Lara entame un stage en psychiatrie d’addictologie, en vue d’ouvrir ensuite une structure d’accueil pour jeunes en situation d’addiction au numérique...
Kiara a 17 ans. Son frère Marcus est l’aîné mais ne fait rien pour l’aider. Ils habitent un immeuble d’East Oakland, il faut payer le loyer et vivre. Depuis que leur père est décédé, et que leur mère en maison de redressement, la vie est compliquée pour ces deux adolescents.
Il y a aussi l’adorable Trevor, ce petit voisin dont Kiara s’occupe et qui est aussi démuni qu’eux. Sa mère est partie on ne sait où mais le petit bout de chou reste seul et arrive à survivre grâce à Kiara.
Heureusement elle trouve à travailler quelques heures dans un bar. Mais ça ne suffit pas. Malgré la présence de Alé, son amie qui tente de lui procurer quelques heures de travail et est toujours présente pour la soutenir.
Dans sa vie, il y a aussi Shauna et son bébé, qu’elle a eu avec Cole, celui qui fait de la musique avec Marcus.
Marcus rêve de devenir comme son oncle Ty, ce dernier a réussi dans la musique et les a tous laissés tomber.
Puis un soir il y a la rencontre avec Camilla… Les sorties, les hommes qui paient pour quelques minutes de son corps, une lumière au bout du tunnel dans lequel Kiara est embarquée.
Jusqu’au jour où elle se fait arrêter par les policiers véreux de sa ville.
Elle n’a qu’une solution, leur obéir si elle ne veut pas finir en prison comme sa mère.
Tout s’arrête lorsque le trafic de ces policiers est découvert.
Avocat, audition du grand jury, son nom jeté en pâture, son frère arrêté et jeté en prison, son logeur qui menace de la jeter à la rue, les services sociaux qui veulent prendre Trevor, elle va devoir tout affronter seule dans la solitude et la douleur, dans le doute et la honte, dans les menaces et les craintes.
Une histoire pas toujours évidente à écouter, sombre et déprimante. Mais par contre Amélia Ewu a une voix totalement adaptée au récit, jeune, vivante, qui nous fait bien ressentir tous les sentiments qui assaillent Kiara tout au long de son chemin pour survivre et faire vivre ceux dont elle a endossé la responsabilité, abandonnée par une mère en prison et un oncle en fuite pour vivre sous de meilleurs cieux.
https://domiclire.wordpress.com/2024/06/25/arpenter-la-nuit-leila-mottley/
Elle utilise plusieurs pseudo, prénoms, diminutifs : Kiara ? Kia Host ? Ki Johnson ? Qui réussira-t-elle à être en société, avec ses proches, dans l'intimité, dans les chambres d'hôtels, les voitures, les trottoirs qu'elle arpente ?
Adolescente Noire abandonnée, malchanceuse, livrée à elle même pour payer le loyer et la nourriture pour elle, son grand frère de sang, Marcus et son petit frère de cœur, Trevor, elle n'est qu'une enfant lorsqu'un inconnu lui propose de l'argent contre un rapport sexuel. L'engrenage est enclenché, et c'est TOUT sauf de "l'argent facile" qu'elle se fait. Happée par les bas-fonds d'Oakland, elle finit par être enrôlée par un groupe de flics, qui lui promettent leur protection en échange de sexe.
Tous les éléments sont réunis pour faire sombrer Ki, Kiara et Kia dans l'enfer de la prostitution des mineurs. "Rien à craindre, tout à plaindre."
Il m'a fallu du temps pour entrer dans l'histoire et m'attacher à Ki. Il faut dire que malgré ses confidences à la première personne, elle érige de hautes barrières pour ne pas être atteinte... Seul Trevor perce parfois sa cuirasse. J'ai été particulièrement touchée par cette relation étrange et intense qui lie Ki à son voisin Trévor, comme s'il était le petit frère qu'elle n'a pas pu avoir, le petit être qu'elle aurait aimé protéger et qu'elle voudrait sauver.
Même Alé, la meilleure pote de toujours, la complice d'enterrement, la femme chérie et nourricière qui se substitue à la figure parentale... même Alé finit par baisser les bras, pour des raisons aussi respectables que compréhensibles. Lorsque Ki se retrouve absolument seule face au gouffre qui l'aspire, c'est toute la misère du monde qui nous tombe sous les yeux.
Parmi les nombreux thèmes abordés, je retiendrai évidemment : la prostitution des mineurs, le système judiciaire et carcéral états-uniens, l'adolescence et son lot de questions, les deuils (directs ou par procuration, réels ou symboliques...), et l'importance de l'amitié lorsque la famille fait naufrage. "[...]au-delà des mots, au-delà de ce moment, au-delà de ce que nos parents ont fait de nous quand ils nous ont laissés complètement brisés."
Leila Mottley nous plonge dans la tête de Ki, en s'appropriant le langage et le phrasé des adolescentes américaines. L'écriture n'est donc pas soutenue, et pourtant, on sent qu'elle est travaillée, précise et totalement adaptée au contexte, volontairement complexe et flou. Le style est direct, percutant, aussi froid que les rebords des trottoirs, aussi sombre que la nuit. Ce sont des personnages qu'émergent les émotions. La construction du roman n'est pas linéaire et Ki ne dévoile pas si facilement son histoire familiale, oscillant sans arrêt entre déconstruction et construction, justement. La description du passé chaotique de la famille Johnson est distillé petit à petit, erreurs après horreurs, comme dans un témoignage partiel et partial, ou comme dans une enquête... Cela m'a paru un peu long et brouillon par moment - au début surtout - mais finalement, cette déstabilisation du lectorat est tout à fait cohérente avec le personnage et son histoire. Les notes de l'autrice en fin de livre rappellent que cette fiction est basée sur des faits réels, des personnes et des contextes aussi effrayants que révoltants.
Tout en s'inspirant d'un fait divers survenu à Oakland en 2015 - une sombre histoire d'abus de pouvoir mettant en cause des policiers accusés d'exploitation sexuelle de jeunes femmes noires - Leila Mottley fait le choix de la fiction avec « Arpenter la nuit » pour aborder les thématiques difficiles que sont la prostitution, la corruption ou encore le racisme. Toujours autant d'actualité.
C'est en compagnie de Kiara Johnson, une jeune afro-américaine de dix-sept ans, que le lecteur va ”arpenter la nuit” - même en plein jour - dans les rues d'East Oakland en Californie. Depuis le décès de son père et l'emprisonnement de sa mère, elle vit seule avec son frère Marcus dans un quartier déshérité avec vue sur une piscine où flottent des merdes de chien... le décor est posé dès les premières pages.
Comme son grand frère passe ses journées à rapper en studio dans l'espoir de devenir aussi célèbre que leur oncle Ty, c'est à elle de se démener pour payer le loyer de leur appartement. L'augmentation de ce dernier combiné aux nombreux refus d'embauches vont pousser l'adolescente vers l'argent facile de la prostitution… le début d'une longue descente aux enfers, surtout lorsque les flics s'en mêlent !
On est tout de suite frappé par la plume de l'auteure : il y a un rythme très particulier, une écriture d'une poésie indéniable… Et ce, même lorsqu'il s'agit de rapporter les horreurs vécues par sa jeune héroïne Kiara. Toutes ces qualités littéraires sont d'autant plus bluffantes quand on apprend dans les notes finales que Leila Mottley n'avait que 17 ans lorsqu'elle a démarré la rédaction de ce roman.
À travers la voix de Kiara, la primo-romancière américaine nous transporte dans les bas-fonds d'Oakland, dans ses hôtels miteux, dans la « piscine à crottes » de l'immeuble où vit la narratrice. Grâce à cette multitude de détails, l'auteure réussit à installer une atmosphère très singulière. Une ambiance qui peut paraître parfois glauque, sordide et déprimante. Et pourtant, la lumière et l'espoir arrivent malgré tout dans ce récit, et notamment par la force de ses personnages.
Quelle force dans le personnage de Kiara ! Elle impressionne par le dévouement qu'elle porte pour Trevor et cette force pour l'élever seule, sa détermination à porter à bout de bras une famille disloquée, sans jamais se plaindre sur son sort. Kiara est une héroïne qui marquera indéniablement le lecteur et qui restera dans son esprit pour un bon bout de temps.
Malgré tout, on ne peut s'empêcher de regretter quelques excès dans la description des personnages secondaires : on referme ce bouquin avec le sentiment que tous les flics sont soit violeurs, soit pourris et corrompus, soit stupides. Tous les blancs sont soit méchants, soit ils ne comprennent rien. Et tous les hommes sont des abrutis, pervers ou des incapables. Et très souvent tout ça à la fois. Il n'y a pas de demi-mesure ! Si c'est indéniable que cela existe et que la littérature est le meilleur moyen de les dénoncer, cela semble trop marqué ici, comme si un peu de nuances allait affaiblir la portée du récit. Ce qui n'aurait pas du tout été le cas.
Toujours est-il qu'on ne peut s'empêcher de faire un lien entre la personnalité de la narratrice et l'écrivaine (surtout eu égard au jeune âge de Leila Mottley). On devine ici sa volonté de dénoncer et exorciser des traumatismes personnels. Une courte postface de l'auteure explique d'ailleurs comment elle s'est inspirée de ce fait réel survenu à Oakland en 2015.
On remarquera que le titre « Arpenter la nuit » met l'accent sur le fait de survivre, comme une proie dans l'obscurité, entourée de prédateurs (« Il y a énormément de façons de marcher dans la rue et moi je suis juste une fille recouverte de chair. »).
Un premier roman qui mérite très amplement d'être découvert, lu et apprécié pour la force des thématiques abordées et pour une galerie de personnages tous autant marquants les uns que les autres, malgré quelques clichés, amalgames et raccourcis. Tout cela, laisse augurer une belle carrière à cette jeune écrivaine.
Un livre que j'ai eu l'occasion de découvrir en avant première de la rentrée littéraire 2022. Premier roman de Leila Mottley.
Jolie coup de coeur en refermant les pages de cet ouvrage, l'autrice s'inspire de faits réelles autour des évènements de 2015 après le suicide d'un policier qui dénoncer la corruption dans les services, elle dresse le portrait d’East Oakland, le quartier, la communauté, les habitants. Pauvreté, misère social, crime, prostitution, violence, nous suivons Kiara au travers ses déambulations et ses réflexions.
Kiara est un personnages attachants, elle a du charisme malgré les souffrances, les humiliations et la violence subit.
Même si le récit est sombre, glauque et oppressant la notion de famille et d'amour est importante.
Une histoire déchirante dont on ne ressort pas indemne, ce premier roman est en course pour le prix des lecteurs 2024 le livre de poche.
Je vous conseille vivement de découvrir cette histoire.
"Et pourtant ça ne me dérangerait pas de me noyer, vu qu’après tout on est composés d’eau. Ce serait un peu comme si mon corps se mettait à déborder. Je crois que je préférerais mourir comme ça plutôt qu’en tombant dans les vapes sur le sol d’un appartement crasseux, avec le cœur qui s’emballe et puis qui s’arrête d’un coup."
"Comment dit-on à un petit garçon qu'il est tout seul ? Il n'existe aucune bonne manière d'expliquer ce type de solitude, celle qui prend racine dans l'estomac, qui nous fait croire qu'il y a un truc caché dans notre chair et que c'est à cause de ce truc que le monde entier nous tourne le dos."
"Une mort rapide qu'on a trouvée particulièrement lente.
C'était un soulagement quand ça s'est terminé, quatre ans après sa sortie de Saint-Quentin, et on a enfin pu arrêter de se réveiller en pleine nuit avec la certitude qu'on allait le retrouver tout froid dans son lit. Le jour de son enterrement, j'étais trop fatiguée pour me soucier de porter du noir, et une partie de moi aurait préféré rester loin de tout ça comme mon frère. La mort, c'est plus facile à vivre quand on ne la voit pas."
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