J.
: Donc, cannibale c'est celui qui se nourrit de l'autre de sa même espèce, alors qu'anthropophage est celui qui mange des hommes, que ce soit un porc ou un autre homme, dans ce dernier cas, lui-même, en plus, cannibale...
L. : Oui, c'est exact. Ce qui est curieux, c'est que manger l'autre est devenu très tôt, du fait même qu'il désignait plus un imaginaire qu'un phénomène attesté, métaphorique, et ainsi au XVIIIe siècle on utilisait anthropophage pour désigner un " exploiteur " voire un " bourreau " du temps de la Révolution française...
J.
: C'est donc dans le sens d " exploiteur " que le capitaine Haddock le reprend comme terme d'injure dans sa liste interminable d'insultes, entre " canaque " et " catachrèse " L. : Oui, c'est vrai... Ce qui est étonnant et qui fait partie de la magie de la langue, c'est que le chien est depuis toujours dans l'imaginaire humain un mangeur d'hommes, et qu'on peut faire une étymologie fantaisiste et arriver à cannibale, l'animal canin qui mange des hommes ; et s'il s'agit d'un homme, du fait même de dévorer de la chair humaine, il devient lui-même cannibale, c'est-à-dire chien, animal, bête...
J.
: En tout cas, alors que par " anthropophagie " on comprend une coutume alimentaire associée aux tribus et autres sociétés humaines primitives, le terme " cannibale " renvoie dans l'imaginaire populaire à, comme dirait Pierre Chaunu, " un bel appétit ".
L. : Et à une culture, à une tradition faite de dieux et d'hommes " notables " qui ont pratiqué le cannibalisme, et qui constituent une véritable lignée cannibalesque, des origines à nos jours.
Et ce, en Occident, chez nous, en Europe, pas ailleurs, pas chez les autres...
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