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Dans ces trois nouvelles autobiographiques, Lenka Reinerovà, l'un des derniers écrivains tchèques de langue allemande, convoque le souvenir de sa soeur cadette disparue à Auschwitz (Promenade au lac des cygnes) et de ses années d'exil (Chez moi à Prague, et parfois aussi ailleurs). Un autoportrait inséparable de celui de Prague, personnage principal du Café de rêve d'une Pragoise, où l'auteur bavarde avec Theodor Balk et ses amis disparus, Egon Erwin Kisch, Max Brod, Franz Kafka, Norbert Fryd, Iaroslav Hasek, Wieland Herzfeld-protagonistes d'une scène culturelle dont l'auteur demeure la seule survivante.
https://evabouquine.wordpress.com/2016/03/30/carnets-tcheques-episode-4/
Franz Kafka, Egon Erwin Kisch, Max Brod, Rainer Maria Rilke… Tous ces auteurs ont un point commun avec Lenka Reinerová : ce sont des écrivains tchèques de langue allemande. Pour comprendre cela, rappelons tout d’abord que les Pays Tchèques étaient historiquement rattachés au Saint Empire Romain Germanique puis à l’Empire habsbourgeois. Quand elle devint un pays indépendant en 1918, la nouvelle Tchécoslovaquie était certes peuplée de Tchèques et de Slovaques, mais aussi d’Allemands (pour environ 30% de sa population). La coexistence des cultures tchèques, allemandes, mais aussi juives, en premier lieu à Prague, est donc une chose ancienne.
C’est dans ce cadre qu’un courant littéraire de langue allemande se développe, principalement après la 1ère guerre mondiale. Lenka Reinerová, née en 1916, en était la dernière représentante. Décédée récemment (en 2008), elle lègue une dizaine d’ouvrages, qui sont principalement autobiographiques.
Promenade au lac des cygnes (qui est aussi le titre de la première nouvelle, la plus émouvante) regroupe à cet égard 3 récits. Lors d’un voyage à Ravensbruck, elle y évoque le difficile souvenir de sa soeur et de sa mère qui y périrent comme 92.000 femmes… puis son périple subi dans « Chez moi à Prague et parfois aussi ailleurs », qui la mena de Prague à Paris, puis Marseille, Casablanca, le Mexique, le Canada, la Yougoslavie et de nouveau la Bohême. Son amour pour la ville d’or transparaît à chaque page :
"A Prague, on peut rêver les yeux ouverts."
" En différents endroits du globe je peux me sentir bien, et j’en ai fait l’expérience maintes fois. Mais chez moi, je peux être tranquille sur ce point, vraiment chez moi, je ne le suis qu’à Prague."
Une ville qui ne serait pas ce qu’elle est sans ses cafés, où se retrouvaient les groupes d’écrivains et journalistes durant l’entre deux guerres. C’est d’ailleurs le sujet de la 3ème nouvelle où Lenka Reinerová convoque le souvenir des auteurs disparus dans son « Café de rêve »…
Quelle vie que celle de Lenka Reinerová ! Juive allemande dont la famille périt sous les nazis, elle sera emprisonnée à plusieurs reprises, notamment en France mais aussi dans les années 50 dans son propre pays. Si vous souhaitez en savoir plus sur elle, je vous invite donc à lire ses livres, de préférence en allemand (je dois vous avouer que la traduction a enlevé une partie de la magie des textes dans Promenage au lac des cygnes) ou encore vous rendre sur le site de Radio Prague (www.radio.cz/fr) où vous pourrez l’entendre parler français ou allemand (l’accent des Pragois « allemands » était paraît-il très reconnaissable !)
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