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Manar se fait appeler Sukkar et ne porte pas le voile. Maysoun porte parfois la bourka et apprend le français pour être libre. Hadjé vit en camp de réfugiés et rêve de voir cette mer, si proche et si lointaine, au bord de laquelle elle a été conçue...
A travers neuf textes tour à tour poignants, engagés ou pleins d'humour, Stéphane Aucante revient une nouvelle fois en Palestine et livre une approche sensible des féminités en Palestine et dans le monde arabo-musulman. Un témoignage de première main puisque l'auteur a, de 2015 à 2018, vécu à Naplouse, la grande ville du nord de la Cisjordanie.
Pendant trois ans, Stéphane Aucante a été directeur d'Institut français à Naplouse, la grande ville du nord Cisjordanie. Il y a vécu dans une ambiance musulmane traditionnelle, sans extrêmes, et, auteur, en a rapporté de nombreux souvenirs de rencontres et d'échanges ; certains nourrissent ce livre. Manager, il a travaillé avec une équipe d'enseignants uniquement palestiniens ; les femmes y étaient plus nombreuses que les hommes. Programmateur, il a organisé des événements où les hommes venaient plus nombreux que les femmes ; dans la salle d'animation, les unes et les autres ne se mélangeaient pas. Professeur, il a enseigné le français ; dans ses cours, la parité était souvent respectée. Homme tout simplement, il a ressenti la nécessité de témoigner et de transmettre, d'où ces portraits au féminin, à la fois disparates et unies par cette question : qu'est-ce que la féminité dans une société qui voile les femmes et qui, aussi, punit pénalement l'homosexualité ?
Sa réponse, intuitive, sensorielle, est, il l'espère, universelle : partout des femmes fortes et des hommes différents se battent pour exister. Alors elles et ils s'exposent, tout en gardant un voile de mystère, comme un art de l'esquive, et une réelle force de séduction. Humblement, avec respect mais sans pathos, et même avec humour parfois, un peu de ce voile se lève ici à travers des textes sensibles et imagés qui nous font vivre, le temps de quelques pages, le quotidien tour à tour léger, poignant, lumineux ou inquiet, de Manar devenue Sukkar depuis qu'elle ne porte plus le voile, Maïssa qui a autant peur des animaux que des soldats israéliens, de Hadjé qui n'a jamais vu la mer au bord de laquelle ses parents habitaient, ou encore de Saïd qui pense qu'il n'a pas de futur puisqu'il préfère les hommes aux femmes...
"Sans Voile - Féminité(s) en Palestine" est le premier livre édité par une toute nouvelle maison d'édition associative, Bougainvillier éditions. Il prend place dans une des quatre collections de son projet éditorial, celle ouverte aux textes courts, contes, nouvelles, etc., sous le nom "En boutons".
Sans voile ?
C'est une évidence pour moi qu’elles sont toutes voilées et subissent des violences et bien non !
Loin de nous, de moi, de mes repères, et pourtant voici des portraits de femmes sincères, loin des clichés, écrits par Stéphane Aucante, le directeur et l’auteur lui-même de ce récit qui a donné des cours de français à l’institut français de Naplouse.
Il parle de ses élèves, Sukkar mais aussi de sa collègue Maissa la médiathécaire de l’institut, de la femme de ménage, de la propriétaire des lieux Dame Siam, et pour finir de ce jeune homosexuel, Said qui doit cacher son orientation sexuelle interdit.
Des situations différentes pour chacun-chacune mais toujours des envies de vivre sans ces peurs communes d’un pays en guerre où les traditions sont lourdes, d’assumer une certaine féminité. Une porte ne doit jamais être fermée quand une femme et un homme, non mariés, sont dans la même pièce.
J’ai eu un peu de mal à entrer dans le récit quand l’auteur parle de Fouad qui veut absolument se marier pour fuir son pays, parce qu’il m’a manqué un lien avec la suite. Alors que l’évocation des fleurs de Bougainvilliers donnant son nom à ces éditions est une introduction merveilleuse.
Mise à part le côté un peu décousues des histoires, je remercie les éditions Bougainvillier pour cette découverte et la compréhension de situations inconnues. Je me mets à la place de Nad, le seul portrait d’une femme française venue en touriste en Palestine et quel courage de se confronter à la compréhension d’une autre civilisation où les codes de la bienséance sont si différentes.
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