"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Printemps 2020. Le Cinéma français - mais pas que - en Noir et Blanc a presque entièrement disparu du PAF. Il y a vingt ans, c'est loin, vingt ans, il constituait encore l'essentiel de la programmation de Ciné + Classics (mais ça, c'était avant). Aujourd'hui, il culmine à 20 ou 25%, en comptant les « classiques ».
Dans le même temps, l'offre DVD et/ou VOD n'a jamais autant mis le Noir et Blanc a l'honneur que depuis quelques années. Les titres produits en France au cours des quinze premières années du Parlant, en considérant que le Cinéma français des années d'Occupation a constitué en très grande partie un prolongement de celui de la décennie précédente, représentent aujourd'hui une part croissante des rééditions. Les titres peu ou jamais réédités depuis leur première sortie en salles constituent eux-mêmes un pourcentage non négligeable de cette politique de remise dans les circuits. Et l'oeuvre de « restauration » se poursuit, forte du professionnalisme de certains éditeurs (pas tous). Une date, parmi tant d'autres ? 2018 : la version « intégrale » de Gueule d'Amour, invisible depuis vingt ans, ressort chez TF1. Quelques mois plus tard, « Gaumont à la demande » permet à Mademoiselle Mozart (Yvan Noé, 1935), comédie trépidante portée par le jeu déjà magistral d'une Danielle Darrieux de dix-sept ans, de bénéficier d'une réédition bienvenue, huit décennies et demi après avoir (presque) totalement disparu des radars. Champagne. Dans le même temps, des chaînes Youtube et divers forums de cinéphiles ont accompagné ce processus de rééditions en remettant, certes toujours un peu à la limite de la légalité, un nombre incalculable d'absolues raretés en ligne. Au-delà du dol manifeste fait aux ayants-droit des oeuvres concernées, du moins celles n'étant pas encore tombées dans le domaine public, les chercheurs ne peuvent que s'en réjouir. Si le présent ouvrage, ainsi que les suivants, sont un peu plus exhaustifs qu'au moment de leur mise en chantier, ils le devront beaucoup aux internautes et cinéphiles anonymes ayant mis en ligne des oeuvres difficilement accessibles.
Ce sont toutes ces raisons, et beaucoup d'autres, qui nous ont conduits à ouvrir une parenthèse dans la publication - toujours d'actualité - de notre Encyclopédie des Longs-Métrages 1929-1979, pour mieux axer, l'espace de trois ou quatre volumes, nos recherches sur une période-charnière de l'Histoire du Cinéma français (et du Cinéma tout court).
1.500 longs-métrages ont été produits en France entre 1929 et 1939. Environ un tiers des oeuvres concernées a disparu sans espoir de retour, notamment la production de la Paramount française et la majeure partie des coproductions franco-allemandes tournées à Berlin de 1931 à 1934. Reste un peu plus de 1.000 films, dont 600 ou 700 ont fait l'objet, sinon de rééditions en bonne et due forme, du moins d'une remise avérée dans les circuits de diffusion pris au sens large. C'est ce corpus, mêlant oeuvres mythiques et absolues raretés, que nous nous proposons d'explorer, page à page, film à film.
Quiconque ayant ouvert, au cours de son enfance, une « malle aux trésors » trouvée dans un grenier sait qu'on peut y trouver absolument tout et n'importe quoi : de la verroterie et de perles, des étoffes soyeuses et de vieux chiffons, parfois même des toiles d'araignée... C'est dire si toutes les oeuvres abordées ne présentent pas - loin s'en faut - un intérêt comparable. Mais toutes sont visibles pour qui veut ou peut se donner les moyens de les chercher. Toutes reflètent, en mode majeur ou en mode mineur, l'extraordinaire vitalité d'une industrie cinématographique, riche, plurielle, point encore formatée par le modèle hollywoodien, avec ses capitaines, parfois omnipotents, et ses artisans indépendants. Le cinéma français des années Trente est celui de Carné, de Duvivier, de Grémillon, de Guitry, de Pagnol, de Renoir, de Tourneur, c'est également celui des « ovnis » Jean Vigo, Jean Godard, Jacques Constant, Dominique Bernard-Deschamps et Louis Valray.
Ce livre et les suivants n'ont d'autre objectif que de remettre, eux aussi, un certain nombre de pendules à l'heure, et d'émettre l'hypothèse que - peut-être - un Baroncelli, un Bernard, un Berthomieu, un Boyer hautement réussis valent mieux, à tout prendre, qu'un Pagnol médiocre ou qu'un Renoir raté. Notre principal mot d'ordre a été de donner la priorité aux films, qu'ils soient réussis, un peu moins, ou, pour une minorité d'entre eux, pas du tout. Encore une fois, notre « malle aux trésors » recèle, ça et là, de vieux chiffons, voire de luxueuses étoffes, somptueuses en apparence, mais mangées aux mites et sentant un peu le renfermé, si ce n'est (parfois) le rance, mais - heureusement - pas que... Gageons que le lecteur, ayant pris le temps de tout tourner et de tout retourner, saura y trouver, ou y retrouver, au choix, du brocart, du velours ou de la soie n'ayant rien perdu de leur patine d'origine. La « playlist » publiée en annexe, comporte, sur l'ensemble des films répertoriés, un peu plus de cinquante oeuvres cotées à hauteur de trois, quatre ou cinq étoiles. Le plaisir pris à voir et à revoir sur copie l'essentiel de la majorité des titres figurant au sommaire du présent ouvrage, s'est, d'une manière générale, avéré très vif durant le semestre entier qu'a duré sa rédaction, et les revisions successives, sur la toute dernière ligne droite, de Dernière Jeunesse (Jeff Musso, 1939), du Disque 413 (Richard Pottier, 1936), d'Éducation de prince (Alexandre Esway, 1938), d'Escale (Louis Valray, 1934), de Fanfare d'amour (Richard Pottier, 1935), ou de Fort Dolorès (René Le Hénaff, 1938) n'ont pas été les moins excitantes du lot. Tant qu'il y aura des films...
Pour toute précision complémentaire relatives à la sortie de Trésors du Cinéma français des Années 1930 - II et aux modalités liées à sa souscription, ou pour vous faire une idée un peu à l'avance de la suite de notre calendrier éditorial, n'hésitez pas à revenir vers nous via notre mél : aide-memoire@club-internet.fr
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