"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une jeune femme veut un enfant.
L'enfant ne vient pas. Le désir la déchiquette à belles dents. Elle veut comprendre, il doit bien y avoir une explication, une bouée rationnelle, physique, à laquelle se raccrocher. Dans sa quête, elle rencontre successivement une ogresse lilliputienne, une gentille patricienne paresseuse, un ours plaisantin, un fana des jeux vidéo in utero, des cyber-sirènes, et les affres de la normalité. Tout va malheureusement bien.
Alors elle décide de prendre sa tête au sérieux et de chercher dedans. Dedans, il y a un souvenir de grand-mère, des chiens, des chats, des chevaux, et un événement, quand elle avait quinze ans.
Eloïse Lièvre, je l’ai rencontrée à la dernière Comédie du Livre de Montpellier en mai dernier. J’étais chargée de l’embrasser de la part d’une amie commune. Pourtant, d’elle, je n’avais rien lu. Notre conversation fut souriante, chaleureuse, amicale. Je suis repartie avec son dernier roman "Les gens heureux n’ont pas d’histoire", gentiment dédicacé. Celui-là, je ne l’ai pas encore lu. Je le garde précieusement pour cet hiver.
En revanche, je viens de terminer son premier roman. Il raconte l’histoire d’un couple en mal d’enfant, un couple pour lequel tout a toujours bien marché, qui a toujours décidé de tout et obtenu ce qu’il souhaitait. Oui, mais voilà, un enfant… Il ne suffit pas de le vouloir. Les jours passent, les mois passent et malgré les efforts… rien.
De son écriture très travaillée et pourtant légère, bourrée d’humour et en même temps de sensibilité et de pudeur, l’auteur nous entraîne dans le sillage de cette femme qui passe de gynécologues en radiologues, d’examens intimes en réflexions psychologiques pour se rendre compte que son corps et celui de son mari fonctionnent à merveille.
De quel côté chercher la raison de cette difficulté à procréer ? Ne comptez pas sur moi pour vous révéler un cheminement délicat dans les méandres de l’existence, une fin particulièrement touchante. Eloïse Lièvre a un don singulier pour vous émouvoir au plus profond, une empathie extrême à l’égard de ses personnages et de véritables qualités de conteuse. Ce roman relate une tranche de vie qui ne peut que toucher ceux qui ont traversé les mêmes affres et même les autres.
Le sujet, féminin en diable, ne m'est pas forcément destiné, moi mâle égoïste et père de famille.
La biche du titre est une jeune femme qui veut un enfant, là, tout de suite. Bien sûr, après des années de pilules cela ne marche à la première saillie et l'impatience est grande. Les mois passent et voici la ronde des médecins, des spécialistes, des analyses poussées. Tout est normal, la machine est prête à fonctionner. Mais la fécondation ne se fait point... Et si c'était dans la tête ? Sur un sujet de magazines féminins, Eloïse Lièvre arrive bien à nous faire partager l'attente, l'envie irrépressible de ce bébé, la déception, la froidure des médecins, les salles d'attente sordides et leurs vieux magazines périmés.
Ce livre, dont je n'attendais pas grand chose, est finalement une agréable surprise. Pas totalement maitrisé mais prometteur par l'acuité du regard de l'auteure et par son écriture qui sait si bien décrire le désarroi de toutes ces jeunes femmes face à la non fertilité dans une société qui rêve les femmes à la fois mères et putains.
Dans « La biche ne se montre pas au chasseur », Eloïse Lièvre interroge sur les raisons qui font que lenfant ne vient pas alors que tout, dans le corps, semble le permettre. Elle fouille dans les souvenirs enfouis pour ressortir celui qui, bien caché, parce que bien caché, empêche laccomplissement du désir.
Par le prisme dune trajectoire personnelle, cest une histoire universelle et banale, douloureuse et silencieuse qui se déroule.
Dans un style inimitable, les phrases dEloïse Lièvre sétirent comme de longs rubans dont les morceaux étincellent de reflets changeants. Il y a un monde entier, parfois plusieurs, dans ces plis et ces replis.
Premier roman tout en sincérité et, finalement, en pudeur, « La biche ne se montre pas au chasseur » réussit la prouesse de constituer un texte coulant et très accessible sur un sujet a priori délicat, sinon difficile, et peu présent dans la littérature.
Une découverte doublement prometteuse.
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