scénariste du jeu de plateau « Sherlock Holmes détective conseil ». L’album est donc étayé par une solide documentation comme le souligne le bienvenu cahier historique final. La fin, aussi frustrante pour le lecteur qu’elle puisse être, transcrit aussi parfaitement la réalité de l’époque : les crimes n’étaient souvent pas élucidés et les tueurs de filles ou de demi-mondaines jouissaient d’une certaine impunité …
Le « sfumato » de Lapointe crée également une atmosphère fantastique. On a l’impression parfois que le héros évolue dans le monde des morts et Paris se pare alors des couleurs de ses cauchemars. Ce côté mortifère de la Capitale est d’autant plus souligné par le contraste établi entre ces pages en gris bleuté et celles, lumineuses, consacrées à l’île de Beauté.
Ce talent graphique est pour moi la plus belle découverte d’un album à l’intrigue classique ; le héros est également intéressant à cause de ses failles. On se prend à rêver que ce journaliste romantique revienne dans un nouvel opus.
Chronique complète sur notre blog www.bulles2dupondt.fr
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