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"La disparition de Josef Mengele" le roman-récit sans concession d'Olivier Guez

Jusqu’où peut aller la vérité romanesque ?

"La disparition de Josef Mengele" le roman-récit sans concession d'Olivier Guez

Olivier Guez est un écrivain qui se nourrit de l’histoire des peuples. En revenant sur l’odieuse figure du docteur Mengele, il retrace un chemin du crime contre l’humanité comme validé par l’impunité.

C’est en ce sens que Stéphane Bret, l’un de nos Explorateurs de la rentrée littéraire 2017, a lu le roman :

 

Jusqu’où peut aller la vérité romanesque ? Doit-elle se substituer à la vérité historique, se superposer à cette dernière, ou limiter sa prétention à un rôle second ? Olivier Guez dans La Disparition de Josef Mengele apporte une réponse qui sera précieuse à tous ses potentiels lecteurs que nous espérons très nombreux : il franchit cet obstacle parfaitement en narrant la vie de Joseph Mengele durant l’après-guerre en Amérique Latine par l’imaginaire, bien sûr ; mais aussi en s’adossant à une solide documentation historique et livresque.

Ce qui frappe tout d’abord à la lecture de ce texte, c’est le souci constant de mise en perspective d’Olivier Guez concernant la situation de l’après-guerre. Ainsi décrit-il les lieux de Buenos Aires que Mengele fréquente : « Depuis quelques jours, il arpente Buenos Aires. La colossale avenue du 9 juillet et son obélisque ; Corrientes, ses cabarets et ses librairies ; le gratte-ciel Barolo et les cafés Art nouveau de l’avenue de Mai. » L’auteur souligne à bon droit la convergence idéologique entre les idées des nazis et celles de certains dictateurs sud-américains tels que Perón en Argentine, ou Stroessner au Paraguay. On découvre également, en Argentine, la parution régulière d’un journal rédigé en allemand Der Weg (la voie, le chemin) animé par des anciens du IIIe Reich : Eberhard Fritsch, engagé dans les Waffen-SS, Croix de Fer première classe, affecté au bureau central du repeuplement de la race en Pologne. Toutes les relations que Mengele va nouer, dans le cercle des réfugiés nazis, seront du même calibre.

 

Autre mérite d’Olivier Guez : rappeler que les idées nazies de purification, de supériorité de la race aryenne, d’élimination des parasites étaient déjà présentes dans la science officielle par l’eugénisme et le darwinisme, dans leurs implications les plus extrêmes : « Tout le monde voulait faire de la biologie car elle menait aux carrières les plus prestigieuses et les plus rémunératrices (…) la société allemande ne raisonnait alors qu’en termes biologiques. La race, le sang ».

 

Olivier Guez parvient à accéder à une dimension historique affirmée tout au long de ce roman qui n’est pas, et ne peut pas être un récit exclusivement romancé, par respect pour les victimes et pour l’Histoire. Il s’appuie sur les témoignages, cités à plusieurs reprises dans son livre, de Mijklos Nyiszli, médecin légiste à Auschwitz, forcé d'exécuter les ordres du docteur Mengele et auteur de Médecin à Auschwitz ; et aussi sur celui de Johann Chapoutot La Loi du sang, qui a permis à l’auteur de mieux restituer la vision nazie.

Le quotidien de Josef Mengele, ses fréquentations, ses relations familiales épistolaires ou directes, sont également évoquées avec une grande vraisemblance. Faut-il comme le dit l’auteur « se méfier des hommes  » ? Olivier Guez réussit avec beaucoup de talent et de force de conviction à nous faire toucher du doigt cet aspect effrayant de l’histoire : l’impunité d’un criminel contre l’humanité.

© Stephane Bret

Un grand merci à Stéphane Bret pour cette superbe chronique.

 

Une sélection de Karine Papillaud

 

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