"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Hanté par la guerre de Corée, où il a perdu une jambe, Rory Docherty est de retour chez lui dans les montagnes de Caroline du Nord. C'est auprès de sa grand-mère, un personnage hors du commun, que le jeune homme tente de se reconstruire et de résoudre le mystère de ses origines, que sa mère, muette et internée en hôpital psychiatrique, n'a jamais pu lui révéler. Embauché par un baron de l'alcool clandestin dont le monopole se trouve menacé, il va devoir déjouer la surveillance des agents fédéraux tout en affrontant les fantômes du passé...
Entre les courses automobiles illégales, les pasteurs qui prêchent avec des serpents venimeux dans les mains, les coutumes et croyances d'un endroit reculé au début des années cinquante, c'est tout un univers que fait revivre Taylor Brown dans ce roman haletant qui rappelle Donald Ray Pollock et Tom Franklin
Je redoutais un peu de me plonger dans ce roman noir arrosé de bourbon, empestant la fumée d’échappement des grosses cylindrées américaines, je me méfiais de l’excès de testostérone qui risquait de suinter du récit de Taylor BROWN.
Doutes vite balayés par le talent de ce jeune auteur à la plume aiguisée qui nous décrit magnifiquement une montagne hurlante du fin fond de la Caroline du Nord où rien n’est jamais tout à fait blanc ni tout à fait noir !
1952. De retour de la guerre de Corée, Rory est un jeune vétéran qui traîne son mal-être et sa jambe de bois sur la terrasse de la vieille bicoque de sa grand-mère, Ma, qui l’a élevé. Son handicap ne le gêne nullement pour faire vrombir le moteur trafiqué de sa Ford et appuyer à fond sur l’accélérateur.
Connaissant chaque virage et détour du territoire, au volant de son bolide, il déjoue la surveillance de la police pour convoyer l’alcool plus ou moins frelaté d’Eustace, le vieux caïd qui détient le monopole du trafic dans la région. Accompagné de Ma, il rend régulièrement visite à sa mère, placée dans un hôpital psychiatrique car elle est perturbée et est devenue mutique à la suite d’une agression survenue juste avant sa naissance . Rattrapé par son histoire et malgré les rivalités de gangs, l’ancien militaire tente de rester droit dans ses bottes mais il remue un peu trop la boue dans laquelle les habitants de ce territoire se complaisent. A trop vouloir faire justice et connaître la vérité, Rory risque de se brûler les ailes…
C’était pourtant une gageure mais Taylor BROWN a réussi le tour de force de me faire aimer un roman dans lequel la mécanique, les courses poursuites et les grosses bagnoles tiennent une place prégnante. Il a accompli ce petit miracle littéraire parce qu’il a su dépeindre magnifiquement une nature sauvage et parfois hostile, parce que ses personnages cabossés et amputés sont excessivement attachants, hauts en couleurs et enfin parce que rien n’est lisse ni convenu au cœur de ce bout de terre.
La grand-mère Ma, son passé de prostitué, son caractère, ses croyances, ses étranges décoction, son arbre aux esprits m’ont conquise et son amour pour son petit-fils au milieu de toute cette violence m’a touchée. Ma est aux antipodes de l’image de la mamie bienveillante et tendre, elle est rock’n’roll et inoubliable. Rory avec ses fêlures, ses blessures physiques et morales, sa loyauté et sa soif de vérité traverse le roman avec droiture et sincérité et tout comme lui on aspire à connaître les coupables et le mystère qui entoure la terrible agression de sa mère à l’origine de son traumatisme. Les personnages secondaires sont quant à eux truculents et singuliers entre le pasteur dresseur de serpents venimeux ou le jeune ami aux tablettes de chocolat qui trafique les moteurs mais lorgne sur Ma avec un désir coupable.
Si le récit de Taylor BROWN démarre au ralenti, le rythme s’accélère rapidement et c’est sur les chapeaux de roue que l’on suit le héros dans sa quête de vérité pour dénouer les fils du drame familial.
L’auteur maîtrise parfaitement son intrigue à laquelle il associe une description lucide de la société américaine de l’époque avec ses laissés-pour-compte et ses héros anonymes.
Il y a du Ron RASH et du Chris OFFUTT chez ce jeune Taylor BROWN et pas seulement parce qu’il niche son histoire au cœur des Appalaches. Vous imaginez bien que ce n’est pas pour me déplaire…bien au contraire !
Donc si vous avez encore quelques doutes comme moi avant d’ouvrir LES DIEUX DE HOWL MOUNTAIN, allez y les yeux fermés…enfin surveillez quand même un peu vos arrières, on ne sait jamais !
Mymy
http://cousineslectures.canalblog.com/archives/2019/06/15/37431358.html
Tout d’abord un grand merci aux Éditions Albin Michel de m’avoir permis de découvrir cet auteur pour la première fois !
Années cinquante. Rory Docherty est revenu de la guerre de Corée privé d’une partie de lui-même : il y a laissé une jambe …
De retour dans un bled perdu de Caroline du Nord, chez Ma sa grand-mère qui l’a élevé (Bonni sa mère étant placée dans un institut psychiatrique) le jeune homme va tenter de reprendre goût à la vie et de se battre pour garder une activité (clandestine autant qu’illégale …) au volant de Maybelline. Et si possible d’y conserver sa dignité. En compagnie d’Eli, son ami de toujours.
Dans cette immense rudesse environnementale et morale, il cherchera à découvrir ce qui est arrivé à la fragile adolescente qu’était sa mère, avec la complicité de sa grand-mère, femme forte et un peu sorcière (un peu prostituée aussi …) Et trouvera peut-être - en la personne de Christine - l’amour dont son coeur assoiffé a tant besoin …
Une très belle écriture, un récit plutôt contemplatif (parsemé d’un peu d’action, pour pimenter les longues descriptions)
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