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L'organisme de Diane tente de s'adapter doucement. Elle dort moins, devient plus forte et développe une endurance impressionnante. L'employée modèle qu'elle était peut encore plus se surpasser au travail. Or des effets insoupçonnés de l'intervention qu'elle vient de subir l'affolent. L'espace dans sa tête se resserre, elle sent du métal à la place de ses os. Tout est plus vif - sa vision, son odorat, sa respiration. Comble de la panique, ses cheveux et ses poils deviennent complètement roux en l'espace d'une nuit.
Et puis les mâles commencent à la suivre.
Quinze ans plus tôt, Diane connaît un été marquant de son adolescence à l'Isle-aux-Grues, ces jours de grosse mer où Eugène bravait les dangers, la fascination de son ami pour les espèces en voie d'extinction et - comment s'en remettre - le soir de l'incendie.
Ce roman, une fable animalière néolibérale, s'adresse à celles et ceux qui se sont égarés.
Pour accompagner les premiers flocons : Un chouette premier roman à l’histoire atypique, écrit par Mireille Gagné, qui m'a porté même s’il n’est pas très optimiste mais que j'ai apprécié au point de le lire en une journée ; le rythme est bon, notamment, grâce à la construction et l'alternance des chapitres :
-chapitres qui décrit scientifiquement le lièvre d’Amérique
-chapitres qui parlent du personnage principal, Diane, qui vient de subir une opération
-chapitres racontés par Diane où elle parle de son enfance sur l'Ile où elle habitait avec ses parents et les temps partagés avec Eugène, son ami
-chapitres où l'autrice évoque la vie de Diane, avant l'opération, dans un texte sans ponctuations, cette vie au travail qui la pousse à changer
On comprend assez vite en quoi consiste l'opération de Diane et, on se laisse emmener dans cette histoire, si on adhère à l'idée de l'autrice. Un livre résolument tourné vers la nature (lieux et animaux), la description de l’île m'a emporté vers l'envie de balades, d’espaces comme ce lièvre, d’évasion en bord de mer.
"-Je me demande ce que ça fait en dedans, savoir qu'on est en voie de disparition"
Ce Roman a fait parti de la sélection francophone du 35e festival du premier roman à Chambery 2021-22 ; par ailleurs, Mireille Gagné est québecoise et on retrouve d'ailleurs de nombreuses expressions canadiennes dans le livre mais un petit lexique se trouve à la fin du livre nous aide à les comprendre si on ne les connait pas.
Petit livre court et étonnant.
Ca se lit bien entre visions poétiques et reflexions sur le monde contemporain , la vitesse et la performance.
Quel livre étonnant que ce premier roman de cette autrice québécoise, ou quand une fable animalière sert à illustrer les aliénations engendrées par nos sociétés libérales.
Diane a grandi sur l’Isle-aux-Grues, à quelques encablures de Québec, une petite île sauvage où tout le monde se connaissait, où elle vivait heureuse auprès de ses parents et où elle connut Eugène, un jeune garçon passionné par les animaux en voie d’extinction.
Diane a quitté l’île et n’a pas revu ses parents depuis quinze ans. Elle n’a aucune vie sociale, compte tout, les dossiers réglés, les mails envoyés, la distance entre son appartement et son travail où elle se rend sept jours sur sept, se nourrit de pas grand chose le plus vite possible et se couche, non sans avoir vérifier plusieurs fois que la porte est bien fermée, puis s’endort en ressassant ce qu’elle a fait dans la journée et qu’elle aurait pu laisser échapper. C’est ce qu’on pourrait appeler une workaholic insatisfaite.
Alors pour faire mieux et surtout plus, elle décide de se faire greffer le gêne du lièvre d’Amérique, un des animaux qui dorment le moins. Les effets ne tardent pas à se faire ressentir ; ils ne sont juste pas ceux attendus.
L’histoire est un brin loufoque mais nous questionne sur nos sociétés à la recherche du culte de la performance et du surpassement, au risque de s’oublier et de faire un burn-out. Le grain de sable dans la machine bien huilée des diverses manipulations aura-t-il raison de ce monde absurde ? Je vous laisse le découvrir par vous-même !
Ce premier roman est relativement court (un peu plus de cent pages), mais sa construction est particulièrement intéressante. Une écriture bien distincte pour délimiter chaque séquence : l’étude scientifique du lièvre d’Amérique, Diane qui se remémore son enfance sur l’île (je), Diane tel un sujet d’étude après son opération (elle) et enfin la vie sans répit de Diane écrite à la chaîne, sans ponctuation, comme pour marquer le rythme de folie auquel elle se contraint.
Un regret ou plutôt une frustration : ce roman aurait mériter quelques pages supplémentaires sur ce qui a mené Diane à ce culte de la performance, mais bon il a l’excuse d’être un premier roman, et on lui pardonnera aisément.
Ce court roman, mi fantastique mi conte, est un petit bijou.
Le lièvre d’Amérique est un petit mammifère largement répandu au Canada et au Québec. Dès le premier chapitre, le ton est donné, on va retrouver ce lièvre et ses mœurs tout du long. La route de l’animal va croiser celle de Diane, jeune femme victime d’un burn-out dans une société où la performance au travail est question de survie.
Diane a confié son corps à la science pour qu’il devienne plus performant. C’est là qu’on atteint une dimension fantastique plutôt effrayante. Elle veut se surpasser toujours plus mais le prix à payer pour cette transformation n’est -il pas exorbitant ?
Diane revit son adolescence à l’Isle aux Grues, en compagnie d’Eugène le risque tout qui sait tout sur les animaux en voie d’extinction. Leur amourette s’arrêtera là et Diane quitte son île natale pour un travail exigeant dans une grande ville où elle découvre la solitude.
Entre souvenirs de Diane, amours perdues et monde du travail, l’histoire se déroule en quelques bonds…de lièvre.
D’une écriture ample et forte, ce roman nous embarque dans une histoire folle avec des narrations bien distinctes dans chaque partie de l’histoire bien compartimentée.
Un premier roman à découvrir.
Être la meilleure, celle qui traitera le plus grand nombre de dossiers, qui donnera la plus grande satisfaction à son employeur : la course à la performance semble être pour Diane le seul but à atteindre. Elle vit en solitaire dans un appartement aseptisé de Montréal. Sa vie s’organise entre travail acharné et séances à la salle de sport pour, là aussi, maintenir le corps performant, irréprochable. Un seul mot semble la résumer : l’efficacité. Et la concurrence est rude, surtout depuis que cette collègue est arrivée qui ne semble jamais s’arrêter. Dans cette course folle, Diane en oublie sa propre humanité, enchainant les jours comme autant de défis à relever, fustigeant le temps perdu des nuits. Et si tout cela ne servait finalement qu’à oublier, taire la douleur, panser les blessures. Oublier pour s’oublier soi-même.
Difficile de parler de cet étonnant roman sans en dévoiler la teneur et ce qui en fait son originalité. Habilement construit, il nous conduit à vive allure à la découverte des mœurs du lièvre d’Amérique (eh oui!) mais aussi sur deux rives de la vie de Diane. Celle fragile entre enfance et adolescence où certains violents orages peuvent marquer à jamais. Celle aussi de la Diane d’aujourd’hui, dans cet univers où tout semble contenu, contraint, où le hasard et les sentiments n’ont pas droit de cité. Mais à toujours vouloir détaler, il faut faire attention à ne pas se faire prendre au collet.
Un premier roman original et déroutant en forme de fable moderne – que j’ai dévoré d’une traite – qui dit combien il est facile de s’égarer dans nos sociétés modernes qui érigent la performance en valeur, faisant ici du travail un refuge pour ceux·celles qui cherchent à se protéger de la vie. Encore une fois, une très très bonne découverte éditée par La Peuplade, cette maison d’édition québécoise dont je suis, depuis quelques mois, les publications avec une curiosité dévorante.
Une belle couverture avec un lièvre d'Amérique m'a attiré pour lire ce court texte.
C'est un livre étrange, avec des chapitres qui semblent dissociés mais vont faire une histoire globale.
La vie du lièvre d'Amérique nous est décrit avec ses caractéristiques. Une femme est en convalescence après avoir subi une étrange opération génétique pour devenir super performante, puis un souvenir d'enfance de cette même Diane et d'un drame vécue pendant son enfance, la disparition d'un ami d'enfance.
Avec une belle plume, l'auteure nous entraîne dans ces questionnements, une fable sur la nature, sur la vie professionnelle et la recherche perpétuelle de la performance, le burn out, puis les souvenirs d'adolescence, les drames vécus et qui continuent toute la vie à nous hanter.
Très contemporain sur les thèmes de la vie professionnelle, la performances mais aussi une fable sur la nature.
Ce texte se lit d'une traite, même si on peut se perdre dans les différents chapitres, on s'attache à Diane, ce personnage.
Seulement 138 pages, pour nous interpeller, interroger, flâner dans les forêts et découvrir une belle fable algonquienne et tenter de se poser dans un monde où tout va trop vite.
Voilà un premier roman québécois captivant, intriguant, poétique. Mireille Gagné a écrit une fable. Une fable dont seuls les québécois ont le secret. Une fable dont les mots percutent, dont la ponctuation s’efface, dont le rythme est dense. Mais attention, ici, ce n’est pas une fable comme nous connaissons. « Le lièvre d’Amérique » est une fable qui parle des travers de notre société, ce travers de la compétence, du toujours mieux et plus vite. Et quelle idée incroyable qu’a eu l’auteure de s’appuyer sur la légende de Nanabozo, légende que je vous laisse découvrir à la fin de ce court mais puissant roman.
Dans « Le lièvre d’Amérique », Mireille Gagné explore la métamorphose de Diane par le biais d’une opération. Une métamorphose afin d’être plus productive, plus rapide, plus plus plus. Le lecteur assiste à ce changement, découvre avec Diane tout le bouleversement que subit son corps et je ne peux que penser à « La métamorphose » de Kafka (et cela me ravit). Avec en parallèle, la découverte du lièvre d’Amérique, l’animal puissant et rapide. Le lecteur en apprend beaucoup sur cet animal. Et fait forcément le lien avec ce que vit Diane. Le parallèle est posé. Évidemment, l’auteure veut nous faire comprendre Diane et sa vie de maintenant, à ce qu’il lui arrive en nous parlant de son adolescence et de ce qu’elle a vécu. Trois parties dans un court roman. Cela est ambitieux, audacieux et surtout cela fonctionne. L’auteure a un réel don pour raconter une histoire captivante, un don pour nous apprendre des choses, un don pour nous captiver pendant 138 pages!
Voici un roman singulier de cette rentrée littéraire. Le personnage principal s’appelle Diane. On fait des allers-retours dans le temps et donc dans la vie de Diane. Les chapitres sont entrecoupés de pages explicatives sur le lièvre d’Amérique : son comportement, son alimentation, ses prédateurs, sa reproduction, son territoire.
Elle a grandi sur l’Îsle-aux-Grues, un archipel d’îles au Canada. De son enfance, elle nous parle surtout de son ami Eugène, un fervent défenseur des animaux chassés. A l’âge de 15 ans, il disparait mystérieusement. Elle nous parle de la mer et de ses dangers (marées).
Aujourd’hui, elle vit seule, dans un appartement aseptisé en ville. Diane est une travailleuse acharnée, une employée modèle qui arrive tôt et part après tous ses collègues. Mais Diane est jalouse de l’une ses collègues. Son unique objectif est de la surpasser. Alors elle a pris rendez-vous pour une opération qui lui permettra de dormir moins et de travailler davantage.
Le roman s’ouvre à J+1 de l’opération et nous observons avec Diane ses effets sur son corps et son mental. Des effets surprenants, on dirait bien que ses yeux s’agrandissent, que son rythme cardiaque s’accélère, qu’elle devient rousse avec des taches de rousseur de plus en plus nombreuses…
Ce roman est très court et il m’a captivée. Je voulais découvrir en quoi allait se transformer Diane à la suite de cette opération mystérieuse. Je dois dire que la couverture a également attiré mon attention. Une très belle illustration colorée de Stéphane Poirier recouvre la totalité de la couverture. C’est un bel objet, une illustration en noir et blanc est insérée régulièrement entre les chapitres tels des intercalaires. La mise en page est soignée (design graphique et mise en page par l’Atelier Mille Mille). A la fin l’auteure a glissé un lexique de vocabulaire maritime, parler rural de l’île-aux-Grues. Vous trouverez par exemple la définition de « grignons » : « des mottes de terre ou de glaces durcies par la gelée ». J’ai adoré tous ces mots, une véritable invitation au voyage sur cette île que je ne connaissais pas. Une belle découverte !
L’éditeur décrit ce roman comme « une fable animalière néolibérale, [qui] s’adresse à celles et ceux qui se sont égarés ». Ainsi on nous dit que le roman est une adaptation libre d’une histoire algonquienne racontée par Alanis Obomsawin sur les ondes de la radio CBC en 1970, une légende indienne ! Elle relate les origines de Nanabozo, « une figure mythologique issue des traditions cosmologiques des peuples algonquiens ».
Si vous voulez en savoir plus sur Nanabozo : « Polymorphe et sans sexe défini, il ou elle apparaît le plus souvent sous la forme d’un lièvre. Envoyé sur la terre par le Grand Esprit Manitou et parfois lié à la création du Monde, Nanabozo est tantôt enseignant et bienfaiteur des humains, tantôt farceur. »
https://www.cbc.ca/player/play/1527775827
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