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Jusqu'à un passé récent, la finance et l'écologie semblaient appartenir à des mondes éloignés : d'un côté la circulation des flux financiers avec son rythme trépidant et ses multiples mouvements browniens qui peuvent rétracter ou élargir le stock de capital financier au gré des fluctuations de la Bourse ; de l'autre le capital des ressources naturelles exposé aux multiples prélèvements et restitutions de l'activité humaine et dont les risques d'épuisement ou les opportunités de régénérescence ne peuvent se concevoir que dans des cycles de très long terme.
Des zones d'intersection entre la finance et l'écologie sont néanmoins apparues ces dernières années. La plus apparente a concerné l'utilisation de techniques des marchés financiers dans le cadre de la mise en oeuvre du protocole de Kyoto qui fixe des engagements de réduction des émissions de gaz à effets de serre aux pays industrialisés. On aurait cependant tort de considérer cette avancée comme purement technique. L'arrivée de la préoccupation environnementale sur un compartiment du marché des actifs financiers constitue l'une des facettes d'un mouvement plus profond : l'irruption de la préoccupation du développement durable dans le monde de la finance qui va toucher de façon croissante le mode d'évaluation des firmes sur le marché et va s'imposer comme une dimension incontournable de la stratégie des acteurs de l'industrie des services financiers.
La montée en régime de "l'investissement socialement responsable" marque une véritable rupture, liée à une mutation de fond sur les marchés financiers : le rôle croissant des investisseurs institutionnels et il y a fort à parier que ces nouvelles dimensions écologiques et sociétales de l'analyse du potentiel des firmes vont s'imposer demain au coeur du fonctionnement des marchés financiers.
Ces nouvelles dimensions répondent de surcroît à une pression croissante exercée par les nouveaux acteurs de la société civile. Du fait de leur contribution à la globalisation des marchés de capitaux, vecteur privilégié de la mondialisation, les institutions financières sont désormais sous les projecteurs de la société civile. Celle-ci considère que la responsabilité des acteurs financiers est non seulement d'assurer le bon fonctionnement des circuits financiers, mais qu'elle est également engagée par leurs impacts sur le fonctionnement de l'économie. C'est pourquoi les points d'intersection apparus entre finance et environnement sont loin d'être circonstanciels. Ils marquent les prémisses d'une nouvelle ère durant laquelle l'ensemble de la communauté financière sera jugée, non seulement sur l'efficacité de ses méthodes, mais aussi sur l'utilité sociale et environnementale de ses finalités. Pour se mettre au diapason de ces nouvelles dimensions cette communauté doit enrichir ses approches et ses modes d'intervention traditionnels. Et c'est à cela que ce numéro très complet de la Revue d'économie financière tente de contribuer.
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