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« Ses yeux pour qu’ils arrêtent il aurait fallu qu’il les arrache. Ça aurait changé sa vie. Quand on est un enfant on peut arracher les pétales d’une fleur les pattes d’une mouche le tissu des fauteuils mais pas ses propres yeux. Et quand on est un adulte eh bien il est trop tard... » Bang a un don qui lui donnerait presque envie de mourir, Nao une maladie qui lui donnerait presque envie de vivre.Ensemble ils décident de partir comme on fuit.Du Mexique à Bali puis à la Centrafrique le road movie déjanté et tonique d’un duo pour le moins singulier qui, face à la folie du monde, s’invente une conduite de résistance inédite et fatale.
Estelle Nollet est la reine Oxymore. Elle-même : belle jeune femme pétillante d'intelligence écrivant des horreurs... Des horreurs douces, une ironie caressante, une empathie piquante, un fantastique ordinaire. Voici son second roman – c'est important les seconds romans, on y décèle au-delà de l'agréable surprise d'un premier, la capacité de l'auteur à se créer un univers voire un style. Donc second roman... Le premier, On ne boit pas les rats-kangourous retenait l'attention par son originalité, son étrangeté même : Théâtre d'ombres de personnages pittoresques échoués dans ce qu'il faut bien appeler le trou du cul du monde, retrouvé-je dans mes notes de l'époque.
Les voici les deux nouveaux personnages, pittoresques, échoués : Bang et Nao, lui Bang enfant du diable dont « il suffit que quelqu'un croise [le] regard, rien qu'une fois, pour [lui] débiter tous les secrets qu'il ne dira jamais à personne », elle Nao atteinte d'un cancer qui lui laisse peu de temps à vivre, qu'elle cache. Ils échouent l'un vers l'autre, dans un bar – Estelle Nollet aime les bars. Ils partent, en France, puis au Mexique, puis à Bali, en Australie, en Nouvelle-Zélande pour un "road novel" déjanté – ah là, pas un oxymoron, plutôt un pléonasme ! L'histoire s'emballe : elle tue pour venger les victimes après les aveux dans les yeux de Bang, elle le quitte, revient en France, se suicide rattrapée par le crabe... Le récit aurait pu – aurait du, se conclure là mais la romancière y ajoute un épisode centrafricain avant d'arriver à la fin souhaitée. Bang sans Nao, c'est une autre histoire et cette chute nuit à la cohérence de l'ensemble.
Péché de jeunesse, péché véniel qui n'infirme pas le talent naissant d'Estelle Nollet dont j'attends de nouveaux récits tendrement furieux et l'éclosion d'une écriture exceptionnellement précise – elle a voyagé dans les pays évoqués, qui mêle réalisme et onirisme.
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