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Partir sans hasard, besace d’incertitudes. Essentiel, sociologique, intime « Va-t’en, va-t’en, c’est mieux pour tout le monde » est une échappée manichéenne. Christophe Grossi en l’occurrence le narrateur, dévoile chaque jour le tracé de ses heures. Asphalte dévorante et imprévisible sur les routes de France. Ce récit est aussi une échappée intérieure. Détournant les distances, tel un pêcheur glissant son filet sous les eaux, mailles émancipatrices, les mouvements de la vie, ses interrogations, ses doutes et écueils sont pris au piège. Remontées des eaux, kilomètres carnivores, Christophe Grossi démêle les nœuds. Observe. Les champs intérieurs, les rencontres professionnelles, libraires attentifs, réceptifs, doués de cette indépendance. Christophe Grossi est là. Sur le seuil de chaque étape, pas de côté, l’écologie de la littérature dans ses bras, porteur de raison et d’authenticité et de glorification du travail. Dire, prouver aux frileux la formidable opportunité d’une visite, Babel littéraire. Détourner le Rocher de Sisyphe, prouver l’importance du fragile, du moins, et du summum éditorial, signature d’indépendance. Mais voilà, Christophe Grossi est romantique, en proie aux tourments, ses écarts sur les routes, figés par de splendides photographies de Nathalie Jungerman signent la dualité dévorante. Des rencontres riches, piliers, librairies, fronton d’hospitalité, d’autres aux diktats avérés. Des ombres sur les bords de route, autant de rappels des mains aimées et dont chaque volupté est nostalgie. Des sourires effacés, lignes blanches en continue, disparues. Ce temps de route, de destinée initiatique, sont porteurs car empreints d’épreuves. Ce récit où la croisée des chemins est un but pour Christophe Grossi est touchant car sincère. Diffuser un livre, donner à voir, sentir, aimer, plus qu’un challenge c’est une conviction absolue. Ne pas flancher sous la folie d’un système qui est certes le géant mais le pauvre des cœurs et du réel littéraire. « Va-t’en, va-t’en, c’est mieux pour tout le monde » est un cri de guerre (pacifique). Un écrin de tendresse et de foi en l’homme et en la vie. Une vocation révélée. Publié par les Editions Publie.Net.
Transcendant « La ville soûle » est un grand livre. Millénaire à l’aube née, épiphanie tremblante de beauté. Bouleversant, dans cet espace-monde où la ville palpite à l’instar d’un périple dans le désert où règne l’impalpable et les murmures des intériorités. L’homme marche, glane, ses poches gorgées de mots sable-glaise, Babel en délivrance. Tout est si lumineux dans « La ville soûle ». Des fragments puisés dans le puits des certitudes où les regards régénérants invitent à la générosité des expressions vierges de non-dits. C’est une ville mappemonde, microcosme, macrocosme d’un monde où chacun (e) trace sa voie. Christophe Grossi n’écrit pas. C’est un sachant. Il est humble. Il accorde au chant littéraire l’espace des grandeurs d’âme. La matière se transforme. Les mots deviennent subrepticement des secrets éclatés. Chaque instant est un sablier renversé face au vent des merveilles alphabétiques. Rester sur le seuil grammatical. Attendre l’heure la plus belle du lever du jour sur cette apothéose. Sous terre, sur terre, les lignes du métro, arborescences poétiques, hédonistes, citadines épures, voûtes vivifiantes qui s’élèvent. Rester, écouter, sentir le passage du langage, arrêt du temps. « Ligne 6 » « Entre Nation et Denfert-Rochereau. » « Ici, chaque matin à quelques minutes près, des corps se collaient coûte que coûte à la vitre. Là-bas les pages étaient offertes au spectre infini des prunelles. Si, près de nous, l’âme étroite se signe au-delà du geste qui rectifie l’arme à l’œil. Tu parleras plus tard des regards aveugles. » « Si près de nous, chaque concession au cimetière est en passe d’être géolocalisée. Tu parleras, plus tard, du nombre de minutes avant le signal. » Les reflets intérieurs d’une ville qui se risque au contre-sens, à ce qui se heurte aux falaises des épreuves. Trame citadine, dans cet espace-temps où, « … croisait dans la vitre ou dans les yeux d’un autre étonné ce qu’il croyait être son double et qui n’était souvent qu’un fantôme, sa propre angoisse incarnée, un reflet. » Christophe Grossi sème sur les rames qui s’emmêlent les chants profonds d’une vérité mise à nue. Plus de bruits, de mouvements, persistent l’ampleur d’une vertu philosophique hors norme. D’une rare contemporanéité, « Combien fouillent le monde dans leurs poches, cachent des valises dans leurs manches, perdent une écharpe, un gant, une douceur, leur temps. » Christophe Grossi prend les chemins de traverse. Cherche les passages les plus vifs, lacérés au cutter des habitus, des aléas, des souffrances intestines. Des passants perdus dans le flou de leurs souvenirs, dans la violence âpre d’un monde qui décroche le dernier wagon, emblème des inégalités, du rejet de l’étrange(er). « La ville soûle », idiosyncrasie de cette modernité qui broie ses bienfaiteurs, ses romantiques, ses assoiffés des certitudes. « Dans ces tiroirs, il y a de quoi répondre de mes traces devant mes semblables. » « Ne nous laissons pas distraire par nos possibles démissions. » « La ville soûle » est un plan de ville à apprendre par cœur. Le lire, c’est vivre. Le retenir c’est comprendre. L’étreindre, c’est renaître. Lisez- le doucement, comme le nectar d’une rencontre avec les destinées allouées Culte. « Ce soir la lumière est belle. » Publié par Les majeures Editions Publie.net Guillaume Vissac. Beau à pleurer.
480 fragments pour peindre la fantastique Italie qui nous fera toujours rêver. La mémoire est un mystère, grâce à elle « une forme d’éternité devient possible ». Les fragments, un peu de magie, sont illustrés par Daniel Schlier et cela nous donne à l’ensemble une dimension hors du commun. Cela peut paraître déstabilisant, mais c’est bien ainsi que se présentent dans le désordre nos souvenirs, s’ils sont nos souvenirs, ou ceux empruntés à la mémoire du temps. Cet ouvrage courageux, édité par une maison d’édition qui prend des risques et les assume, cet ouvrage courageux nous ouvre des portes et nous livre des secrets. Il se lit mot à mot et se déguste. Des mots d’amour et de rêves, de tendres nostalgies qui viennent se poser sur nous comme de petits papillons.
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