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À Lima, quand on perd son emploi d'assistant juridique pour cause de conjoncture économique calamiteuse alors qu'on a charge de famille, en l'espèce un enfant atteint d'une maladie dégénérative coûteuse, et que l'on possède une Pontiac... devenir taxi s'impose comme une évidence.
D'autant qu'il existe bien des manières de rendre l'activité plus lucrative, quitte à admettre quelques entorses à la loi ou à la morale. Dépouiller et vendre les clients en état d'ébriété par exemple.
Un conte à forte dimension critique d'une société péruvienne déliquescente où la question de la survie impose sans doute de reconsidérer les frontières du bien et du mal.
* * * Après des études à l'Université Catholique de Lima, Fernando Ampuero (Lima, 1949) se fait globe-trotter lors d'un long périple en Europe et aux Amériques incluant un séjour aux Îles Galapagos et devient écrivain.
Journaliste n'hésitant pas à dénoncer la corruption de la classe politique quitte à subir les foudres de la censure, auteur de contes et de romans, mais aussi dramaturge et poète, il est aujourd'hui l'un des auteurs péruviens les plus reconnus et son oeuvre traduite en plusieurs langues.
* * * "Alors, depuis mon renvoi, je travaillais dur comme chauffeur de taxi, et le week-end, je faisais mon beurre grâce aux ivrognes.
Cette première activité est allée de soi, parce que je possédais une voiture, une vieille Pontiac, et que je n'avais rien d'autre à faire. Je travaillais chaque jour douze heures d'affilée, comme si c'était une voiture de location. L'autre, celle des ivrognes, m'est apparue comme une folie de plus dans cette ville insensée, et quelque temps plus tard, comme une tentation. Un ami chauffeur de taxi, le Noir Raimundo, m'a mis au courant de l'affaire.
- Il s'agit de voler et de vendre des ivrognes, a-t-il affirmé. Une bénédiction du Seigneur ! Tu toucheras en une nuit ce que d'autres gagnent en plus d'une semaine. Tu te lances ?
Je me suis mis à rire pendant un bon moment. Voler un ivrogne, ça, je pouvais le comprendre, mais c'était la première fois que j'entendais dire qu'on pouvait vendre un ivrogne.
- Tu parles sérieusement ?, ai-je demandé.
- Évidemment !"
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