Les contes, récits imaginaires courts, se caractérisent par une dimension merveilleuse, une charge émotionnelle forte, une fin morale souvent heureuse et une pérennité qui tutoie l'éternité. Ainsi Jésus, Bouddha et Homère pourraient être considérés comme les premiers conteurs…
Deux raisons à cette pérennité : Son intemporalité, avec des histoires qui s'inscrivent dans un passé lointain non daté "Il était un fois…", "Il y a longtemps, très longtemps…". Et l'oralité de sa transmission, car le conte autrefois relaté à la veillée est, aujourd'hui encore lu lors d'un moment privilégié, souvent par un parent à son enfant.
Au flou de l'époque répond une géographie indéfinie : le conte est très rarement localisable, seul le décor immédiat est décrit.
Enfin les personnages portent bien souvent des noms qui traduisent leur principale caractéristique : Peau d'Âne, le Petit Chaperon Rouge, Blanche-Neige, le Chat botté, Cendrillon, Barbe Bleue et même Candide.
Parce qu'il fait écho à un imaginaire collectif fort, est porteur d'une morale et éveille des sentiments puissants, le conte est un genre littéraire qui traverse les époques et connaît même un renouveau depuis le XXe siècle. Panorama.
Les premiers contes
Le roman de Renart rassemble de courtes histoires d'animaux autour de ses deux personnages principaux : Goupil, le renard et Ysengrin le loup. Critiques de l'ordre social médiéval, ces contes traduisent l'injustice humaine et furent sans doute à l'origine de l'inspiration des Fables de Jean de la Fontaine, (à lire sur lecteurs.com) dont chacune est un petit conte moral.
Les nouvelles Récréations et Joyeux Devis, de Bonaventure Des Périers, humaniste du XVIe fait une peinture de la société en jouant sur le ressort du rire philosophique à travers les fous, les femmes, les animaux et la religion.
Quelques grands classiques du XVIIe
Les plus connus demeurent les contes de Charles Perrault dont Le Petit Chaperon rouge (1697), un de ses plus célèbres contes narre l'histoire d'une fillette qui, par imprudence et désobéissance, se fait dévorer par le loup. Beaucoup plus tard, en 1857, les Frères Grimm écriront une suite, aujourd'hui très connue, dans laquelle interviennent des chasseurs qui libèrent la fillette et sa grand-mère.
Cendrillon, également, de Charles Perrault (reprit aussi par les Frères Grimm), symbolise le conte de fée par excellence et la victoire de la bonté sur la méchanceté. La "marraine-bonne fée", incarnant la justice qui transforme une citrouille en carrosse, des souris en laquais et le malheur en bonheur.
Quelques contes du XVIIIe
Les philosophes du Siècle des Lumières se sont essayé au genre pour y glisser leur part de réflexion et notamment Voltaire avec ses fameux ouvrages.
Candide, dont le titre sous-entend une forme de naïveté est un conte philosophique critiquant les philosophes optimistes qui nient l'existence du mal. Son héros, Candide, fera l'amère expérience de la souffrance à travers un voyage initiatique dont il sortira grandi et…moins candide. (à lire sur lecteurs.com)
Zadig (ou la Destinée), brosse avec humour et ironie une critique de la société française de l'époque des Lumières. Satire féroce des mœurs et des institutions, cette œuvre s’inspire pourtant d’un conte persan Voyages et aventures des trois princes de Serendip.
Micromégas, conte philosophique presque "science-fictionnel". Micromégas, habitant de Sirius, accompagné du secrétaire de l'Académie de Saturne arrivent sur terre. À travers leurs regards, Voltaire critique la religion et aborde la notion de la relativité.
Quant à Arnaud Berquin, pédagogue, il se vit décerner en 1784 par l'Académie française, Le prix annuel destiné aux livres les plus utiles pour L'ami des enfants. Construit sous forme de saynètes, qui par la voix d'un père, ont pour objectif d'instruire en amusant et de véhiculer un message moral, religieux, éducatif et politique.
Quelques contes du XIXe
Siècle marqué par le romantisme mais également le réalisme, de grands auteurs se sont essayé au genre pour en détourner son univers, à savoir, l’imaginaire et la féérie. Aussi, Balzac ou Maupassant écriront des contes ancrés dans une réalité bien noire.
Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll, véritable institution, raconte l'histoire d'une petite fille curieuse, espiègle qui suivant un lapin, se trouve entraînée dans un monde irréel peuplé d'étranges personnages. Un pays de merveilles déconnecté des repères habituels, un monde d'excès et de folie. (à lire sur lecteurs.com)
Evoqués précédemment, Les frères Grimm ont magnifié le genre avec leurs fameux Contes dont la plupart sont restés très célèbres. Contes populaires allemands, ils constituent largement une part de la culture universelle, avec notamment Blanche-Neige, Tom Pouce, Hansel et Gretel, Raiponce….
Hans Christian Andersen, autre grand conteur danois, s’essaie au genre sans grand succès à ses débuts pour être ensuite encensé. Contes qu’il n’adresse pas qu’aux enfants et dont chacun possède une symbolique comme Le vilain petit canard, La princesse au petit pois, La petite fille aux allumettes ou La petite sirène.
Les Contes drolatiques de Balzac, beaucoup plus balzaciens qu'il n'y paraît, bien qu'écrits volontairement dans une syntaxe médiévale, en anachronie avec l'époque se déroulent au Moyen Âge et traitent de la sexualité grivoise transgressant allègrement l’esprit bien-pensant et l’ordre politique.
Les Contes de la bécasse de Guy de Maupassant dépeignent dans dix-sept nouvelles tragiques les bassesses et faiblesses humaines avec ironie et pessimisme. Violence, mort, cynisme, fatalité, mesquinerie, ingratitude… les Contes de la bécasse sont également appelés Contes dramatiques. (à lire sur lecteurs.com)
Lokis et autres contes de Prosper Mérimée, rassemble des contes fantastiques. Lokis, qui ouvre le recueil et qui fût le dernier écrit de l'auteur, raconte l'histoire d'un philologue venu étudier des documents chez un noble local. Hébergé au château, il découvre avec effroi l'identité de son hôte dont les noces se préparent et qui finiront tragiquement par la mort de la jeune épousée au lendemain de la nuit de noces.
Les contes aujourd'hui
Parmi les contemporains, il en est un essentiel : Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry. Régulièrement adapté au cinéma ou à la télévision, nombre de fois illustré, ce conte possède une dimension magique, une féérie intemporelle. D’un style dépouillé, il possède une symbolique et des histoires empreintes d’allégorie.
Les contes de la rue Broca de Pierre Gripari sont désormais devenus des incontournables de la littérature jeunesse. Un vent de modernité souffle sur ces contes qui mêlent avec bonheur réalisme et fantastique, tout en bouleversant les codes. Entre la rue Broca et la rue Mouffetard, Gripari nous entraîne avec audace du XXe siècle au Moyen Âge et dans un univers onirique où le prince échange ses jambes contre une queue de poisson pour vivre un amour subaquatique. Un autre conte évoque l'histoire d'une patate qui rêvait de devenir une frite, ou encore l'histoire d'amour de deux chaussures.
Outre le célèbre Charlie et la chocolaterie, Un conte peut en cacher un autre de Roald Dahl, revisite avec humour les grands contes classiques dans une langue moderne et familière, à l'instar de Blanche Neige qui fait du stop et trouve un emploi dans une maison habitée par 7 jockeys joueurs qui misent et perdent régulièrement… Jusqu'au jour où Blanche Neige vole le miroir de sa marâtre, qui leur donnera toujours le tiercé gagnant !
On constate donc qu’aujourd’hui, le conte tient toujours une place prépondérante dans la littérature et la culture collective et qu’il inspire beaucoup le cinéma que ce soient des films d’animation et de plus en plus de vrais longs métrages avec des comédiens renommés.
Aussi, des auteurs du XVII ème comme Charles Perrault (Le chaperon rouge (2011), Le Chat potté, 2011), aux plus contemporains comme J.M. Barrie (Peter pan (2004), leurs contes inspirent et séduisent par leur féérie.
De plus, les festivals dédiés foisonnent, attirant une foule de passionnés n’attendant qu’une seule chose, qu’on leur raconte des histoires…