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Deux ados sont étendus au milieu de la fête foraine, au pied de la grande roue. C'est l'aube. La bagarre a mal tourné, ils ont sorti les couteaux... Sous le ciel blanc et vide, les vies défilent, singulières et pareilles, et les mystérieux enchaînements qui ont mené au drame.
Pajarito Tamai et Marciano Miranda étaient pourtant amis. Tous deux fils de fabricants de briques, ils sont voisins, nés à quelques heures d'intervalle dans la même clinique de l'intérieur argentin, ils grandissent ensemble et font les quatre cents coups. Jusqu'à ce qu'un malentendu les sépare et en fasse des ennemis jurés à l'école primaire. Comme leurs pères avant eux. Puis arrive Ángel, le beau gosse, le frère de Marciano, qui ne ressemble à aucun autre, qui n'aime pas les gringas, ni peut-être les filles en général. Et c'est encore pire...
Sous un soleil de plomb qui fait enrager, Marciano rêve de vert et d'eau, Pajarito ne comprend pas ce qui lui arrive, le destin compte les points entre la discothèque et la fête foraine et attise les haines en attendant son heure.
Tragédie rurale au cordeau dans la grande tradition américaine, histoire d'amour et d'une violence que rien ne peut conjurer : ce deuxième roman de Selva Almada prouve s'il en était besoin qu'elle a un talent fou. Et qu'elle sait faire du cinéma.
Très beau et dur roman qui se passe en Argentine.
J'ai lu la première fois Selva Almada dans son récit sur les féminicides argentins : Les jeunes mortes. Un livre glaçant. Elle revient au roman avec Sous la grande roue. Un roman dur et âpre. La construction déroute un peu au départ, puis dès que le pli est pris et qu'on se repère bien dans les familles, impossible d'en sortir. Sur fond de misère, de galère dans les campagnes argentines, elle bâtit une tragédie dans laquelle les hommes sont comme prédestinés à payer et reproduire les actes de leurs pères. Car ce sont bien les hommes qui apportent et transmettent la violence et la haine, les femmes doivent se contenter d'élever les enfants, de faire tourner la maison lorsqu'elles ne sont pas obligées de travailler pour que leurs maris puissent sortir et aller boire avec leurs copains. Elles sont effacées et subissent le poids des traditions machistes et leurs enfants en pâtissent autant qu'elles, même si les garçons auront la chance (?) de vivre comme leurs pères.
L'ambiance est brûlante, le soleil tape fort, attise les passions. L'environnement est pauvre, la région aride. Tout cela mène doucement mais sûrement vers la tragédie, les esprits sont chauffés à blanc. Selva Almada décrit cela admirablement, on visualise très bien les scènes, le décor, même les silhouettes et attitudes de ses personnages. Une écriture simple et directe qui ne s'embarrasse pas d'effets, qui va coeur des hommes et des femmes de son histoire. On pourrait y voir un scénario de cinéma tant les images sont nombreuses, un film noir, tragique avec des gueules, des acteurs burinés, des actrices qui rêvent d'une belle vie avant de se confronter à la dure réalité. Du cinéma réaliste.
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