"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Est-ce le plus beau jour de ma vie que je viens de vivre ?
Stéphanie est enceinte. Stéphanie est confiante. Son chemin vers la maternité semble aussi nettement tracé que la ligne brune apparue à la verticale de son ventre.
Mais le doute s'installe. Et si elle mettait en jeu bien plus que prévu, dans son corps, dans son couple, dans son existence ? Est-elle vraiment prête à devenir mère et à vivre le tsunami qui s'annonce ? Peut-on se préparer à l'inconnu ?
Baby blues, jalousies, sexualité, hérédité, obstétrique, nuits blanches, ventres vides et ventres pleins, bonnes ou mauvaises raisons d'être mère. C'est tout cela et bien plus encore que raconte Linea nigra, à travers le parcours de Stéphanie et des femmes qu'elle croise. En trame de fond de ce roman kaléidoscopique, un combat : le droit de chacune à disposer de son corps.
Un vibrant état des lieux de la maternité.
Une histoire d'amour inoubliable.
Un portrait de femme libérateur.
Coup de coeur. Ce roman est un chef d’oeuvre. Je pense qu’il devrait être beaucoup plus mis en avant. Les femmes ont peut-être besoin de lire plus pour imaginer d’autres horizons à leur réalité : cesser de souffrir, cesser d’être passive, savoir dire non, laisser parler ce qu’elles veulent vraiment, ... Et pour cela, Sophie Adriansen est une autrice que leur tient la main pour les amener vers un ailleurs meilleur.
Après Le syndrome de la vitre étoilée, Stéphanie est enceinte. C'est donc un second roman du corps que nous livre Sophie Adriansen, un corps fécond, cette fois mais un corps qui n'appartient plus en propre à Stéphanie. Il est l'écrin dans lequel grandit l'enfant, il est l'objet de l'amour de Luc, mais il appartient en outre au corps (un autre) médical, et un peu à tout le monde aussi. Le corps de la femme enceinte fascine. On a souvent envie de le toucher, comme si cela était nécessaire à se convaincre qu'un petit être grandit là-dedans. On oublie que c'est le corps d'une femme, on oublie que, pendant et après la grossesse, il est autant source d'émerveillement que de souffrances. Linea Nigra est un roman féministe: un roman qui rappelle aux femmes que leur corps leur appartient. C'est aussi un beau roman sur le lâcher prise en amour, qui est sans doute à la base de toute relation épanouie.
Côté écriture, la plume s'affute et la langue s'affine. Le ton est précis et juste. Sophie Adriansen dit ce qu'elle veut dire et j'ai hâte de retrouver dans un prochain roman ce talent qui s'épanouit de texte en texte.
Stéphanie est enceinte.
Enceinte.
Le terme évoque forteresse, citadelle entourée d'une ceinture de remparts qui protègent, qui isolent parfois. Ce corps transformé en cocon il lui faut l'apprivoiser sans cesse en acceptant de le partager, en veillant à l'habiter encore plus intensément. Mais que faire de tous les récits de gestations, d'accouchements, d'expériences qui abondent dès que sa grossesse est connue ? Les occulter ? Les prendre en compte ? Y résister ? S'y soumettre ?
La crainte de ne pas savoir, de ne pas pouvoir, de souffrir, d'échouer, hante Stéphanie. Les savoirs physiologiques, scientifiques ou empiriques n'y font rien : donner la vie reste un acte secret qui appartient à l'intime d'un couple et de son enfant à naître. Dès lors, quelle place et quel rôle laisser au geste médical ? Péridurale, césarienne, accouchement déclenché, accéléré, retardé, épisiotomie, délivrance... dans ce maquis de mots et de procédures, la femme et future mère, constamment menacée d'être malmenée par des actes intempestifs, a bien du mal à préserver l'intégrité de son "enceinte". Enfermée dans des protocoles médicaux abscons et parfois superflus, la femme enceinte doit lutter sans cesse pour faire entendre sa voix et son droit au choix, au risque de passer dès avant la naissance pour une "mauvaise mère".
C'est ce parcours que Sophie Adriansen passe au crible de son analyse et de son argumentation ardente en utilisant les ressorts de la superbe histoire d'amour que tissent Stéphanie, Luc et Ulysse. Il n'est pas question ici d'affirmations péremptoires, mais d'un léger déplacement du point de vue, d'un examen précis des idées préconçues, qui permet de fructueuses mises en questions. La somme de documents, leur diversité, leur insertion naturelle dans le cours de l'histoire provoquent un effet de perspectives extrêmement riches et passionnantes. Sophie Adriansen fouille, creuse, met en lumière, interroge, et construit un roman vrai, au ton parfois incisif, parfois poétique, mais toujours juste et accessible.
"Linea nigra" restitue l'image de cette marque qui se dessine sur le ventre de la femme enceinte : un fil, une frontière sur laquelle évolue la femme, tenant un équilibre précaire entre les discours des "professionnels de la profession" interventionnistes et ceux de la tradition selon laquelle la douleur est inéluctable, voire nécessaire, pour devenir mère. Mais, contrairement à la "ligne noire" de la grossesse, celle que trace Sophie Adriansen est bien loin de s'effacer avec le temps.
Un seul regret pour moi : n'avoir pas eu l'occasion de lire ce livre lors de ma première grossesse. Combien il m'aurait rassurée !
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !