"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Le phénomène se propage rapidement aux quatre coins du globe. Tout le monde en parle, tout le monde veut en avoir un. Lapins, corbeaux, dragons... les kentukis sont de petits robots en forme de peluche, dotés d'une caméra et de trois roues mobiles qui leur assurent une certaine autonomie. Ils sont connectés au hasard à un utilisateur anonyme qui a acheté le droit de les habiter et qui peut se trouver n'importe où sur la planète. Voilà pourquoi ces créatures, qui errent désormais librement dans les maisons et les bureaux, ne sont pas complètement ino ensives:elles scrutent les conduites, enregistrent les conversations et interviennent constamment dans la vie des autres.Ainsi, une retraitée de Lima peut suivre les mésaventures d'une jeune femme allemande et se réjouir ou s'inquiéter de son sort; un garçon du Guatemala peut se lancer dans une aventure en Norvège et voir la neige pour la première fois; un jeune Italien, père fraîchement divorcé, peut combler le vide laissé par son ex-femme. Les possibilités sont infinies mais pas toujours très claires:outre la curiosité et la tendresse, le dispositif suscite de nouvelles formes de voyeurisme, d'obsession, de sexualité et de danger.Déployant une langue et un imaginaire que l'on compare à ceux de Shirley Jackson et de David Lynch, Samanta Schweblin emporte le lecteur dans une atmosphère hypnotique, aux frontières du thriller et de la science-fiction, et offre une histoire surprenante, sans point mort et radicalement contemporaine.
Relativement court, interpellant et détonnant par son sujet, un phrasé et une narration prenants, Kentukis est typiquement un roman que j'aurais lu d'une traite si mon emploi du temps le permettait.
Je profite pour remercier Ladybirdy qui me l'avais conseillé suite à ma lecture de Klara et le soleil de Kazuo Ishiguro.
Mais de quoi parle ce livre? Kentukis n'est pas une ville de plaisance située sur une côte ensoleillée mais représente de petits animaux de compagnie robotisés, munis d'une caméra, qui vous observent à tout moment de la journée, du moins si vous leur en laissez l'occasion. Ressemblants à des petits lapins très mignons, à des pandas craquants ou à des dragons inoffensifs, ces petits êtres faits de poils, de plastique et de circuits programmés seront les compagnons idéaux pour votre enfant ou pour vous même, vous, le grand enfant que vous êtes resté, seront à coup sûr le cadeau qui fera plaisir pour Noël, les anniversaires ou autres barmitsvas. Sauf que... Sauf que ces nouveaux jouets technologiques ne sont pas si anodins qu'il ne paraît à première vue puisque derrière chacun se cache une autre personne, qui peut se trouver n'importe où à travers le monde, une personne bien réelle qui a décidé, elle, de «devenir» un kentuki, par plaisir du voyeurisme, par ennui, par intérêt et curiosité, ou pour toutes autres raisons aussi diverses que variées. Alors il se peut que vous cohabitiez avec une gentille grand-mère résidant en Argentine, vous qui vivez en Allemagne, ou avec un adolescent américain en mal de sensation, ou alors avec un pédophile ou un serial killer, qui sait...
C'est dans un monde quelque peu parallèle au nôtre, assez proche, dans un futur qui existe déjà ou qui se rapproche fortement, que nous propose ici d'explorer Samanta Schweblin. Et, d'un côté, cela fait plutôt froid dans le dos. Dans la lignée d'un épisode de la série Black Mirror, dont cet opus ne détonnerait pas, l'autrice nous invite à nous questionner sur nos rapports aux nouvelles technologies mais aussi aux autres, virtuellement ou IRL comme on dit, à nous plonger dans notre Moi profond, savoir si l'on préfère être (soit, «devenir» la bestiole pour observer la vie des autres) ou avoir, sans pour autant avoir de contrôle sur l'autre sauf à s'en débarrasser définitivement.
Original sans être barge, ce roman nous plonge, nous lecteurs, dans une certaine forme de psyché humaine que je pourrais qualifier d'universelle, appâtés comme nous pouvons tous l'être un jour ou l'autre par le voyeurisme, la curiosité, même malsaine, ou la convoitise.
En résumé, un roman glaçant sous bien des aspects, prenant et envoûtant à certains moments (je me rappelle surtout d'une «rencontre» entre deux kentukis), percutant dans son ensemble.
Je déplore peut-être sa relative brièveté, qui enlève selon moi un peu de profondeur au récit, même si cela permet une plus grande introspection.
Lu (et adopté) en octobre 2021
Science-fiction ou légère anticipation ? Les kentukis sont peut-être à nos portes, en cours de fabrication et prêts à envahir nos vies, le temps d’un engouement éphémère, comme pour tous ces gadgets que l’on a vu partout et qui ont fini sur les étals mornes de braderies de quartier.
Le kentuki, c’est un concept, enfermé dans une petite peluche, qui prend les traits d’un animal au choix, une gentille petite peluche. Cette merveille de technologie est équipée d’une caméra embarquée, ce qui signifie qu’à partir du moment où elle est activée, elle va filmer tous vos gestes et transmettre images et dialogues à quelqu’un quelque part sur la planète, un illustre inconnu à qui il suffit de se connecter sur une appli. Avec une communication aléatoire et complexe entre vu et voyeur.
L’auteur nous repose de suivre plusieurs aficionados de cet espion 3.0 et surtout d’analyser à travers différentes situations les conséquences éventuelles d’une telle intrusion dans la sphère privée des propriétaires de kentukis.
C’est assez vertigineux et flippant. A la fois sur la fragilité de nos désirs induits de consommateurs aveugles, et sur les conséquences de l’exposition de la vie intime, comme une escalade que les réseaux sociaux ont amorcée.
C’est parfois dérangeant, mais en tout cas très efficace. Un roman marquant. Et je remercie les voix du podcast Bibliomaniacs pour avoir attiré mon attention sur ce livre.
Connaissez-vous la série télé "Black mirror" ? Si vous n'avez pas encore découvert cette série, foncez visionner cette dystopie. Chaque épisode de cette série raconte une histoire différente. Le point commun de ces histoires est une réflexion sur l'impact des nouvelles technologies sur la société.
Pourquoi je vous parle de cette série ? Tout simplement car le roman de Samanta Schweblin ressemble à un épisode de cette série. Il faut prendre ça comme un compliment venant de moi car je suis tout simplement fan de cette fantastique série. J'ai donc particulièrement apprécié retrouver ce type d'univers dans un roman.
Ce roman choral propose au lecteur de découvrir plusieurs personnages. Ils ont tous pour point commun de posséder un kentuki ou l'accès à un kentuki. Le kentuki est une espèce de petite peluche sur roulette et équipée de caméra. Le concept est le suivant : vous pouvez acheter un kentuki, donc avoir l'objet physiquement avec vous ou bien vous pouvez vous procurer un code d'accès vous donnant le contrôle à distance d'un kentuki au hasard. Lorsque vous possédez la peluche, vous ne savez pas qui la contrôle et même si la personne est dans le même pays que vous. Attention, si la batterie du kentuki n'est pas rechargée à temps, la connexion est définitivement perdue.
Le concept est tordu et pourtant totalement crédible, on imagine sans mal l'arrivée de ce genre d'objet sur le marché. Je ne sais pas si je me suis bien expliqué mais si vous avez bien saisi le concept, alors vous imaginez bien qu'on peut explorer tout un tas de situation et l'écrivaine ne s'en prive pas.
On découvre ainsi toute une galerie de personnage qui vont chacun entretenir un relationnel différent avec des inconnus par le biais des kentukis. Je ne vais pas citer d'exemple, déjà parce qu’il y en a dans le résumé du livre que vous pouvez lire un peu plus haut sur cet article, et puis pour garder la surprise entière si vous venez à lire ce roman.
Pour ma part, j'ai aimé même si j'ai été par moment un peu frustré que l'écrivaine ne s'attarde pas plus sur certains personnages. Effectivement, le rythme du récit est très dynamique, on passe d'un personnage à l'autre rapidement avec des chapitres plutôt courts. On revient parfois sur certains personnages, parfois non, c'est assez inégal. Pour autant, cela ne dégrade pas l'expérience de lecture.
La réflexion sur l'impact de ce type de technologie est très intéressante et les situations sont parfois glaçantes. Il y a une belle alternance entre les émotions. On enchaîne des passages drôles, tristes, angoissants, heureux, il y a un peu de tout et je ne me suis jamais ennuyé au cours de ma lecture. Le style d'écriture est dynamique, moderne et j'ai pris un vrai plaisir à parcourir ces lignes.
Je vous recommande ce roman dystopique qui sort de l'ordinaire. Si vous aimé la série "Black mirror", foncez, vous ne serez pas déçu. Je donne le même conseil pour les lecteurs ne connaissant pas la série. Le concept de base, la diversité des situations et des personnages, la réflexion qu'entraîne cette lecture...Tous ces éléments rendent ce roman intéressant à découvrir.
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