"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Mai 1946. Le philosophe français Jean-Baptiste Botul est appelé à Nueva Königsberg au Paraguay, auprès d'une communauté exilée vivant à la manière de Kant. Il est chargé de trancher un débat d'une importance capitale : quelle doit être leur vie sexuelle ?
Délicate question. S'ils pratiquent, ne risquent-ils pas d'être infidèles à leur illustre modèle, connu pour sa chasteté ? Mais s'ils s'abstiennent, la survie de Nueva Königsberg sera de fait compromise.
Le jeune Sébastien s'est trouvé entraîné dans cette expédition, qui oscille pour lui entre canular et cauchemar jusqu'à sa rencontre avec Sofia, membre de la communauté. Partageant discussions, disputes et confidences, ils découvrent un monde nouveau. Toutefois, l'issue de leur relation reste suspendue à la solution que proposera Botul. Sexe ou pas sexe ?
Un récit d'aventures, un suspense philosophique, le roman d'un amour fou, au-delà de la raison pure
On me dit impatiente, vive, rapide, réactive, impulsive, en un mot pénible, quoi ! Pourtant, je suis capable de faire preuve d’une lenteur accablante. Exemple : je viens de terminer "Nueva Königsberg", un roman de Paul Vacca, paru le… 7 mai 2009. Ce n’est pas grave, le plaisir, et quel plaisir, était à venir.
Trop accaparée par ma vie professionnelle à l’époque de sa sortie, je n’y avais pas prêté attention. Je ne sais pas davantage l’accueil qui lui fut réservé. Mais, pour ma part, cet ouvrage est loin, très loin de ce que j’ai pu lire ces dernières années. Nous sommes en mai 1946. Le philosophe français Jean-Baptiste Botul – accompagné de Sébastien, un jeune zazou passionné de cinéma – est appelé en consultation au Paraguay près d’une communauté allemande venue de Königsberg pour échapper aux bombes ennemies. Tous ces gens vivent à la manière de Kant et se posent une question essentielle. Doivent-ils aller jusqu’à suivre aussi ses préceptes en matière de sexualité et donc de chasteté ?
Comment qualifier ce roman ? Je vais emprunter les propos de l’auteur : "Des accords graves et solennels qui s’entremêlaient à des trilles espiègles et enjoués." Il parle là du magnifique "Rhapsody in blue" de Gershwin, joué un soir à la clarinette par Sébastien. Mais ces mots s’appliquent parfaitement à l’ouvrage. En plus de cette idée géniale de choisir pour héros un philosophe français tout droit sorti de l’imagination d’un journaliste, en plus de l’intérêt de se replonger dans l’œuvre de Kant, de revisiter Voltaire – Sébastien, n’est-il pas un peu Candide ? – "Nueva Königsberg" est un mélange subtil d’ingrédients de qualité. J’ai adoré la belle écriture, la crudité liée au sexe mêlée à la suavité de l’amour courtois, la drôlerie mélangée à la raison, les réflexions philosophiques "Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle." ,agrémentées de passages poétiques et romantiques "Arrivés au bord du lac, ils prirent place sous un saule pleureur que les rayons du soleil couchant habillaient d’or."
Sans oublier les causeries de Botul et les tergiversations de Sébastien. Tergiversations amoureuses… Pauline, Sofia… L’amour ! Toujours ! Vaste question allègrement traitée. C’est érudit, brillant, dôle et enlevé. Bref, c’est un roman à nul autre pareil, une sorte de farce sucrée-salée, à qui j’ai envie d’attribuer le prix de l’originalité. Je dirais bien que j’en suis tombée amoureuse au premier regard. Mais ce cher Emmanuel – je parle de Kant, naturellement – agréerait-il ? Peut-être, il ne s’agit que d’un roman après tout.
J’appréciais Paul Vacca l’essayiste, ses mots choisis, son immense érudition, son humour ravageur. J’appréciais aussi le chroniqueur et notamment son cabinet des mythologies littéraires dans le magazine Ernest. Je dois avouer que le romancier n’a rien à leur envier.
"Nueva Königsberg", un bonbon acidulé à savourer sans modération.
https://memo-emoi.fr
Comme beaucoup, j'avais été sous le charme du premier roman de Paul Vacca : La petite cloche au son grèle. L'exercice du second roman n'est pas toujours aisé. Paul Vacca s'en tire haut la main. Je lui sais gré de changer totalement d'angle et de genre. D'un roman tendre et émouvant, il passe à une fable philosophique très drôle - j'en ai même eu des "remontées" de Candide !
Je me suis promené avec joie dans les rues de Nueva Königsberg en compagnie de Sébastien et Sofia, l'institutrice du lieu. J'ai écouté leurs arguments et leurs discussions sur l'Amour, la liberté, le sens de la vie et le bonheur. Je suis resté discret ne voulant pas troubler leur intimité naissante. J'ai aussi assisté aux causeries de J-B Botul devant statuer sur ce que résume ainsi Sébastien : "To fuck or not to fuck. That is the question." Paul Vacca oppose malicieusement l'austérité de Kant -je me suis renseigné en cours de lecture- à la vie "normale" de l'après guerre notamment dans ce qu'elle avait de plus festif : le jazz et les zazous.
Je ne suis point féru de philosophie. J'avoue même mon inculture en ce domaine. Comme il n'était pas nécessaire d'avoir lu Proust pour apprécier La petite cloche, il n'est point utile de connaître Kant pour déguster Nueva Königsberg.
rocambolesques.
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