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Je m'appelle Rodrigo. Rodrigo Ganos. Je suis né le 15 mai 1945 à Buenos Aires.
Ainsi commence le cahier découvert en même temps qu'un cadavre dans un appartement toulousain. Le gendarme, le flic et la légiste décident de le lire ensemble, espérant y trouver l'explication du meurtre. Ils y suivront la vie tourmentée de Rodrigo, un innocent présumé coupable, et comprendront que ni les méandres de l'Histoire ni ceux de son histoire personnelle ne permettent de dénouer l'ensemble de l'énigme. Il leur manque un élément, un élément crucial.
A côté du cadavre découvert dans un appartement du Sud-Ouest de la France, la police trouve un cahier. Il s’agit du journal d’un dénommé Rodrigo Ganos, né en 1945 à Buenos Aires. De l’Argentine à la France en passant par le Maroc, s’y dévoile le parcours mouvementé d’un homme faussement accusé dans une vaste affaire, où s’entremêlent inextricablement les intérêts privés et les ingrédients de l’Histoire. Mais, si la narration finit par faire tomber les faux-semblants un à un, il en est un tout dernier, exclu du cahier, dont le lecteur sera un des rares complices…
Roulés dans la farine : c’est le sort que nous réserve Régis Bégué, en jouant d’un principe narratif que ne désavouerait pas Romain Puértolas. Autrement dit, si le déroulé de l’intrigue tient en haleine au long de ses intrications pleines de mystères et de surprises, il est une donnée de départ sans laquelle la perspective du récit reste faussée, et dont la découverte ultime stupéfiera le lecteur tombé dans le panneau. Cette pincée finale de malice vient couronner le long dessillement d’un personnage cerné depuis l’enfance par le mensonge, et qui, sans un incident l’amenant à en effeuiller toutes les couches une à une, aurait bien pu ne jamais perdre ses illusions.
Ainsi, les aventures dramatiques du narrateur n’en finissent plus de le faire tomber de Charybde en Scylla. Et si, lors de l’interrogatoire musclé du début, l’on ne peut d’abord complètement se défendre d’un certain scepticisme quant à la réelle crédibilité de l’intrigue, l’on se laisse vite emporter par les tribulations de ce personnage obligé d’ouvrir les yeux sur les terribles ambivalences de son entourage. Il faut dire que l'auteur s’en donne à coeur joie, multipliant comme à son habitude les protagonistes ni chair, ni poisson, en gros tous capables du meilleur comme du pire en fonction des situations et de leurs intérêts. Malgré tout, dans cet imbroglio où le mal et le bien s’interpénètrent souvent, entourant d’un certain trouble la notion de culpabilité, émergent quelques pépites de vraie humanité préservée, la plus belle étant indéniablement la solidarité désintéressée d’une poignée d’habitants d’un misérable village marocain.
Sans jamais cesser de s’amuser, lorsqu’il nous mène en bateau ou parsème son texte de ses petites madeleines des années quatre-vingts, Régis Bégué nous livre un polar réussi, plein de vrais et faux tiroirs, où bien des secrets se dérobent sous la surface de la normalité. Mais les pires salauds ne sont-ils pas aussi des hommes ordinaires ?
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