Sensible, fine, profonde et déchirée, telle s’impose l’œuvre de Valérie Tong Cuong de livre en livre.
Dans Les Guerres intérieures (Lattès), la question du remords est fouillée avec la grâce implacable qu’on lui connaît et qui lui vaut de figurer parmi les romans préférés de la rentrée sur lecteurs.com.
D’une plume raffinée et sensible, Valérie Tong Cuong confie l’histoire suivante : le 23 Septembre 2017 scelle une surprise inattendue pour Pax Monnier, un comédien en mal de cachets qui voit son rêve le plus fou se réveiller : un célèbre réalisateur américain souhaite lui offrir un petit rôle dans son prochain film. C’est l’euphorie. Il rentre chez lui se changer, et malgré les étranges bruits provenant de l’appartement du dessus, il ne cherche pas à savoir ce qui peut s’y dérouler. C’est son heure de gloire alors forcément il ne peut pas être en retard.
Un an plus tard Pax tombe sous le charme de la sublime Emi, une perfectionniste dans l’âme. Cette rencontre ranime comme une flamme leur quotidien apathique. Puis Emi, lui raconte le drame d’Alex son fils, sauvagement agressé dans son appartement parisien, et les séquelles qu’il en garde. Pax, si bienveillant, en est profondément bouleversé, d’autant qu’il comprend que ce jeune homme était justement son voisin du dessus, cette fameuse journée de septembre. Il veut aider pour se racheter, mais s’enferre dans le labyrinthe de la culpabilité et du remords.
J’aime profondément l’écriture de Valérie Tong Cuong. Elle a réussi, une fois encore, à m’étonner. Ce roman est une plongée au plus profond du paradoxe de l’âme humaine. Je pense qu’en toute objectivité, nous pouvons toutes et tous nous retrouver dans ses personnages, tant ils sont des individus lambda. Comme vous, comme moi-même. Avec nos faiblesses, nos défaillances, nos fragilités, nos doutes, nos peurs, nos passés, nos silences.
En outre, l’un des ingrédients nécessaires à mes yeux, pour que la “mayonnaise littéraire “ prenne, c’est l’empathie que je dois absolument ressentir pour les personnages de l’histoire. Sans cela, j’avoue que j’ai du mal à adhérer et à m’approprier la lecture. Et là, ce fut un strike direct, même si pour l’un d’eux, il m’a fallu un certain temps car il m’est tout d’abord apparu comme un ignoble lâche. Puis, je me suis demandé comment moi, j’aurais réagi, dans une même situation, avec un même enjeu. Qu’aurais-je fait ?
C’est avec intérêt que j’ai suivi Pax se débattre avec un véritable cas de conscience : se taire et empêcher l’identification de l’agresseur, ou parler et risquer de perdre Emi. Les Guerres intérieures sont un roman sur la rédemption, Pax fera tout pour se racheter et effacer sa lâcheté originelle.
J’ai beaucoup aimé le message optimiste porté par ce livre. L’amour comme force pour aller de l’avant, cela pourrait sembler naïf et à la limite de la mièvrerie si ce n’était la finesse de l’écriture de Valérie Tong Cuong.
Valérie Tong Cuong met ici en scène deux protagonistes au profil intéressant.
Pax, est l'image du comédien à la recherche de « l'impérieuse nécessité du succès, de la reconnaissance et de l'amour du public », mais qui trouve grâce au coaching par le théâtre dans les entreprises un moyen de gagner sa vie.
Emi, japonaise par son père, représente « l'être flottant » dont la beauté énigmatique, l'apparence impeccable et immuable forment une armure où elle cache son désenchantement.
Si j'ai été très sensible à la réflexion menée ici sur la place et la portée des violences dans notre société, j'ai aussi apprécié de faire un petit bout de chemin avec ces personnages en quête d'une possible rédemption et dont la vie est minée par ces « lâchetés ordinaires » aux retentissements imprévisibles. Vous avez compris que j'ai aimé ce roman dense, riche et profondément humain.
Scrapbooké par Karine Papillaud
Bonjour, et merci pour ces avis. Je lirai ce livre certainement.