"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dido n'a aucun scrupule, mais elle a un principe : pour exister, il faut servir à quelque chose, être utile, avoir un talent - même un tout petit - et le mettre au service de tous... Elle, son talent, sa spécialité, c'est de tuer les banquiers ! Et d'habitude, elle fait ça très bien... Mais là, elle a dérapé ! Enée, lui aussi a un principe. Si Dido lui dit : « Faut que tu viennes ! », il accourt. Toujours ! Et côté scrupules, lui aussi voyage léger... Mais parfois dans la vie, en plus des principes et des scrupules, il y a les impondérables, les dommages collatéraux qu'on n'attendait pas... Alors quand Dido décide de se lancer dans cette affaire, il y a fort à parier qu'Énée va se retrouver très vite les mains dans le cambouis... Dido et Énée, un couple improbable et déjanté, des situations scabreuses et ébouriffantes, un style cash et pimenté, un humour très noir et des cadavres à la pelle.
Avec Thiriet, c'est chaud bouillant, facile comme entrée en matière, j'aurais pu la faire avec M. ou Mme Picard ou Toupargel... Que les autres vendeurs de glace à la viande ou au poisson ne m'en veuillent pas de ne pas les citer ici, je ne fais pas de placement de produit, juste une -mauvais- blague !
Donc, disais-je avant de m'interrompre, P. Thiriet, ça décoiffe. J'avais déjà testé avec J’ai fait comme elle a dit, deux paumés qui semaient le trouble et quelques cadavres derrière eux. Il reprend non pas les mêmes personnages, mais les mêmes codes : un type pas trop sûr de lui Énée et une femme à la forte personnalité qui le mène là où elle veut. Entre eux, il y a eu de l’amour physique, il peut encore en avoir, mais leur relation est plus fraternelle, un rien incestueuse. Énée protège Dido qui se sert d’Énée. Enée, il rencontrera d’autres femmes, quasiment toutes sur le même modèle, des femmes qui dirigent. Thiriet est pour le pouvoir par les femmes. Un féministe quoi ! Et ça ne traîne pas chez lui, on est dans le bain tout de suite, dès les premières pages, "Elle avait dit : "Faut que tu viennes ! Tout de suite !" Ou bien "Maintenant !" Énée ne savait plus exactement." (p.5), jusqu’aux dernières, car jusqu’à la fin on se demande comment cette histoire va pouvoir se finir. Bien ? Mal ? Y a-t-il vraiment une bonne ou une mauvaise fin d’ailleurs ? Une happy end ou une sad end ? Suspens jusqu’aux quasi ultimes lignes
Aucun temps mort et même si la combine montée par Dido est parfois alambiquée, elle se suit assez aisément dans les grandes lignes. Dido, ce qu’elle veut c’est dézinguer ceux qui ont le pognon et le pouvoir : "Tu sais bien que ce n’est pas pour l’argent. C’est pour nuire. Tu sais bien ! A la fin je veux que les méchants soient punis. Les méchants, c’est les banquiers et les corrompus. Je veux qu’ils en bavent." (p.78/79)
Tous les intervenants qui aident Dido et Enée sont un peu abimés par la vie, fille violée, clodos, prof arnaqué, un peu comme Dido et Enée eux-mêmes. Même la banquière, Bérengère, elle a un passé pas très facile, bien que fille de banquier riche et élevée avec de l’argent. Pour se maintenir en vie Enée picole dur, on pourrait presque croire que le Jack Taylor de Ken Bruen à côté est un petit joueur, mais lui, en plus il avale du Xanax, ça double ou triple voire pire les effets. Enée il carbure au casa, normal puisqu’il sévit du côté de Sète et Montpellier.
Pascal Thiriet a une écriture vive, dynamique qui joue avec les mots de différents niveaux de langage, il dialogue beaucoup, il joue aussi avec les sons : "Dis, Dido, dis donc…" (p.27), "Du coup, Enée s’en prit un second, et puis encore un, ce qui fait qu’en passant à table il était, disons, disert." (p.31). C’est un roman noir réaliste, l’un de ceux dont on se dit que les arnaqueurs doivent s’en sortir tellement ils sont cabossés et sympas, même si pour parvenir à leurs fins ils doivent sacrifier un ou deux –ou plus- adversaire bien pourris certes, mais ils les devront les occire tout de même pour essayer de s’en sortir, plus un ou deux malfaisants, juste pour débarrasser leurs actuelles et leurs futures victimes.
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