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Dans les précédents romans de David Rochefort, le père du personnage disparaissait - dans l'un sans prévenir, dans l'autre en organisant méthodiquement sa disparition. Ce qui était commun à ces deux pères, c'était l'idée de transmission - et son échec.
Ici, le narrateur a été adopté, et ses parents adoptifs ne veulent pas sacrifier leur vie à son éducation, s'occupent assez peu de lui, et ne lui disent rien de son passé : « Chez moi, ce qui était tabou, c'était la naissance, pas la mort ».
Le narrateur se rend à l'enterrement de Vadim, le père d'un ami qu'il avait bien connu naguère et dont il avait fait un père de substitution.
Et lui-même a un enfant, Ilias, un jeune fils qu'il regarde grandir sans trop le comprendre, ni trop savoir qu'en faire. Il se rappelle notamment l'avoir perdu (ou avoir eu peur de le perdre) dans les jeux d'eau d'un parc d'attractions. Le personnage principal se retrouve successivement dans la situation du fils (adoptif), puis dans celle du père incapable d'assumer son rôle.
Les personnages de David Rochefort sont toujours ancrés dans le monde social. Le narrateur occupe un poste indéfini, dans une entreprise indéfinie. Ses collègues ne lui parlent plus. Tout le monde avance, sous la surveillance de celui qu'on appelle le Caporal. Seule issue envisageable : l'infirmerie. Dans sa jeunesse, le narrateur a été une sorte de représentant de commerce pour une maison d'édition qui vendait des livres ésotériques. Quant à Vadim, le père de l'ancien ami intime Sacha, il travaille dans une mairie communiste et écrit des livres d'histoire. Il veut sincèrement le bien de l'humanité et reste porté par l'idéal communiste des « petites gens ». Peut-on revivre les moments passés, reprendre contact avec des gens qui ne vivent plus que dans nos souvenirs ? Avec le temps, les gens qu'on a connus finissent par vivre en nous de façon presque autonome ; on les façonne par nos souvenirs, ils acquièrent une vie propre. La confrontation avec la réalité du « modèle », une fois qu'ils ont été transformés en souvenir, paraît impossible. C'est cette impossibilité que décrit Nous qui restons vivants.
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